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DROIT

Le droit est l'ensemble des règles générales et abstraites indiquant ce qui doit être fait dans un cas donné, édictées ou reconnues par un organe officiel, régissant l'organisation et le déroulement des relations sociales et dont le respect est en principe assuré par des moyens de contrainte organisés par l'État.


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La contestation de la philosophie des droits de l'homme

La contestation de la philosophie des droits de l'homme
La négation des droits de l'homme : le totalitarisme. ' La
philosophie des droits de l'homme a fait au xx' siècle l'objet
d'une critique radicale. Certaines théories politiques ont procédé A  une
négation systématique de ces droits, en en rejetant tous les fondements, dont celui de la dignité de tous les AStres humains et de leur égale valeur. Ils ont, selon les cas, affirmé la supériorité absolue de l'Etat nation (fascisme), de la Race (nazisme), ou de la classe idéologique (stalinisme). Ils ont utilisé A  l'égard des récalcitrants le mASme appareil répressif (primat du chef, parti unique, proande et police). Dans ce que l'on pourrait appeler sa - phase suprASme -, le totalitarisme tente d'aboutir A  une dépersonnalisation de l'AStre humain, A  1' - homme sans ame - selon l'expression d'Hannah Arendt. Selon cet auteur, - le but d'un système arbitraire est de détruire les droits cils de la population tout entière, de telle sorte qu'elle finisse par AStre mise hors la loi dans son propre pays, au mASme titre que les apatrides et les sans-logis. La destruction des droits de l'homme, I'étouffement en lui de la personnalité juridique sont un préalable nécessaire A  la complète domination de celui-ci -4'. Le but ultime sera de déposséder, par l'anonymat, l'homme, du sens de sa propre mort48, de le rendre superflu4".
Négation des droits de l'homme, le totalitarisme l'est aussi de la dignité de la personne humaine. En revanche, d'autres critiques ont rejeté la conception que se faisait le xiie siècle de ces droits, sans pour autant cesser d'AStres humanistes. Elles n'ont pas réussi A  étouffer un mythe et un vocabulaire. Elles ont probablement contribué A  la coexistence, plus ou moins reconnue, de plusieurs philosophies des droits de l'homme assez distinctes de celle qui fut proclamée il y a deux siècles.

1 La diversité des critiques

Chronologiquement, les premiers A  dénoncer les droits de 1789 ont été les traditionalistes. Ils furent rejoints au xixa,¬ siècle par certains socialistes au premier rang desquels on trouve les marxistes. Puis, en retrait par rapport A  ces critiques, on trouve la pensée dominante de la classe politique occidentale qui nuance, au nom du réalisme, la philosophie du xiie plus qu'elle ne la condamne.

Les traditionalistes. ' Un an après le début de la Révolution franA§aise, en 1790, Burke, Anglais et protestant, manifestait dans ses Réflexions sur la Révolution franA§aise une ve hostilité A  rencontre des philosophes parisiens. N'avaient-ils pas en contribuant A  déclencher la première révolution philosophique moderne, méconnu le poids et la réalité de la tradition, le plus grand soutien de tout gouvernement? Quant aux principes abstraits et - métaphysiques - qu'ils avaient réussi A  faire proclamer, seraient-ils d'une quelconque utilité pour la e quotidienne des FranA§ais?50. Les mASmes idées allaient AStre défendues en 1795 par Joseph de Maistre dans ses Considérations sur la France : - Il n'y a pas d'Homme dans le monde, devait-il écrire. J'ai vu des FranA§ais, des Italiens, des Russes, mais quant A  l'homme, je déclare ne l'avoir jamais rencontré de ma e. -
La position officielle de l'Eglise catholique avait, par avance, conforté ces opinions. Le 10 mars 1791, Pie VI avait promulgué le bref quod aliquantum. Tout en sant plus particulièrement les articles 10 et 11 de la déclaration, le pape dénonA§ait - cette liberté absolue qui accorde cette licence de penser, de dire, d'écrire et mASme de faire imprimer, en matière de religion, tout ce que peut suggérer l'imagination la plus déréglée; droit monstrueux qui parait cependant A  l'Assemblée résulter de l'égalité et de la liberté naturelle A  tous les hommes -". Il est vrai que le vote par l'Assemblée franA§aise, en 1790, de la Constitution cile du clergé avait contribué A  tendre les rapports avec l'Eglise. Les exactions commises ensuite par les révolutionnaires, la méconnaissance flagrante des principes qui venaient d'AStre proclamés amenèrent une double réaction d'hostilité : philosophique, dans la mesure où les nouveaux principes étaient dénoncés comme étant A  l'origine de ces errements, mais également politique. Les légitimistes confondirent au xixe siècle leur lutte en faveur d'un rélissement de la monarchie et une dénonciation des droits de l'homme62.
Les critiques traditionalistes ne furent pas seulement émises par des écrivains catholiques au nom de la condamnation d'une fausse conception de la liberté. Le penseur voltairien Rivarol, lui, dénonA§ait la souveraineté populaire et la revendication d'égalité au nom de l'ordre. Pour d'autres raisons encore, certains socialistes s'en prirent A  la Déclaration de 1789.

Les marxistes. ' Marx aborde la critique des - droits de l'homme - par l'intermédiaire de - la question juive -. Depuis 1816, les Juifs étaient, en Prusse, exclus des fonctions publiques et relégués, dans le domaine du droit public, A  un statut subalterne. Bruno Bauer avait, en 1842-l843 proposé une solution inspirée de l'hégélianisme de gauche. Pour résoudre le problème juif, il fallait mettre en place l'Etat laïque.
Marx rejette radicalement cette solution. L'Etat soi-disant laïque et démocratique de Bauer laisse subsister un antagonisme fondamental entre la e au sein de la communauté politique où l'homme se considère comme AStre communautaire, et la e dans la société cile où il exerce son actité comme homme privé. Ce dédoublement dans lequel les libéraux voient la condition juridique de la liberté humaine est goureusement condamné : - Nous constatons que les droits dits de l'homme, les droits de l'homme, par opposition aux droits du citoyen, ne sont rien d'autre que les droits du membre de la société bourgeoise, c'est-A -dire de l'homme égoïste, de l'homme séparé de l'homme et de la collectité -. Les définitions de la liberté et de la propriété y sont égoïstes car - le droit humain A  la liberté n'est pas fondé sur la relation de l'homme A  l'homme, mais au contraire sur la séparation de l'homme d'avec l'homme. Il est le droit A  cette séparation, le droit de l'indidu limité, limité A  lui-mASme -!65. - Aucun des droits dits de l'homme ne dépasse donc l'homme égoïste, l'homme tel qu'il est comme membre de la société bourgeoise, c'est-A -dire un indidu replié sur lui-mASme, sur son intérASt privé et sur son bon plaisir privé et séparé de la communauté. Loin qu'en eux l'homme soit conA§u comme un AStre générique, la e générique, la société apparait au contraire comme un cadre extérieur aux indidus, comme une limitation de leur autonomie primitive. Le seul lien qui les unit, c'est la nécessité naturelle, le besoin et l'intérASt privé, la conservation de leur propriété et de leur personne égoïste -.
L'émancipation qui ne pouvait résulter de la révolution politique, Marx la voit dans la révolution sociale, radicale, ouvre du prolétariat. A partir de 1848, Marx se réclame de la science. La révolution prolétarienne perd toute consonance - morale -. Le prolétariat a un rôle historique A  jouer. Produit de l'économie capitaliste, il est la seule classe que la bourgeoisie produit et reproduit nécessairement.
Dans la première phase - socialiste - qui suivra la prise de pouvoir, celle de la dictature du prolétariat, le droit restera dans sa teneur, comme tout droit, un droit de l'inégalité. Il se distinguera néanmoins des droits bourgeois par sa finalité : rélir l'égalité réelle. Ainsi dans la deuxième phase, celle de la société communiste, l'homme indiduel sera enfin apte A  coïncider avec son AStre générique. Chacun recevra selon ses besoins. L'homme deendra nature et la nature humaine.
L'avènement de cette société future suscitera encore bien des interrogations. Aucune société ne prétend avoir atteint ce stade. En revanche les - démocraties socialistes - estiment AStre sur la voie de l'édification du communisme. Elles justifient, par lA  mASme, les profondes différences qui séparent leur conception des droits de l'homme de celle des démocraties libérales.
La première volonté, clairement affichée, est de rendre les droits proclamés dans les constitutions libérales, plus réels. Marx avait en effet dénoncé le caractère formel des libertés - bourgeoises -. Du fait des inégalités sociales, seuls les bourgeois peuvent utiliser les droits proclamés théoriquement pour tous. - Qu'est-ce que la liberté d'un chômeur américain? -, selon la fameuse question de Vichynski. La constitution soétique entend garantir concrètement tous les droits qu'elle énonce dans les articles 33 et suivants". Plusieurs articles comprennent un premier paragraphe, dans lequel le droit est énoncé, sui d'un second, précisant les modalités de sa mise en ouvre : - Ce droit est garanti par - Cette rédaction ne suffirait cependant pas A  assurer l'originalité de la constitution soétique par rapport aux constitutions libérales. Ces dernières ont, en effet, de plus en plus tendance A  prévoir aussi les garanties des droits proclamés, mASme si elles le font de faA§on moins systématique. De mASme on ne peut pas opposer la société soétique et les sociétés libérales sur la seule base des olations de droits plus nombreuses dans les premières que dans les secondes. Ceci supposerait l'absence de divergence de principes. Or tel n'est pas le cas.
La conception soétique des droits, libertés et devoirs fondamentaux des citoyens est foncièrement différente de celle des démocraties libérales. Les droits et libertés y sont conA§us comme des droits orientés. Ils n'ont aucunement pour but de permettre A  chacun de mener sa e selon ce que lui dicte sa conscience, mais de favoriser sa participation A  la construction de la société socialiste. Les principes de la transformation sociale occupent la première place. C'est en fonction d'eux que les droits doivent AStre compris. Ainsi, l'article 39, après avoir mentionné que les citoyens en -jouissent dans toute leur plénitude -, ajoute que cet exercice - ne doit pas porter préjudice aux intérASts de la société et de l'Etat, aux droits des autres citoyens -. Plus clairement encore, l'article 50 est ainsi libellé : - Conformément aux intérASts du peuple et afin de consolider et de développer le régime socialiste, les libertés de parole, de la presse, de réunion, de meeting, de défilé et de manifestation de rue sont garanties aux citoyens de I'urss - C'est au Parti communiste qu'incombe la mission de veiller A  l'usage correct des libertés : - Le Parti communiste de l'Union soétique c'est l'élément central de son système politique et de toutes les organisations tant sociales que d'Etat - (art. 6). Sans mASme porter un jugement de valeur sur la pratique soétique en matière de liberté, il faut constater qu'elle s'inspire de principes très différents de ceux des démocraties occidentales. Sans en admettre toutes les conséquences, celles-ci ont d'ailleurs été influencées par certains aspects de la critique marxiste.

Les réalistes. ' Les marxistes n'ont pas été les seuls A  dénoncer les conséquences d'une pensée libérale, issue elle-mASme de la pensée du xiie. De nombreux juristes occidentaux ont rejeté la notion mASme de droits subjectifs ou, plus simplement, le caractère trop absolu et abstrait des droits de 1789. Leur caractère trop formel a été reconnu. Des solutions ont été proposées.
Cependant, l'ampleur des critiques formulées A  l'encontre de la philosophie des droits de l'homme, leur sévérité, jointe aux infortunes du contexte international, ont été jusqu'A  faire douter certains du maintien mASme des principes. Ce courant pessimiste fut très marqué par le contexte européen des années 30. L'Union soétique avait tourné le dos au libéralisme, avec le stalinisme dont on ne mesurait pourtant pas encore toute l'horreur. L'opinion publique franA§aise fut plus sensible A  l'évolution politique de ses proches voisins touchés par le fascisme, le nazisme, le salazarisme ou le franquisme. Très différentes, toutes ces idéologies avaient au moins en commun de rejeter le dogme libéral. Elles correspondaient bien A  une - Décadence de la liberté -»-. La Libération aurait pu AStre source de plus d'optimisme. Elle le fut partiellement. Mais d'autres inquiétudes remplaA§aient les précédentes. L'extension soétique sembla un temps inélucle. Surtout, les guerres coloniales entrainèrent un cycle terrorisme-répression très défavorable aux libertés.
En effet les démocraties libérales avaient déjA  été contaminées par l'antagonisme entre partisans des régimes totalitaires et adeptes des démocraties populaires dans l'entre-deux-guerres. De nombreuses dispositions peu libérales furent alors adoptées. A peine débarrassé des dispositions plus ou moins imposées par l'occupant nazi, notre pays redécouvrait, avec les guerres d'Indochine et d'Algérie, les atteintes aux libertés indiduelles et collectives et les législations et juridictions d'exception'0. L'Angleterre elle-mASme ne fut pas A  l'abri des retombées des mASmes événements. Quant aux Etats-Unis, ils succombèrent aussi aux tentations autoritaires notamment avec le maccarthysme. Les entorses aux droits étaient justifiées par le souci de contrecarrer efficacement les menées soétiques. Les démocraties libérales n'allaient-elles pas y perdre leur ame?
Des auteurs appartenant A  divers courants de pensée n'hésitèrent pas A  le prétendre. Tout en prédisant ou en constatant l'inexorable déclin des libertés, ils essayaient de lui trouver des explications autres que conjoncturelles. On évoqua alors la montée du nationalisme, le développement des partis de masse disciplinés liés A  l'avènement du suffrage universel dans une société manquant de maturité, la persistance de mentalités autoritaires, l'existence de groupes privés se permettant olences et séquestrations interdites A  l'Etat. Indépendamment de ces phénomènes politiques, on évoqua l'évolution des techniques facilitant l'intrusion dans la e privée des citoyens. Enfin n'y avait-il pas une incompatibilité irréductible entre l'esprit de liberté reposant sur la notion de responsabilité indiduelle et la mise en place d'une société d'assistance ? Perdant le sens de l'effort et de la responsabilité indiduelle, les foules occidentales n'allaient-elles pas réclamer A  leur tour du pain et des jeux?
Toutes ces réflexions suscitèrent une contradiction. On constata que la montée du totalitarisme n'était pas irréversible. L'Allemagne et l'Italie étaient redevenues démocratiques. Plus près de nous, le Portugal, l'Esne, la Grèce ont adopté les principes du libéralisme. Sans AStre suffisant, le reflux se constate périodiquement dans d'autres parties du monde. Le Brésil, l'Argentine, puis l'Uruguay ont organisé des élections libres, ainsi que les Philippines. La contestation se fait jour au Chili, de mASme qu'en Pologne. Les totalitarismes de gauche ou de droite n'étouffent jamais complètement l'esprit de liberté.
On remarque encore que si de trop nombreux pays du Tiers Monde connaissent des dictatures plus ou moins rigides, ou le totalitarisme, il n'y a lA  aucun déterminisme absolu. Certains d'entre eux, et pas nécessairement les plus riches, sont soucieux de respecter la dignité de leurs ressortissants, sans renoncer, plus que les autres, aux nécessités du développement.
Quant aux démocraties libérales, elles sont, avec la fin des guerres coloniales, revenues A  un plus grand respect du droit. Des législations récentes montrent que la protection des libertés contre les dangers du progrès technique est possible en trouvant des moyens appropriés pour le maitriser. Démocratie sociale et libérale peuvent également AStre réconciliées.
En fait, c'est probablement l'usage des libertés qui posera des problèmes plus difficiles A  résoudre que la reconnaissance de leur garantie. Peut-AStre faut-il en chercher la cause dans l'insuffisance de certaines des philosophies des droits de l'homme qui coexistent aujourd'hui.


2 Des philosophies différentes


La philosophie libérale. ' Chronologiquement, ce sont les philosophes libéraux qui, les premiers, ont tiré les conséquences
extrASmes des principes de 1789. Celles-ci sont remarquablement exposées par Benjamin Constant dans ses Principes de politique11 : - Aucune autorité sur la terre n'est illimitée - - Il y a une partie de l'existence humaine qui, de nécessité, reste indiduelle et indépendante, et qui est de droit hors de toute compétence sociale - Car l'originalité de Benjamin Constant consiste A  faire du respect de la liberté, le critère de la légitimité de toute autorité politique : - Les citoyens possèdent des droits indiduels indépendants de toute autorité sociale ou politique, et toute autorité qui ole ces droits deent illégitime. Les droits des citoyens sont la liberté indiduelle, la liberté religieuse, la liberté d'opinion, dans laquelle est garantie sa publicité, la jouissance de la propriété, la garantie contre tout arbitraire. Aucune autorité ne peut porter atteinte A  ces droits sans déchirer son propre titre. -
Pour des motivations et dans le cadre de philosophies différentes, la quasi-totalité des penseurs libéraux contemporains pourraient reprendre A  leur compte de tels principes. Pour certains, la liberté indiduelle a une valeur absolue. Pour d'autres, elle n'est qu'un pis-aller. Ceci se manifestera lorsqu'il s'agira de lui assigner des limites. La principale divergence entre les libéraux se situe au niveau de la place A  faire aux droits économiques. Faut-il les considérer comme des droits fondamentaux parce qu'ils sont indissolublement liés aux autres? C'est ce que pensait Benjamin Constant. C'est ce qu'affirment aujourd'hui ceux que l'on qualifie couramment de - libéraux - et que l'on classe généralement A  droite ou parmi les conservateurs. En revanche, pour les sociaux démocrates, l'interventionnisme étatique est indispensable, précisément, pour garantir la liberté indiduelle, car de trop grandes inégalités sociales risqueraient de l'étouffer.

Les constitutions occidentales contemporaines. ' La plupart des démocraties libérales sont partagées entre ces deux courants
de pensée. Elles en tiennent compte pragmatiquement. Sans renier la philosophie du xiie, la plupart des Constitutions et Déclarations de l'après-guerre la nuancent sensiblement. Citons pour exemple la Constitution italienne du 27 décembre 1947, la Loi fondamentale de la République fédérale allemande du 23 mai 1949 et le Préambule de la Constitution franA§aise du 27 octobre 1946. MASme lorsqu'ils conservent une valeur fondamentale et la première place dans les textes constitutionnels, les droits et libertés perdent leur caractère transcendant et universel.
Le droit des groupes (famille) et le droit de se grouper apparaissent A  côté des droits de l'indidu : - La République reconnait et garantit les droits inolables de l'homme, aussi bien en tant qu'indidu que dans les formations sociales où s'exerce sa personnalité -, proclame l'article 2 de la Constitution italienne. Un souci d'effectité amène également A  s'intéresser aux conditions de mise en ouvre des droits théoriquement proclamés et A  prévoir, le cas échéant, l'adjonction A  cette fin de droits publics indiduels, c'est-A -dire de droits A  des prestations. Enfin un certain relatisme est très sensible en matière économique : - Propriété oblige. L'usage de la propriété doit contribuer en mASme temps au bien de la collectité -, est-il écrit A  l'article 14-2 de la Constitution allemande. Aussi, certains droits perdant leur caractère absolu sont-ils soumis A  une certaine finalité sociale92.
Cette prise en compte des - leA§ons de l'histoire -, ce pragmatisme contemporain, cette atténuation de ce que la philosophie du xiie siècle avait conféré de plus extrASme aux droits de l'homme facilitèrent un certain nombre de ralliements. Deux d'entre eux sont particulièrement significatifs et importants pour l'avenir mASme de la notion de droits de l'homme.

Le - ralliement - catholique. ' Le ralliement catholique repose apparemment sur un changement radical de la part de l'Eglise. Les papes ont en effet condamné la conception libérale des droits de l'homme de 1791 jusqu'au pontificat de Léon XIII. L'attitude plus positive fut le fait de Pie XII et de ses successeurs Jean XXIII, Paul VI et, bien entendu, Jean-Paul II.
On pourrait, bien sûr, ne voir dans ce ralliement qu'une pure opportunité. L'Eglise reprendrait A  son compte une philosophie et un vocabulaire dont elle aurait mesuré l'impact sur nos contemporains. Elle retournerait les principaux thèmes de la philosophie du xiie contre les théories politiques matérialistes qui en sont, A  certains égards, les héritières. Bref, il s'agirait d'une - récupération - purement circonstancielle. En fait les explications sont plus complexes. Le contexte anticlérical de la Révolution franA§aise et des mouvements qui s'en réclamèrent est pour beaucoup dans la rigidité des condamnations. Les maladresses de certains de ses admirateurs chrétiens contribuèrent A  les maintenir tout en préparant probablement l'avenir. Intransigeance, contextes culturels et politiques jouaient dans le mASme sens.
La connaissance, encore incomplète, des horreurs du totalitarisme n'est pas étrangère A  l'affirmation de l'existence de droits fondamentaux par Pie XII dans ses Messages de NoA«l de 1942 et 1944. Ce pape, très ouvert sur le monde moderne, contrairement A  une légende persistante, était également juriste et pouvait mesurer l'importance des formulations. La liberté de conscience apparait avec la consistance d'un droit indiduel. La liberté religieuse est proclamée comme un droit des personnes autant que des communautés-l. Plusieurs ouvrages de Jacques Maritain témoignent d'un souci identique. C'est parce qu'une société respecte les valeurs humaines de l'Evangile, la dignité et les droits de la personne qu'elle peut AStre qualifiée de chrétienne".
On ne peut cependant pas parler d'un changement d'attitude de la part de l'Eglise mais plutôt d'un changement de regard. Les droits de l'homme reposent sur l'infaillibilité de la conscience indiduelle. C'est ce qu'ont méconnu de nombreux chrétiens du xixe siècle, de Lammenais A  Bûchez. Leur pensée aboutissait A  dissoudre l'Eglise dans la démocratie, A  socialiser le caire savoyard-6. Or, - Léon XIII, comme Pie IX rejette une fausse notion de droit naturel dérivant de l'idée de nature qui est celle de Rousseau, une nature sans loi, sans structure ontologique.
D'une telle notion de nature ne peut découler que celle de droits naturels illimités et d'une liberté naturelle également sans limites -. Pas plus aujourd'hui qu'hier, l'Eglise n'adhère A  une philosophie des droits de l'homme - droits illimités d'un AStre qui est A  lui-mASme sa loi -.
- Si l'on enlève en effet au Droit sa base constituée par la loi dine (naturelle ou positive), et par cela mASme immuable, il ne reste plus qu'A  la baser sur la loi de l'Etat comme sa norme suprASme; et voilA  fondé le principe de l'Etat absolu -. L'Etat absolu de Hegel avec sa variante marxiste ressuscite sous le signe de l'évolution, l'absolutisme des empires païens : - Sur le fondement naturel de sa relation A  l'absolu, la liberté, sans la grace de Dieu ne peut batir que son propre esclavage : celui de l'indidualisme jusqu'A  la folie de Nietzsche, celui du collectisme jusqu'A  l'aliénation totalitaire -.
La loi naturelle est par définition soumise A  la loi dine. Elle en est néanmoins distincte. Elle est A  la portée de tous les hommes de bonne volonté indépendamment de leur foi dès lors qu'ils admettent de coopérer au bien commun en respectant les valeurs humaines, la dignité et les droits de la personne. Cette relecture de la pensée de saint Thomas amenait Jacques Maritain A  préconiser une société politique qui - pourrait AStre appelée chrétienne, non dans ses apparences, mais dans sa substance -.
Le respect des droits de l'homme n'implique pas dans cette version l'adhésion A  une croyance en l'infaillibilité humaine. Toutes les - vérités - n'ont pas une égale valeur. En revanche, les personnes se voient reconnaitre une égale dignité que l'on doit respecter. L'homme a toujours le devoir de rechercher la vérité. Mais cette obligation d'amour présuppose la liberté71. Dès lors, on peut trouver une convergence entre la pensée chrétienne et la pensée du xiie. Le caractère abusivement absolu et indidualiste de la Déclaration de 1789 reposait sur un précieux enseignement de l'Eglise : le caractère inolable du sanctuaire personnel, ce fond de l'AStre où réside la liberté de l'acte de foi et la rencontre sacrée de l'homme avec Dieu. Jean-Paul II exprima ainsi cette filiation : - La sion chrétienne de l'homme a marqué de faA§on particulière la cilisation européenne. La conction de ce que l'homme a été créé A  l'image de Dieu et qu'il a été racheté par Jésus-Christ a solidement enraciné dans l'histoire du salut la conction de la dignité de la personne humaine, le respect du droit de la personne humaine au libre épanouissement de la solidarité avec les autres hommes. Il était donc logique que les droits de l'homme aient été formulés et proclamés d'abord en Occident. -
Toutefois, la reconnaissance d'un fait historique et de sa valeur, l'utilisation d'une terminologie n'impliquent pas une symbiose philosophique. Dans la sion chrétienne, les droits de l'homme ne constituent pas une fin en soi. Le Pape devait le rappeler en attirant l'attention sur le risque d'une dégénérescence des valeurs chrétiennes. L'homme de la société industrielle est A  cet égard semblable A  l'enfant prodigue qui ne sait pas user de sa liberté et qui croit qu' - on peut se passer de Dieu -, - la liberté a son prix -. Tous les hommes libres devraient se poser cette question : - Avons-nous su, dans la liberté, préserver notre dignité? Liberté n'est pas synonyme de permissité -.

Le - ralliement - eurocommuniste. ' Cette dernière phrase, au moins, recueillerait sans doute l'accord des eurocommunistes. LA  encore, il faut parler de ralliement. La critique marxiste des droits bourgeois constitue une critique radicale des droits de l'homme au sens libéral. La pratique des démocraties populaires va encore plus loin dans cette négation. On trouve sans doute lA  l'explication des prises de position de plusieurs partis communistes d'Europe de l'Ouest dont les partis italien, esnol et franA§ais qualifiés d'eurocommunistes. Ces partis exprimèrent A  plusieurs reprises leur attachement aux libertés et aux droits proclamés dans les démocraties libérales sans pour autant renoncer A  une transformation de la société. Ainsi dans une déclaration publiée le 3 mars 1977 A  Madrid, les Partis communistes d'Esne, de France et d'Italie estiment que - la crise du système capitaliste appelle avec plus de force que jamais A  développer la démocratie et A  avancer vers le socialisme -. Mais ils entendent - agir pour la construction d'une société nouvelle dans la pluralité des forces politiques et sociales, dans le respect, la garantie et le développement de toutes les libertés collectives et indiduelles : liberté de pensée et d'expression, de presse, d'association et de réunion, de manifestation, de libre circulation des personnes A  l'intérieur de leur pays comme A  l'étranger, liberté syndicale, indépendance des syndicats et droit de grève, inolabilité de la e privée, respect du suffrage universel et possibilité d'alternance démocratique des majorités, libertés religieuses, liberté de la culture, liberté d'expression des différents courants et opinions philosophiques, culturels et artistiques. Cette volonté de réaliser le socialisme dans la démocratie et la liberté inspire les conceptions élaborées en toute indépendance par chacun des trois partis -.
D'autres déclarations allaient dans le mASme sens. Par ailleurs, chacun des partis eut l'occasion d'expliciter ses positions au national. Ainsi, dans le petit ouvrage Vivre libres et dans une proposition de loi constitutionnelle, le Parti communiste franA§ais présenta une déclaration des libertés. Il entendait lier démocratie politique et démocratie économique. Il proposait l'énoncé de droits nouveaux pour les travailleurs. Mais ce qui retint aussi et peut-AStre plus l'attention des observateurs, était la volonté clairement manifestée de reprendre A  son compte les droits et libertés classiques, - les libertés publiques existantes, dont la bourgeoisie s'octroie indûment la seule paternité - alors qu'elles - sont les fruits de la lutte des travailleurs, du peuple -. Les communistes se présentent comme - les héritiers du mouvement populaire et démocratique qui, depuis deux siècles, a permis d'étendre le champ des libertés dans notre pays. Leur attachement A  ces libertés est une garantie fondamentale pour leur essor -.
Certains droits proclamés prennent alors un relief particulier. L'interdiction de bannir un citoyen franA§ais ou de le priver de sa liberté (art. 4), la reconnaissance très ferme des libertés de conscience, de religion et des cultes (art. 12), la consécration de la propriété privée (art. 46-48), l'admission du libre choix du médecin (art. 36) ne correspondent guère A  des libertés nouvelles pour des FranA§ais. En revanche, elles impliquaient que le Parti communiste franA§ais entendit implicitement se démarquer nettement de l'Union soétique où se produisait précisément la olation de telles libertés. Au-delA  mASme d'une possible querelle sur la sincérité des dirigeants communistes, on doit constater les faits. Un tel ralliement aux principes des démocraties libérales s'explique au moins par la très large adhésion de Pélectorat communiste A  de tels principes.
Pour la première fois dans l'histoire franA§aise, les droits de l'homme ont cessé d'AStre un symbole de dision pour constituer un trait d'union. Cependant, le consensus ne doit pas faire illusion. L'unanimité se réalise lorsqu'il s'agit de construire une théorie générale des libertés publiques, c'est-A -dire sur le principe mASme consistant A  formuler et A  garantir juridiquement les libertés. Elle se maintient tant que l'on énonce les droits fondamentaux - classiques -, ceux qui nous semblent intimement liés A  notre cilisation et A  sa conception de l'homme. Elle disparait dès qu'il est question de définir les droits économiques ou d'ajouter les droits - nouveaux -. Elle est fragile lorsqu'il conent de leur fixer des limites. Chaque composante de la nation se réfère plus ou moins consciemment A  sa propre philosophie. La théorie générale des libertés ne fournit aucune solution de fond, mais seulement, et c'est lA  son rôle, un cadre juridique.



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