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DROIT

Le droit est l'ensemble des règles générales et abstraites indiquant ce qui doit être fait dans un cas donné, édictées ou reconnues par un organe officiel, régissant l'organisation et le déroulement des relations sociales et dont le respect est en principe assuré par des moyens de contrainte organisés par l'État.


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CicÉron

LA LOI NATURELLE EST LA DROITE RAISON
Cicéron Des lois, trad. C. Appuhn, 1965, GF-Flammarion, p. 127-l28.

Si l'on considère les relations des hommes entre eux, indépendamment des institutions auxquelles ils appartiennent, on peut penser qu'ils ne sont pas dégagés de tout devoir ni de toute loi. L'examen rationnel de la nature humaine et de cet état de nature permet de formuler des prescriptions réglant les rapports entre individus. Ne sont-ils pas, par exemple, tenus de chercher la paix le plus qu'il est possible et d'éviter de nuire à leur voisin ? Ces commandements issus de la raison constituent la loi naturelle. Les sophistes grecs qui opposent la nature à la convention nient purement l'existence d'une telle loi précédant les conventions, alors qu'Ariscote affirme qu'il y a une « loi commune » à tous les hommes, portant sur le juste et l'injuste selon la nature, « que tout le monde reconnait par une espèce de divination, lors même qu'il n'y a aucune communication, ni convention mutuelle » (Rhétorique, I, 13, trad. CE. Ruelle, Le Livre de Poche, 1991). Thomas d'Aquin fait de la loi naturelle la participation de la loi éternelle dans la créature raisonnable (Somme théologique, q. 91, art. 2) ; pour Locke, la connaissance des commandements divins par une voie naturelle, ou non révélée (Essai philosophique, II, xxvifl, § 8, trad. Coste, Vrin, 1994). Le réductionnisme de Hobbes pose un contenu seulement négatif et défensif de ces lois, « Ne fais pas à autrui », dicté par la seule poursuite de la conservation de soi. Certains incluent au contraire dans ces lois naturelles la sociabilité (Cicéron, Pufen-dorf, Locke).
Quelques auteurs ont critiqué dans cette loi non le contenu, mais la force de contrainte nulle qu'elle a sur nos comportements. Quand elle n'est pas inexistante à l'état de nature, faute de lumières (Rousseau, second Discours), la loi naturelle est insuffisante pour nous faire agir à l'état crvil. C'est pourquoi il faut assortir ses commandements d'une force sans laquelle elle resterait lettre morte. Avec la loi naturelle, le droit est fondé dans la nature. D'où le début du texte : on ne cherche pas la vraie science du droit dans le droit civil, ni dans la jurisprudence, mais aux sources de la philosophie. Cette problématique, aux antipodes du positivisme, conduit à questionner les rapports qu'entretiennent la loi naturelle et les lois civiles. Ces dernières réalisent en général la loi naturelle, soit qu'elles la spécifient dans ce qu'elle laisse indéterminé (Pu-fendorf, Devoirs de l'homme, II, XII, § 6), soit qu'elles en reçoivent simplement une borne (la considération du droit naturel conduit Rousseau à refuser comme invalide le droit d'esclavage, car une propriété naturelle, donc inaliénable, de l'homme est d'être libre). La loi naturelle n'est pas promulguée, mais découverte par la raison. Elle est identifiée à cette dernière chez Cicéron. C'est pourquoi elle n'est pas datée, mais éternelle, universelle. Il faut néanmoins un développement suffisant de la raison pour y parvenir.
Les divergences principales interviennent à ce niveau : à propos de la nature et du contenu de la loi naturelle. Pour ce qui est de sa nature, certains la considèrent comme une connaissance rationnelle de ce qu'il convient de faire, sans mention d'une volonté hiérarchiquement supérieure. Dans ce camp se range Cicéron. D'autres au contraire insistent pour que ne puisse être appelé « loi » ce qui n'a pas de force contraignante. Pour Pufen-dorf, Dieu est l'auteur de la loi naturelle. Or, il oblige en tant que volonté supérieure (ibid., I, III, § X), et non en tant que raison. La raison seule ne fait pas loi, elle est simple règle de prudence.
Quant au contenu de la loi naturelle, il est identifié par les stoïciens, auxquels appartient Cicéron, à la raison elle-même (recta ratio, ou logos qui régit l'univers). La nature est gouvernée par un ordre rationnel, le logos de Jupiter. Cet ordre est objectif et la loi naturelle ne fait que le reconnaitre. La raison humaine n'est pas une faculté, mais la possession de notions objectives pour les stoïciens. Hobbes et Locke feront de la raison la capacité qui découvre ou « calcule » la loi naturelle et ne s'identifie pas à elle. Pour Thomas d'Aquin, la loi naturelle ne peut dériver de la seule raison abstraite, mais doit aussi se référer toujours aux êtres naturels et à leur fin, qu'elle examine. Or, chez Cicéron, la connaissance de la nature humaine reste générale. Il déduit ensuite a priori la société que forment les hommes et les dieux du fait de leur commune possession de la raison. Hommes et dieux respectent donc un droit commun, et sont soumis à un même ordre (p. 130). De même pour la société humaine fondée sur la nature rationnelle commune aux hommes. Celle-ci crée entre eux un droit et une loi, une amitié et un devoir d'entraide (p. 134).

Atticus. — Ce n'est donc ni dans l'édit du préteur, comme la plupart le font aujourd'hui, ni dans les Douze Tables comme nos anciens, mais aux sources les plus profondes de la philosophie qu'il faut puiser les vraies sources du droit.
Marais. — Oui, car tu ne me demandes pas, dans cet entretien, Pomponius, de quelles formules il faut avoir soin d'user quand on engage une instance, ou comment il faut interpréter la loi dans un cas embarrassant. C'est à la vérité une chose importante ; jadis bien des personnages célèbres en ont fait leur occupation et aujourd'hui l'homme qui à lui seul les remplace jouit d'une autorité égale à son haut savoir. Mais notre discussion doit comprendre tout le droit dans son universalité et les lois ; ainsi ce que nous appelons le droit civil ne peut occuper qu'une place réduite et étroite dans le droit considéré selon sa nature. Car c'est la nature du droit que nous voulons exposer, et c'est à la nature de l'homme qu'il faut la demander. Nous avons à considérer les lois qui doivent régir les cités, puis à traiter des institutions et des règles qui constituent la législation propre à chaque peuple, ce qu'on appelle le droit civil ; nous ne méconnaitrons pas, quand nous en serons là, notre propre nation.
Quintus. — C'est bien là, mon frère, remonter à la source comme il convient et au chapitre initial du droit. Ceux qui font autrement, dans l'enseignement du droit civil, suivent une méthode bonne à former des chicaneurs plutôt que des hommes soucieux de la justice.
Marcus. — Non, Quintus ; c'est l'ignorance, non la connaissance du droit, qui porte à la chicane. Mais nous en reparlerons plus tard. Pour le moment voyons les principes du droit. De savants hommes ont jugé à propos de prendre pour point de départ la loi : ont-ils eu raison ? Oui si, comme ils le posent en principe, la loi est la raison suprême, gravée en notre nature, qui prescrit ce que l'on doit faire et interdit ce qu'il faut éviter de faire. Cette même raison solidement élie dans l'ame humaine avec ses conséquences est la loi. Ainsi, à ce qu'ils pensent, la bonne direction de la conduite est une loi, dont la force propre est de prescrire des actions droites et d'interdire les écarts. De là aussi, suivant eux, que les Grecs la désignent par un mot signifiant à chacun le sien. Pour moi je dérive le nom de lex de legendo. Pour eux, la loi c'est l'équité, pour nous, c'est le choix ; l'un et l'autre caractères appartiennent à la loi. Si cette définition est juste ainsi qu'elle me le parait, c'est de la loi qu'il faut partir pour parler du droit. La loi en effet est la force de la nature, elle est l'esprit, le principe directeur de l'homme qui vit droite-ment, la règle du juste et de l'injuste. Comme tous nos discours ont trait aux règles de vie populaire, il sera nécessaire parfois de parler le langage populaire et d'appeler loi, comme le fait le lgaire, la règle écrite à laquelle des commandements ou des défenses donnent un caractère impératif. Mais, pour élir le droit, partons de cette loi suprême qui, antérieure à tous les temps, a précédé toute loi écrite et la constitution de toute cité.



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