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ECONOMIE

L'économie, ou l'activité économique (du grec ancien οἰκονομία / oikonomía : « administration d'un foyer », créé à partir de οἶκος / oîkos : « maison », dans le sens de patrimoine et νόμος / nómos : « loi, coutume ») est l'activité humaine qui consiste en la production, la distribution, l'échange et la consommation de biens et de services. L'économie au sens moderne du terme commence à s'imposer à partir des mercantilistes et développe à partir d'Adam Smith un important corpus analytique qui est généralement scindé en deux grandes branches : la microéconomie ou étude des comportements individuels et la macroéconomie qui émerge dans l'entre-deux-guerres. De nos jours l'économie applique ce corpus à l'analyse et à la gestion de nombreuses organisations humaines (puissance publique, entreprises privées, coopératives etc.) et de certains domaines : international, finance, développement des pays, environnement, marché du travail, culture, agriculture, etc.


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Pratique des études

Jusqu'ici, les analystes ont probablement davantage contribue A  mettre en évidence la complexité des problèmes et des choix qu'A  faciliter les décisions.


A. Rivun.


Les études d'aide A  la décision, qui rassemblent en un cadre cohérent et rationnel les informations brutes jugées pertinentes pour un choix, constituent en fait un genre hybride, constamment tiraillé entre des justifications théoriques et des impératifs opérationnels. Leur processus d'élaboration s'astreint A  gérer, A  travers une suite d'étapes ponctuées d'options successives, la difficile confrontation entre une offre relativement spécialisée des cellules d'études et une demande usuellement floue des décideurs. Au service d'un ou de plusieurs acteurs engagés dans des processus concrets de décision ou de négociation, les études jouent aussi bien un rôle d'éclairage des choix d'un décideur, de persuasion face A  son environnement que de communication collective. Leur influence informationnelle ou décisionnelle est plus sensible dans certains créneaux ou A  certains niveaux de décision, et leur intégration dans des procédures de décision institutionnalisées soulève de délicats problèmes déontologiques.


Typologie des études.


Les études économiques, caractérisées par l'utilisation de méthodologies et de représentations théoriques pour l'analyse de situations et de problèmes concrets, constituent un champ aux contours mal définis et se distinguent difficilement de genres isins. Elles se démarquent certes des recherches économiques par leurs préoccupations opératoires, des études techniques par leur dimension socio-économique, des rapports administratifs en dépassant la simple synthèse des jugements d'acteurs. Mais elles n'en forment pas moins un ensemble hétérogène sur lequel il est difficile de porter un jugement global en l'absence de - banque d'études - qui les rassemblerait ou mASme de - catalogue d'études - suffisamment précis et exhaustif. Elles peuvent néanmoins AStre discriminées en fonction de la décision qu'elles éclairent et de leur position par rapport A  cette décision, de leur méthodologie et problématique, et de leur mode d'élaboration et de diffusion.
Les études concernent des décisions se situant A  divers niveaux d'intervention (variantes de projets, projets, politiques sectorielles, politiques macro-économiques) et A  différents horizons (études conjoncturelles, de programmation, de prospective). Ces décisions sont également caractérisées par leur secteur d'application (énergie, transports, environnement, défense) et leur type (investissement, production, financement, tarification, réglementation, communication, organisation interne). Les études se situent en amont ou en aval de la décision analysée (études ex ante ou ex posi), ire accomnent l'action dans son déroulement par un apprentissage conjoint des acteurs et des analystes. Mais, en pratique, toute étude ex ante procède A  un diagnostic de la situation initiale résultant des actions passées, et toute étude ex posl considère les effets potentiels non encore apparus de l'action examinée et e les effets réalisés aux effets virtuels d'une action de référence.
Les études peuvent AStre strictement cantonnées au domaine économique ou faire appel A  des disciplines complémentaires, souvent plus qualitatives (définition technique ou juridique des actions, analyse psychosociologique de leurs effets, évaluation organisationnelle de leur application). Elles peuvent se contenter d'examiner certains effets privilégiés ou chercher A  - balayer assez large -, en particulier en examinant les effets des actions non seulement sur le système socio-économique, mais sur le système décisionnel lui-mASme. Elles peuvent adopter une méthodologie relativement monolithique (études coûts-avantages visant un optimum collectif) ou plus ouverte (étude multi-critères ou multi-acteurs visant une solution de compromis), ire se contenter de définir des effets anticipés ou réalisés sans les évaluer. Enfin, elles peuvent AStre très légères en se limitant A  rassembler quelques informations directement disponibles, ou beaucoup plus lourdes en s'efforA§ant de synthétiser toutes les informations existantes tout en en engendrant de nouvelles.
Les études sont demandées par un décideur particulier jouant le rôle de maitre d'ouvrage, que ce soit une administration, une entreprise publique monopolistique ou concurrentielle, une entreprise privée ou une association professionnelle. Elles sont réalisées par un organisme jouant le rôle de maitre d'ouvre et qui est plus ou moins indépendant du décideur, des cellules d'études administratives aux bureaux d'études privés, en passant par les organismes universitaires et associatifs. En fait, un décideur peut commander des études parallèles A  plusieurs organismes plus ou moins spécialisés, et un organisme peut proposer une étude A  plusieurs décideurs, ire A  un décideur indéfini ou A  l'opinion publique. Les études sont enfin exécutées au coup par coup en fonction des besoins, s'insèrent dans le cadre de procédures fixant leurs moyens et les relations analystes-décideurs (études prioritaires de RCB), ou sont mASme soumises A  des impératifs juridiques (études d'impact).

élution des études.

Aux alentours de la Seconde Guerre mondiale, les seules vériles études économiques, s'appuyant déjA  sur un ratio rendement/coût, ont concerné l'aménagement des grands bassins fluviaux (Tennessee, Mékong) et la définition de systèmes d'armement. Dans les années soixante, pour ce qui concerne les PVD, des études d'une stricte orthodoxie micro-économique se développent sous l'impulsion d'universitaires se mettant au service d'organisations internationales (ONU, OCDE, Banque mondiale) et demeurent actives aujourd'hui malgré de vigoureuses contestations. Dans le mASme temps, dans les pays développés, le calcul économique connait, dans le sillage de la Recherche Opérationnelle, un engouement certain, traduit en particulier aux états-Unis par l'apparition de think tanks (Rand Corporation) et le lancement du PPBS (ning, Programming, Budgeting System), mASme si le mouvement s'est rapidement essoufflé au profit d'une analyse plus positive des politiques. En France, une élution parallèle en trois phases, passant d'évaluations lourdes formalisées et monorationnelles A  un spectre plus large d'études légères, qualitatives et mul-tirationnelles, peut AStre considérée (Lesourne, 1978 ; Poutrel, 1980; Poinsard-Walliser, 1982).
La phase d'émergence (1960-68) se situe dans un contexte de forte croissance économique, où une demande clairement exprimée et fortement consensuelle fait apparaitre de larges zones de renilité des projets publics, disséminés (routes) ou concentrés (RER, Concorde). Les méthodes d'évaluation sont introduites sous l'impulsion d'ingénieurs-économistes de l'Administration et des grandes entreprises publiques, traduites sous forme de méthodologies standard (modèle d'investissement d'EDF, Circulaire des routes) et testées par des études pilotes (sécurité routière, périnatalité). Procurant A  leurs promoteurs un avantage concurrentiel dans les négociations budgétaires et financières, ces études sont prises en charge par des services anciens aux compétences élargies (INSEE, , EDF) ou des services nouveaux plutôt centralisés (CPE, SAEI, Prévision). Cette phase s'achève par le lancement de l'opération RCB (Rationalisation des Choix Budgétaires), qui met en place une structure d'organisation interministérielle des études, articulées aux autres instruments d'éclairage des choix (budgets de programmes, modernisation de la gestion) dans un processus bouclé (observation -> étude -> décision -> contrôle).
La phase d'expansion (1968-l975) se déroule dans un climat de croissance encore soutenue, mais avec une demande de services publics plus floue et diversifiée, et une conscience plus vive des effets externes et des aspects qualitatifs des projets. Tandis que la RCB se développe de faA§on pragmatique en s'appuyant massivement sur des actions de formation aux méthodes et de diffusion d'expériences, le milieu des ingénieurs-économistes est relayé par des fonctionnaires de filières non techniques et de nombreux contractuels. Les calculs économiques s'étendent progressivement des secteurs traditionnels (énergie, transports, défense) vers d'autres, marchands (agriculture, télécommunications, industrie) ou non (environnement, santé, éducation), suscitant de nouvelles cellules d'études dont l'ensemble forme désormais un réseau très interdépendant. Le bilan des travaux réalisés est considérable quant au développement des systèmes d'information et A  la diffusion d'un langage de concertation, mASme si les retombées décisionnelles restent limitées, les conflits administratifs se précisent et l'avantage concurrentiel s'émousse.
La phase d'éclatement (1975-84) correspond A  une situation de crise caractérisée par des déséquilibres macro-économiques majeurs, alors mASme que la demande sociale devient fluctuante et contradictoire, et que la renilité de nombreux projets est mise en cause. Si se manifeste un intérASt accru pour les études ex post ou les problèmes de tarification, on observe un reflux des études lourdes vers les secteurs traditionnels, les autres privilégiant nettement les études légères et ciblées aux dépens des travaux de fond. Les cellules d'études s'orientent vers des - cellules de prospective et d'évaluation -, directement rattachées aux responsables politiques et développant des visions stratégiques, ou vers des - cellules d'analyse économique -, intégrées A  des directions A  compétence plus technique et réalisant des travaux plus opérationnels. Au total, les études entrent dans des zones de rendements décroissants, se diversifient très fortement, perdent leur technicité et ont un impact décisionnel diffus, mais leur accumulation n'en produit pas moins une imprégnation culturelle assez profonde du tissu administratif.


Offre et demande d'études.


L'offre d'études est exprimée par des bureaux d'études très divers quant A  leur composition (effectifs, profils, taux de rotation), leur statut (localisation fonctionnelle, dépendance hiérarchique aux décideurs), leurs moyens (moyens matériels, accès A  l'information), leurs méthodes (orientation théorique ou appliquée, pluridisciplinarité) et leurs produits (études plus ou moins lourdes, plus ou moins spécialisées). La demande d'études est exprimée par des décideurs également diversifiés quant A  leur statut (public ou privé), leur organisation (individu ou organisme), leur profil (technique ou administratif), leur niveau de décision (stratégique ou opérationnel) et leur pouir de décision (concentré ou partagé avec d'autres). En matière de décisions collectives, A  une offre hétérogène, mais A  forte composante administrative, répond une demande également concentrée sur l'Administration aux dépens des responsables politiques, du Parlement, des médias ou du public, avec un risque indéniable d'auto-stimulation (étude ex anté) ou d'auto-évaluation (étude ex post) de la part de ces administrations.
Les termes utilisés ne doivent cependant pas masquer le fait que la confrontation entre offre et demande d'études est bien plus complexe que pour un bien ordinaire, les rôles respectifs de l'analyste et du décideur ayant donné lieu A  diverses aisons. L'image culinaire (Leontief) it dans l'analyste un cuisinier susceptible de préparer différents plats (propositions de décision) et de les présenter sous forme de sectiune au décideur-gastronome, avec les prix (effets des décisions) correspondants. L'image médicale it dans l'analyste un médecin ou mASme un psychanalyste, qui procède A  un diagnostic du problème du décideur-patient et prescrit des remèdes (décisions analysées) pour diminuer son angoisse. L'image juridique (GRETU) it dans l'analyste un acat, qui fournit et met en forme les informations et les arguments dont a besoin le décideur-plaignant pour défendre sa cause dans un procès (processus de décision) où il est impliqué.
Ces aisons mettent en relief l'opposition entre deux formes de rationalité, la rationalité - économique - de l'analyste et la rationalité - professionnelle - du décideur, que celle-ci soit de nature technique (pédagogue, médecin) ou politique (gestionnaire). L'expert veut démontrer par une évaluation objective et systématique fondée sur un sair théorique et des données quantifiables, le décideur veut se forger une conviction par une évaluation subjective et souvent brève, fondée sur une expérience vécue et des informations personnelles (ir I, 7). Plus profondément, si le décideur joue un rôle passif d'agent modélisé par l'analyste, l'analyste joue inversement le rôle de pur exécutant du décideur, si bien que l'analyste doit veiller A  s'assurer le soutien du décideur tout en conservant son autonomie de pensée. Enfin, il n'est pas rare de ir un individu passer d'un rôle A  l'autre, soit que le bureau d'études lui serve d'observatoire et de tremplin pour un poste décisionnel, soit qu'il lui serve de refuge et de recyclage en cas de vents politiques contraires.
En fait, les études peuvent AStre incitatives et proposer au décideur des actions fondées sur une logique et des déterminants autonomes, ou bien AStre réflexives et chercher simplement A  révéler les hypothèses de choix du décideur et les traduire en actions. Une position intermédiaire consiste, pour l'expert, A  fournir les représentations des effets des actions et A  adopter les objectifs fournis par le décideur, les moyens mobilisables étant, quant A  eux, suggérés par l'un et l'autre. Cependant, si l'étude s'appuie sur les déterminants du décideur obtenus par interrogation ou révélation, elle ne lui est pas forcément d'un grand secours, car il ne lui est pas vraiment plus difficile de prendre directement sa décision. De plus, si le décideur fournit lui-mASme tous les éléments de la décision, les vertus anti-anxiété de l'étude se trouvent très affaiblies, les nombreuses réserves de l'étude pouvant mASme jeter un doute supplémentaire dans son esprit.

Gestion d'une étude.

L'initialisation de l'étude est attribuable A  deux facteurs complémentaires : la perception, par l'opinion, les décideurs ou les experts, d'un problème socio-économique durable, et le sentiment que la solution du problème peut AStre facilitée par une étude. Que les bureaux d'études soient internes ou externes aux organes de décision concernés, les études peuvent aussi bien AStre autogénérées par ces bureaux et proposées ensuite au décideur qu'AStre commandées de faA§on explicite par ce décideur. Dans ce dernier cas, elles peuvent faire l'objet d'une définition écrite, sous la forme par exemple d'une lettre de mission qui donne quelques justifications au choix du thème, indique quelques objectifs possibles et souhaités, donne quelques indications de démarche et précise les délais A  respecter. Un dispositif d'études, dont la durée de vie est souvent limitée A  l'étude, est mis en place, doté de moyens humains et financiers adéquats, d'un accès plus ou moins large A  l'information écrite et d'un contact plus ou moins direct avec les parties intéressées.
La conduite de l'étude se fait sous l'autorité d'un responsable technique ou administratif, souvent un chef de mission, qui assure l'animation et la coordination d'une équipe de permanents ou de collaborateurs occasionnels, spécialistes du secteur concerné ou des méthodes d'évaluation. Ce groupe de travail, parfois fractionné, sous-traite certaines parties de l'étude, agit de concert avec les bureaux d'études et les services techniques du domaine analysé, mais a des liens plus laches et informels avec ceux qui en sont les acteurs et les responsables. Les décideurs concernés, parfois réunis en un comité directeur, n'interviennent le plus souvent qu'A  certains temps forts, essentiellement le lancement de l'étude et la discussion du rapport, A  condition qu'ils n'aient pas changé entre ces deux dates. S'il arrive que des études se perdent dans les sables ou en restent A  des rapports provisoires, du fait de divergences entre commanditaires, la plupart de celles qui sont menées dans un cadre institutionnel débouchent néanmoins sur un rapport final.
L'exploitation de l'étude doit tenir compte de la dérive souvent considérable du produit final par rapport aux attentes initiales, du fait de l'élution des préoccupations des décideurs et de l'approfondissèment prioritaire des thèmes opposant une moindre résistance. Le rapport met généralement bien en exergue un diagnostic de la situation et des propositions opératoires, mais au détriment aussi bien des hypothèses permettant de justifier les conclusions que des limitations méthodologiques dans les raisonnements, par crainte de la faire déprécier. De plus, A  partir de la lumineuse documentation rassemblée, des résumés souvent succincts sont élis, qui gomment encore les réserves et les conditions de validité, et sélectionnent les informations et les arguments jugés pertinents. Enfin, la diffusion de l'étude, qui peut AStre objet de conflit entre analystes et décideurs, oscille entre l'étude publiée, servant de service collectif pour tous les groupes concernés, et l'étude confidentielle, A  la seule disposition de son commanditaire.
Les analystes font couramment grief aux décideurs de ne pas leur donner le temps et les moyens d'approfondir les problèmes et d'air un intérASt exclusif pour les résultats ; les décideurs estiment, en revanche, que les analystes adoptent une démarche lente et théorique, inadaptée A  la prise de décision, et que leurs résultats revAStent une forme trop ésotérique. Selon que le décideur prend ou non la décision qu'il préconise, l'analyste est tenté de louer sa clairyance ou de l'accuser d'AStre myope et de subir des influences néfastes ; inversement, selon que l'analyste lui propose ou non la décision qu'il attend, le décideur lui apportera un appui inconditionnel ou lui trouvera tous les maux. Pour parer A  ces incompréhensions, sont parfois mises en place des procédures de pilotage, dans lesquelles des acteurs-tampons s'efforcent, aux divers stades de l'étude, de faire exprimer par les analystes les difficultés méthodologiques qu'ils rencontrent et les moyens nécessaires pour les surmonter, et par les décideurs leurs motivations quant au problème et leurs attentes quant A  l'étude.


Rôles d'une étude.


Une étude apparait d'abord comme un outil de conception et d'évaluation, dont le rôle d'aiguillon peut aider un décideur individuel A  se forger une opinion sur une décision A  prendre ou A  modifier sa conviction sur une décision déjA  prise. Elle assure la cohérence des raisonnements en montrant que certaines conclusions ne sont compatibles qu'avec certaines hypothèses, en particulier que des actions et des objectifs peuvent n'AStre pas défendables simultanément ou que plusieurs objectifs ne sont pas atteignables conjointement. Elle fournit une grille d'analyse permettant de sérier les problèmes et les enjeux, de préciser les représentations et les finalités, et surtout de dépasser le cadre de réflexion spontané en révélant des modalités d'action méconnues ou des conséquences inattendues. Elle permet enfin de fournir des propositions d'action non invraisemblables et sert plus globalement de - filtre trichotomique -, qui élimine les solutions trop mauvaises ou douteuses, sélectionne des solutions acceples et laisse un marais nécessitant un examen plus approfondi.
Une étude apparait ensuite comme une source de proposition et de persuasion, qui peut servir d'arme A  un décideur spécifique dans une négociation collective, pour se positionner face A  une action, parallèlement A  d'autres moyens d'influence. Avant la décision, elle peut lui servir A  défendre l'action qu'il privilégie, mais qui est combattue par autrui (étude-plaidoyer), ou. inversement, A  empAScher une action qu'il juge nuisible, mais qui est mise en avant par autrui (étude-torpille). Après la décision, elle peut servir A  justifier l'action retenue face aux critiques d'autres décideurs ou de l'opinion (étude-bouclier), ou A  se désolidariser de l'action sélectionnée jugée préjudiciable ou impopulaire (étude-parapluie). Pour Kornaï (1978), les études sont suffisamment malléables, et, - quand un choix est arrASté, un économiste adroit peut toujours mener le calcul économique de faA§on qu'il démontre que le terme choisi de l'alternative est plus avantageux que les autres qui doivent AStre rejetés -.
Une étude apparait enfin comme un langage d'exposition et de communication dont la fonction de catalyseur permet, dans un processus de choix collectif, de mieux cerner les zones d'accord et de conflit, et de fariser la recherche d'un éventuel compromis. Cette faculté peut conférer A  un acteur ayant réalisé une étude le droit de participer A  la négociation (étude-passeport), mais conduit aussi A  remplacer la participation légitime d'un acteur par une étude, comme en témoignent les études d'impact (étude-substitut). L'étude peut dès lors aider A  accélérer la délibération entre acteurs en épurant et en canalisant leurs discours (étude-médiation), mais peut aussi, en cas d'incertitude et de conflit entre acteurs, servir de paravent et d'excuse A  l'inaction (étude-alibi). Par la rigueur qu'apportent les principes du calcul économique, l'étude définit un cadre quasi juridique de dialogue, qui permet essentiellement de faire remonter la discussion des moyens A  mettre en ouvre aux déterminants qui les justifient.
Ces rôles de l'étude sont parfaitement illustrés par l'existence d'études concurrentes concernant une mASme décision qui, si elles aboutissent A  des conclusions divergentes, permettent de les attribuer aux hypothèses de choix différentes qu'elles prennent en compte. Deux études concernant le développement de l'axe de transport Paris-Sud-Est concluaient l'une A  la construction du TGV (SNCF), l'autre au renforcement de la ie aérienne (Air Inter). cette divergence s'cxpli-quant par des prévisions de trafic fort différentes. Deux études concernant la rocade autoroutière A 86 A  l'ouest de Paris concluaient l'une A  la traversée d'une forASt (équipement), l'autre A  un passage en souterrain (Agriculture), la divergence provenant ici d'estimations très différentes de la valeur du temps des usagers. L'exemple plus récent d'études menées en ordre dispersé sur la liaison trans-Manche montre l'absolue nécessité d'hypothèses normalisées sur la situation de référence, les prévisions de trafic et les critères de décision, pour permettre de er efficacement les projets.

Insertion des études.

L'impact informationnel des études sur les milieux concernés ou le public est toujours lent et sélectif, soit de droit, parce que les demandeurs limitent une diffusion qui pourrait nuire A  eux-mASmes ou A  autrui, soit de fait, parce qu'elles donnent lieu A  peu de publicité ou apparaissent d'emblée comme trop ésotériques. En ce qui concerne les études administratives, seul un petit nombre est publié, beaucoup ont une diffusion purement interne, d'autres restent strictement confidentielles et certaines sont mASme censées n'air jamais existé ; incidemment, la possibilité de se les faire communiquer, en vertu de la loi sur la diffusion des documents administratifs, n'est guère utilisée. Il est vrai que des études, en particulier des études ex post qui émettent des jugements assez catégoriques sur une politique passée, peuvent justifier d'une diffusion restreinte : mais il est toujours loisible de préir deux niveaux de diffusion, les informations de base mises en perspective étant communiquées au public, alors que les jugements d'ensemble restent confidentiels.
Quoi qu'il en soit, lorsqu'une étude entre dans le domaine public, elle finit par s'imposer, et tous les acteurs doivent se positionner par rapport A  elle, pour l'endosser ou la réfuter, dans son ensemble ou ses détails. En effet, elle développe une rationalité autonome qui diffère de celle de chacun des acteurs, qu'elle soit en contradiction avec leurs principes généraux de raisonnement et d'évaluation, ou qu'elle soit en désaccord avec certaines des possibilités, croyances ou valeurs qu'ils mettent en avant. Le commanditaire de l'étude est souvent enclin A  la dépecer pour y récupérer des informations, des raisonnements et des argumentations qu'il réincorpore ensuite dans sa propre logique de décision. Les autres acteurs, a priori encore plus éloignés de la problématique de l'étude, nt néanmoins y picorer pour en extraire des éléments qui leur sont utiles, tout en pouvant contester son message global ou certaines de ses affirmations.
Quant A  l'impact décisionnel des études, il oscille dans une zone assez étroite, A  égale distance d'un scientisme naïf, qui imagine que toute étude est automatiquement endossée par les décideurs et traduite fidèlement en actes, et d'un scepticisme radical, qui estime que toute étude est systématiquement reniée et immanquablement reléguée dans un tiroir. Il est indéniable que nombre de décisions sont prises sans études préalables autres que techniques (choix de Concorde par de Gaulle pour soutenir une politique de prestige) ou en contradiction avec les conclusions majoritaires des études (choix du barrage d'Assouan par Nasser, malgré les risques écologiques dûment reconnus). Mais on ne saurait en conclure que les économistes ne sont lA  que pour le décor, car, mASme si elles ne constituent qu'un argumentaire parmi d'autres, des études peuvent infléchir une décision (choix du TGV Paris-Sud-Est) si elles sont assez riches pour ne pas heurter les représentations spontanées et réalisées assez tôt pour pouir AStre prises en compte.
Ainsi, les études ex ante s'avèrent d'autant plus influentes qu'elles se situent A  des niveaux de décision moyens, où les préoccupations politiques ne sont pas encore dominantes, mais qui néanmoins dépassent de simples choix technico-économiques. Elles n'interviennent avec profit qu'en aval des grandes orientations stratégiques de l'administration ou de l'entreprise, et ne sont généralement pas en mesure de procéder A  de vériles arbitrages entre secteurs d'activités différents. Mais elles ne sont pas pour autant fatalement reléguées vers les décisions secondaires auxquelles on tend A  les circonscrire, qu'il s'agisse du choix de variantes mineures d'un projet ou de la date optimale de sa réalisation. Elles deviennent pleinement opératoires dans des créneaux privilégiés de décision, où les actions sont répétitives et plutôt matérielles, les effets isolables et pas trop nombreux, les objectifs clairs et réductibles A  un étalon commun (tronA§ons de routes, centrales électriques).


études et procédures.


Des études sont parfois institutionnalisées au sein mASme d'un organisme, avec pour fonction moins de décentraliser la décision, A  l'aide de - valeurs - normatives, que de décentraliser l'instruction des décisions, en faisant remonter l'information. Imposée aux services extérieurs de l'équipement, la Circulaire des routes préconise un calcul économique standard pour les projets routiers, ce qui valorise le centre en accentuant son image de rationalité, et la périphérie en lui faisant croire A  un réel pouir de décision (Sireyjol, 1986). Des études sont également exigées d'un organisme par sa tutelle administrative ou financière, leur fonction étant alors de défendre les projets du premier en prenant en compte les préoccupations de la seconde. Mais, si les dossiers d'investissement présentés par les entreprises publiques franA§aises aux Finances, dans le cadre du FDES, reflètent d'abord leur propre rationalité, ceux que présentent les pays en ie de développement A  la Banque mondiale reflètent prioritairement l'optique de cette dernière.
Des études peuvent air simultanément un rôle d'arbitrage interne et de négociation externe, si les rationalités de l'organisme et de sa tutelle se confondent. Ainsi, EDF adopte un calcul économique fondé sur un taux d'actualisation public pour justifier son enveloppe d'investissement face A  l'extérieur, mais aussi pour choisir entre types d'investissement au niveau interne. Des études peuvent enfin AStre articulées conceptuellement et/ou associées organiquement A  des procédures de décision autonomes A  différents niveaux, sans pour autant y jouer un rôle prédominant. Ainsi, la planification nationale peut s'appuyer sur des études partielles pour contribuer A  réaliser les multiples cohérences qu'elle recherche ; la procédure budgétaire a plus de mal A  exploiter des études qui visent classiquement les effets A  long terme des projets ; les dossiers d'aménagement importants sont, quant A  eux, soumis A  la présentation d'une étude d'impact, qui étudie spécifiquement les effets en matière d'environnement.
Les études soutiennent d'autant mieux les procédures de décision qu'elles développent une rationalité qui n'est pas trop étrangère A  ses acteurs, et agissent aussi bien par une sensibilisation culturelle lente A  un mode de pensée que par une information précise sur des choix. Le calcul économique classique, fondé sur le mythe de la transparence, de l'objectivité, de la rationalité et du consensus, a certes réussi A  faire passer un message minimal dans des milieux assez étendus, mais il apparait néanmoins comme de plus en plus décalé ; s'il est toujours vécu par certains comme une foi, d'autres ont perdu cette foi. et beaucoup ne l'ont jamais eue. Aussi faut-il poursuivre, malgré le risque d'une perte de substance théorique, les développements déjA  existants vers des méthodologies d'aide A  la décision mieux adaptées aux procédures concrètes, dans la mesure où elles prennent mieux en compte la multiplicité des acteurs et l'incertitude des situations rencontrées, les mécanismes de décision observés (décisions progressivement engagées, - incrémentalisme -) et les rationalités non orthodoxes (critères conflictuels, salisficing).
Les études soulèvent enfin des problèmes déontologiques aussi bien quant A  leur contenu, dont les hypothèses doivent AStre suffisamment explicitées, qu'A  leur élaboration, qui suppose que les parties prenantes disposent de moyens ables. Pour les études ex ante, le GRETU (1980) a proposé de créer une Académie se prononA§ant sur la qualité des études, un Institut mettant les moyens d'études au service des organismes qui en manquent, et une Agence facilitant le dialogue entre analystes et décideurs. Pour les études expost, le (1986) préconise deux normes, A  sair que toute évaluation doit AStre conduite suivant un protocole qui la rende reproductible par d'autres, et que l'évaluation doit AStre indépendante des agents responsables de la formulation et de l'exécution de la politique analysée. Sans aller jusque-lA  et sans former un corps aussi institutionnalisé que les médecins ou les acats, les analystes sécrètent et suivent néanmoins quelques règles déontologiques concernant le contrôle mutuel de leurs travaux, la protection par rapport au pouir et le respect d'un certain secret professionnel.




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