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ECONOMIE

L'économie, ou l'activité économique (du grec ancien οἰκονομία / oikonomía : « administration d'un foyer », créé à partir de οἶκος / oîkos : « maison », dans le sens de patrimoine et νόμος / nómos : « loi, coutume ») est l'activité humaine qui consiste en la production, la distribution, l'échange et la consommation de biens et de services. L'économie au sens moderne du terme commence à s'imposer à partir des mercantilistes et développe à partir d'Adam Smith un important corpus analytique qui est généralement scindé en deux grandes branches : la microéconomie ou étude des comportements individuels et la macroéconomie qui émerge dans l'entre-deux-guerres. De nos jours l'économie applique ce corpus à l'analyse et à la gestion de nombreuses organisations humaines (puissance publique, entreprises privées, coopératives etc.) et de certains domaines : international, finance, développement des pays, environnement, marché du travail, culture, agriculture, etc.


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La critique fichtéenne de la métaphysique et la fondation du droit naturel

La critique fichtéenne de la métaphysique et la fondation du droit naturel
La compréhension de la première Doctrine de la science se heurte, tous les commentateurs l'ont noté, A  des difficultés quasiment insurmonles. La plus édente ' mais il en est bien d'autres ' ent tout simplement du fait que le lecteur, mASme averti des problématiques débattues par les philosophes allemands de la période, ne parent pas A  saisir l'objet mASme dont Fichte nous entretient dans les trois premiers paragraphes de son livre. On y trouve exposés, dans un langage qui imite souvent par son formalisme celui des mathématiques, trois principes dont la signification et l'intérASt philosophique sont si peu manifestes qu'ils sont restés pendant près de deux siècles1 aussi inintelligibles aux historiens de la philosophie qu'ils le furent aux yeux des contemporains de Fichte.


Voici ces principes :

1) - Moi = Moi - (généralement interprété, A  tort, comme saisie véridique d'un Moi absolu contenant toute réalité).
2) - Moi # Non-Moi - (position du monde, de l'objet en soi).
3) - J'oppose dans le Moi un Non-Moi disible au Moi disible - (tentative d'accorder le sujet et l'objet au sein du Moi absolu pensé métaphysiquement comme substrat de cette dision).
Que le lecteur non philosophe se rassure : je n'entreprendrai pas de donner ici un commentaire - technique - de ces trois propositions ; je voudrais tout simplement montrer comment, au-delA  de leur sécheresse spéculative, elles mettent en place une problématique qui, malgré les apparences, rejoint directement notre propos (rechercher les conditions de possibilité d'une philosophie du droit naturel A  la fois moderne, i.e. maintenant les idées de raison et de liberté de la volonté, et cependant foncièrement anti-histo-ricisté). Il s'agit en effet pour Fichte d'opérer une critique philosophique des deux faA§ons possibles de nier, au niveau spéculatif, l'existence mASme d'un droit naturel (idéal) distinct du droit positif (réel), donc, si l'on veut, des deux formes possibles d'historicisme radical.
Nous avons vu en effet dans ce qui précède, et sur ce point l'argumentation de Strauss est irréprochable, comment la métaphysique rationaliste, en affirmant l'identité du rationnel et du réel, en venait A  supprimer la possibilité mASme de la philosophie politique. Or, selon Fichte, il existe deux manières de produire philosophiquement une telle identité :
' l'une, idéaliste, part du sujet et tente de montrer comment l'objet, le réel, non seulement n'existe pas hors de la représentation (cf. Berkeley), mais est en outre pleinement conforme, identique, aux principes logiques (ontologiques) de la subjectité, et notamment bien sûr au principe de raison (Leibniz);
' l'autre, réaliste, part au contraire de l'objet en soi pour montrer que la représentation du sujet n'est qu'un reflet de cet en-soi, que les pensées ne sont que des effets causés par une réalité extérieure (Spinoza).
Dans ces deux philosophies, on le voit, ce que Strauss ' et Fichte eût assurément été en accord avec lui sur ce point ' considérait comme la condition de possibilité ultime du droit naturel, est supprimé, puisque, dans l'idéalisme, le réel se réduit A  l'idéal, et, dans le réalisme, l'idéal se réduit au réel.
Malgré l'apparence, donc, nous sommes bien, dès le début de la Doctrine de la science, au cour de notre question, puisque s'y met en place le projet, peut-AStre le plus radical au sein de la modernité, de saper jusqu'en leurs plus ultimes racines les fondements de l'historicisme rationaliste.
Il est par conséquent nécessaire, sans entrer inutilement dans le détail du texte de Fichte, d'indiquer brièvement la signification de ces trois premiers principes. Comme je l'ai déjA  suggéré, la principale difficulté A  laquelle se confronte immédiatement l'interprète tient au fait que cette signification n'est nullement explicitée par Fichte lui-mASme. La raison en est, ainsi que l'a minutieusement éli A. Philonenko : 1) que Fichte suppose parfaitement connue la Critique de la raison pure de Kant, et, notamment, la Dialectique transcendantale en laquelle Kant se livre A  une critique de la métaphysique dogmatique, et 2) que Fichte entreprend de reconstruire systématiquement cette dialectique transcendantale en adoptant une démarche inverse A  celle de Kant. Je tenterai donc de dégager le sens de cette reconstruction avant de revenir aux enjeux proprement existentiels de cette critique de l'historicisme.
En continuant d'adopter ici un point de vue très général1, on peut dire que la Critique de la raison pure procède selon une méthode naturelle en ce sens qu'elle s'élève du vrai au faux. Kant commence par affirmer, dans l'Esthétique transcendantale, la première vérité, la plus fondamentale : la finitude radicale du sujet, définie par le fait que sa capacité de connaitre est a priori - réceptive, - qu'elle est affectée d'une passité indépassable : pour qu'il y ait conscience, subjectité, il faut une donation d'existence. L'existence ne pourra donc jamais AStre déduite dialectiquement du concept (du sujet) comme étant son autre, car l'altérité est ici irréductible. L'Esthétique met ainsi en place la vérité qui fera de la métaphysique, comme argument ontologique (tentative de passage du sujet, du concept, A  l'existence), une logique de l'apparence (une - dialectique -).
Sur fond de cette première vérité, il deent possible d'aborder, dans l'Analytique, l'étude des structures de l'objectité (déductions des catégories et schématisme) et d'accéder ainsi A  la deuxième vérité : la vérité scientifique. L'Esthétique et l'Analytique prises ensemble constituent donc la totalité de la vérité en tant qu'elles sont la théorie vraie de la donation d'existence (de la manifestation) et la pensée adéquate de l'essence ou quiddité de l'objet. C'est alors seulement qu'il deent possible d'aborder la Dialectique, c'est-A -dire la critique de l'erreur métaphysique qui consiste en son fond A  identifier l'essence et la manifestation (l'existence) en déduisant la seconde de la première. La Critique de la raison pure procède donc du vrai au faux, des catégories aux Idées, de Y Analytique A  la Dialectique. Toutefois, il conent de remarquer qu'une démarche inverse semble suggérée par Kant lui-mASme : on sait qu'aux yeux de Kant la Dialectique transcendantale (et en particulier les antinomies) démontre en retour la vérité de l'Analytique. La Critique de la raison pure fait appel en effet A  deux types de preuves :
' une preuve directe, celle de l'analyse transcendantale, que l'on pourrait nommer preuve par la conscience d'impossibilité. Elle consiste A  montrer, en partant de la notion d'expérience possible, que, pour concevoir l'expérience, il faut admettre telles et telles conditions (intuitions, catégories, schèmes, principes);
' une preuve indirecte, fournie par la Dialectique transcendantale, qui fait valoir A  celui qui n'admettrait pas les conditions dévoilées par l'Esthétique et l'Analytique que leur négation est source d'erreur ou, plus exactement, qu'elle est la source mASme de l'illusion transcendantale.
C'est cette deuxième voie que Fichte va emprunter A  l'exclusion de la première. Elle consiste donc A  partir du faux (de la Dialectique) pour aller au vrai par déconstruction et réduction progressive de l'erreur. Fichte va commencer la Grundlage par une Dialectique transcendantale pour remonter progressivement vers le schématisme, puis vers une déduction de l'espace et du temps et enfin de la matière mASme de la sensation. C'est en ce point seulement que s'achèvera la - Révolution copernicienne -, et, corrélativement, comme on le verra, la déconstruction du réalisme et de l'idéalisme. On remarquera encore que cette démarche, pour contraire qu'elle soit A  celle de Kant, peut cependant se concevoir comme demeurant dans le cadre de la philosophie critique. Fichte, en effet, n'a jamais prétendu faire autre chose que donner A  la philosophie kantienne une forme systématique. Ce qu'il entend renouveler dans le kantisme, c'est uniquement les défauts dus A  l'imperfection de l'exposition1. Aussi peut-on rattacher cette méthode A  celle de Kant d'une double faA§on :
' On peut faire valoir, tout d'abord (et cet argument possède une certaine importance lorsqu'il s'agit de poser la question de la forme systématique d'une philosophie, donc de la légitimité de son point de départ), que l'illusion transcendantale est un commencement qui, d'une certaine faA§on, n'est pas arbitraire aux yeux d'un kantien, puisque aussi bien cette illusion est, selon Kant lui-mASme, nécessaire.
' On peut enfin penser (et ceci s'inscrit dans la perspective d'une amélioration de la déduction métaphysique des catégories) que s'il a été possible de passer des catégories aux Idées, on doit pouvoir, A  l'inverse, faire resurgir les catégories des Idées par déconstruction de ces dernières. Fichte part donc de la pensée, au fond tout A  fait kantienne, que la métaphysique contient tout, mASme si ce n'est que sur le mode de l'illusion, ou, si l'on veut, de la négation (négation de la temporalité, de la différence entre l'essence et l'existence, etc.). La critique de la métaphysique doit donc AStre en mesure d'en faire jaillir la vérité. Si la métaphysique est oubli, abstraction de la différence du sujet et de l'objet, de l'AStre et de la pensée, en un mot, de la finitude, la critique de la métaphysique peut se présenter, pour utiliser un vocabulaire adornien, comme une - Dialectique négative -, entendons : comme une réparation, une restitution de ce qui a été éliminé dans le processus totalisant de la métaphysique1. L'avantage de cette méthode est édent : la métaphysique étant elle-mASme systématique, sa critique le sera aussi. Dès lors, la philosophie, au moins dans sa partie théorique, se réduit pour l'essentiel A  une Dialectique, si l'on entend par lA , comme Kant lui-mASme d'ailleurs le faisait, non seulement une mise en scène de l'apparence, mais aussi une déconstruction de l'apparence2.
Comme l'a montré A. Philonenko3, Fichte ne part pas du Moi absolu (premier principe) qui aurait été atteint de faA§on véridique par 1' - intuition intellectuelle -, mais il part du Moi absolu comme illusion transcendantale, soit : de ce qui chez Kant se nommait paralogisme de la raison pure. Je ne reendrai pas ici sur les arguments nombreux et irréfules déjA  avancés par A. Philonenko en faveur de cette thèse, mais je me bornerai A  en dégager les conséquences intéressant notre propos.
' La première tient au fait que le Moi absolu étant posé comme Idée, comme illusion, et non comme un AStre en soi effectivement atteint par une - intuition intellectuelle -, le sujet fini n'est pas réellement éliminé par le Moi absolu, comme il le serait nécessairement si cette saisie du Moi absolu était véridique. Cette remarque est d'une importance décisive pour la compréhension de la démarche de la Grundlage. Elle signifie que la réflexion du philosophe (sujet fini) peut continuer de subsister après le premier principe, précisément parce que celui-ci, en tant qu'illusion, n'annule pas la finitude. Toute la dialectique va reposer sur cette scission initiale du sujet philosophant et du Moi absolu, lequel, en tant qu'absolu, nie bien le sujet fini, mais en tant qu'absolu seulement illusoire le laisse malgré tout subsister. - La réflexion est libre -* :
le philosophe peut entamer et poursuivre comme bon lui semble le travail de déconstruction de l'illusion.
' Par lA  mASme, la lecture hégélienne de Fichte s'effondre. Pensant que Fichte part effectivement de l'absolu, Hegel lui reproche l'inconséquence1 qui consiste A  poser un deuxième principe (une réalité extérieure au Moi) après le premier, alors que la réflexion aurait dû s'arrASter. Si Fichte peut continuer sa - déduction - c'est, selon Hegel, au prix d'une double erreur : a) Celle de toute - philosophie de la réflexion -, qui consiste A  parler de l'extérieur sur - la chose mASme -, au lieu de la laisser A  son libre développement; b) Celle enfin qui consiste, partant de l'absolu, A  introduire - le multiple - (le fini, ou le réel) non par une déduction, mais tout simplement de faA§on empirique, parce que le moi philosophant sait que le monde extérieur existe.
Cette critique, qui serait juste si la philosophie de Fichte partait, comme le croit Hegel, de - l'intuition intellectuelle - au sens kantien2, c'est-A -dire d'une saisie véridique de l'absolu, est toutefois levée dès qu'on comprend qu'il s'agit, non d'une genèse A  partir de la vérité, mais d'une dialectique de l'illusion qui, par définition, laisse subsister le sujet critique ' fini.
La signification des deux premiers principes peut donc s'éclairer A  partir de ces quelques remarques. Si le premier principe qui pose le Moi absolu est A  comprendre comme un - paralogisme -, comme une illusion, en réfléchissant sur les conditions de possibilité qui ont permis de le poser ' réflexion qui reste pleinement légitime si l'on admet que le point de départ n'est pas la vérité mais bien cette illusion ', l'on doit parvenir, avec le deuxième principe, A  l'affirmation d'un Non-Moi absolu. Comme l'écrit A. Philonenko, - c'est donc au niveau des présuppositions qui commandent les constructions des deux premiers principes que s'effectue le passage du Moi au Non-Moi -*. Une fois posés, les deux termes que constituent le Moi et le Non-Moi s'opposent absolument de sorte qu'il faut chercher A  les concilier en admettant un troisième principe synthétique : - J'oppose dans le Moi un Non-Moi disible au Moi disible. -
Il n'entre pas dans mon propos d'analyser en détail la structure de la dialectique fichtéenne ni la faA§on dont il articule systématiquement les différents moments de la Dialectique transcendantale de Kant2. Je voudrais seulement montrer comment, A  partir de ces trois principes, vont se mettre en place les deux positions philosophiques ' l'idéalisme et le réalisme ' dont la partie théorique des Principes sera la critique. On indiquera tout d'abord brièvement en quoi le Moi et le Non-Moi s'opposent dans une antinomie qui se peut formuler de deux points de vue :
' D'un point de vue strictement logique, il va de soi que la position d'un Non-Moi est absolument incompatible avec celle d'un Moi absolu qui prétend AStre la totalité du réel ' la difficulté consistant, encore une fois, dans le fait qu'il est impossible de poser l'un sans poser l'autre, les constructions logiques qui les élissent étant rigoureusement parallèles.
' Mais si nous rapportons cette opposition A  l'histoire de la philosophie, c'est un problème classique qui se trouve ici posé par Fichte : celui de la représentation, dont on trouve la formulation critique chez Kant (dans la Lettre A  M. Herz du 21 février 1772) et la formulation sceptique chez Berkeley : comment puis-je réussir A  poser hors de moi quelque chose, alors que ce quelque chose reste toujours, par définition, un en-soi seulement pour moi3, et n'est donc jamais un en-soi vérilement extérieur A  moi. Le réalisme dogmatique (c'est-A -dire la position qui consiste A  affirmer l'existence en soi du Non-Moi) suppose toujours un moment de négation du Moi, A  savoir la position d'un en-soi qui n'est plus pour moi, alors mASme que c'est encore le Moi qui a posé que cet en-soi n'était pas pour lui. C'est donc toujours pour le Moi que l'en-soi est affirmé comme n'étant pas pour le Moi, l'affirmation dogmatique devant nécessairement oublier le premier - pour moi - et tomber ainsi dans une contradiction pure : - Au cours de notre recherche, l'hypothèse réaliste d'après laquelle la matière pourrait venir du dehors s'est effectivement présentée mais nous mes après un examen plus approfondi qu'une telle hypothèse contredisait le principe énoncé, étant donné que ce A  quoi la matière serait donné du dehors ne serait pas un Moi comme il doit l'AStre selon l'exigence fondamentale, mais un Non-Moi -*, puisque aussi bien l'en-soi ne saurait AStre A  la fois en soi et pour moi2.
Cela ne signifie bien édemment pas que Fichte admette pour autant la solution - idéaliste - de la pure et simple négation du Non-Moi : il faut en effet souligner que les deux termes posés doivent nécessairement l'AStre en ce que, se supposant l'un l'autre, ils s'impliquent réciproquement3, de sorte que la simple juxtaposition des deux premiers principes constitue une opposition - analytique -, c'est-A -dire une contradiction logique. Mais étant par ailleurs tous deux - certains - (du point de vue de la logique formelle - utilisée comme organon -), il faut cependant les accorder, de mASme qu'il faut (en quittant le terrain proprement logique pour celui des questions classiques de l'histoire de la philosophie) trouver une solution au problème de la représentation.
La difficulté qui surent en ce point de la réflexion de Fichte est la suivante : les deux principes s'opposent, nous l'avons vu, de faA§on contradictoire ou analytique1. C'est dire que du point de vue de la logique formelle, ils ne doivent pas pouvoir s'accorder puisqu'une contradiction absolue relève nécessairement du principe du tiers exclu. Si Fichte considère que les deux principes doivent pouvoir s'accorder synthétiquement dans un troisième, c'est nécessairement parce qu'il pense implicitement que cette contradiction analytique n'est qu'apparente et cache en fait une opposition synthétique; ce qui confirme indisculement, s'il en était besoin, la justesse de la thèse de A. Philonenko, selon laquelle la Grundlage met en place, dans les trois premiers principes, une logique dialectique de l'apparence. Il suffit pour s'en convaincre de se souvenir de ce qui constitue aux yeux de Kant une - antinomie -. L'antinomie est en effet une opposition de deux thèses qui se présente sous la forme d'une contradiction ' donc sous la forme d'une opposition relevant du principe du tiers exclu, si bien que, des deux propositions en présence, l'une semble devoir AStre vraie et l'autre fausse ' alors qu'elle n'est en réalité qu'une opposition entre contraires ou subcontraires. Ainsi, dans la Critique de la raison pure, les deux premières antinomies sont des oppositions de contraires (opposés dans un mASme genre) de sorte que la thèse et l'antithèse peuvent toutes deux AStre fausses, ne relevant qu'en apparence du tiers exclu : par exemple, le monde n'est ni fini ni infini et l'alternative n'est pas exclusive, car il peut AStre pensé comme indéfini. Dans les troisième et quatrième antinomies, comme on sait, la solution est inverse car il s'agit de subcontraires (le sujet est pris en un sens différent dans la thèse et dans l'antithèse) : ainsi, dans la troisième antinomie par exemple, où la thèse considère l'homme comme noumène et l'antithèse comme phénomène, les deux propositions, qui ne se contredisent qu'apparemment, peuvent toutes deux AStre vraies pourvu que l'on précise le sens que possède le sujet dans chacune d'elles.
L'opposition des deux premiers principes se présente donc très précisément comme une antinomie (celle de l'idéalisme et du réalisme). Il s'agit par conséquent de les - composer -, c'est-A -dire, comme chez Kant, de transformer en opposition transcendantale ce qui, au niveau de l'illusion, se présente comme contradiction logique, de sorte que le passage du premier principe au second peut AStre interprété comme - le passage des paralogismes et de leur synthèse dans un Moi absolu A  l'antinomie de la représentation - et c'est précisément cette antithétique que le troisième principe ' qui correspond ainsi A  l'énoncé de la solution critique2 d'une antinomie ' est chargé de composer synthétiquement. Cette composition sera donc la solution du problème de la représentation puisqu'elle consistera A  accorder l'idéalisme et le réalisme qui sont les positions philosophiques sous-jacentes aux deux premiers principes. Mais il conent encore, avant d'aborder le sens de cette critique de la métaphysique, d'examiner brièvement comment elle se met en place au niveau du troisième principe.
Partant de l'illusion du Moi absolu (premier principe), nous avons dû également admettre un second principe qui, combiné avec le premier, donne lieu A  une antinomie (une opposition qui se présente apparemment comme une contradiction analytique) dont la signification réelle est le problème de la représentation (comment puis-je admettre l'existence de quelque chose hors de moi ?). Le problème dont le troisième principe doit indiquer la solution peut donc s'énoncer ainsi : il s'agit de transformer une contradiction analytique seulement apparente en opposition synthétique réelle. Comme l'indique A. Philonenko, un tel problème suppose que soient remplies trois exigences : - En premier lieu, les deux termes opposés ne doivent plus seulement AStre opposés qualitativement (Moi et Non-Moi, rouge et non rouge); ils doivent s'opposer quantitativement; l'idée de quantité fonde en effet des oppositions pensables. En second lieu, l'opposition quantitative doit posséder un sens qualitatif; s'il en était autrement, les termes opposés pourraient AStre considérés comme de mASme signe et AStre additionnés. Enfin, une troisième exigence apparait : si l'opposition conserve une signification qualitative, il faut que, réunis, les deux opposés composent un mASme tout -x. L'opposition doit donc devenir quantitative pour AStre pensable : en effet, les deux termes ne vont plus s'opposer absolument, mais seulement en partie. De lA  l'idée d'un Moi - disible - et d'un Non-Moi - disible -, c'est-A -dire de deux termes en lesquels la réalité se partage. Ce qui permet de penser encore cette opposition comme ayant un sens qualitatif (de sorte que les deux termes continuent de s'opposer, n'étant pas additionnables), c'est l'introduction du concept de grandeur négative qui fonde l'idée d'action réciproque : le Moi et le Non-Moi se partagent la totalité du réel, leurs quantités opposées entretenant un rapport de réciprocité, comme dans un système de forces. Cette totalité n'est autre que celle du Moi absolu qui demeure encore le substrat de la dision entre Moi fini et Non-Moi fini; d'où la formulation du troisième principe : - J'oppose dans le Moi un Non-Moi disible au Moi disible -2.
Afin de rendre intelligibles les développements contenus dans les deux chapitres qui suivent, on fera deux observations : i) Il faut d'abord garder fermement A  l'esprit l'idée que les principes énoncés au début de la Grundlage sont tous faux (et non seulement le premier) : comme le suggère A. Philonenko3, ils peuvent justement AStre és aux trois Idées métaphysiques que Kant critique dans la Dialectique transcendantale. Le premier principe correspond A  l'Idée d'un Moi indiduel absolu (Idée psychologique), le second A  l'Idée d'un Non-Moi absolu, c'est-A -dire d'un Monde en soi (Idée cosmologique) et le troisième A  la synthèse dine du sujet en soi et de l'objet en soi. 2) Le sujet en soi et l'objet en soi étant, au sein de l'illusion, radicalement coupés l'un de l'autre, la déconstruction de la métaphysique aura le sens kantien d'une - réfutation de l'idéalisme - : elle n'aura d'autre but que de montrer comment le sujet et l'objet doivent AStre A  la fois liés et séparés (ce que ne peuvent penser les métaphysiciens qui ne parennent jamais qu'A  les réduire l'un A  l'autre, soit de faA§on idéaliste en ramenant l'objet au sujet, soit de faA§on réaliste en ramenant le sujet A  l'objet ' A  son simple reflet). La déconstruction de l'illusion aura donc pour finalité de reconduire l'homme A  sa propre vérité, ce que Fichte formule de la faA§on suivante : - Dès que vous serez au clair avec votre philosophie, cette illusion tombera de vos yeux comme des écailles Dans la e, vous penserez ne rien savoir d'autre sinon que vous AStes un AStre fini et fini d'une manière déterminée comme vous devez vous l'expliquer par l'expérience d'un monde ainsi fait en dehors de vous. Et pas plus que vous n'auriez l'idée de ne plus AStre vous-mASmes, vous n'aurez l'idée de dépasser ces limites -*.
On a peine, en Usant ce texte, A  comprendre comment Fichte a pu AStre si longtemps considéré comme le champion de 1' - idéalisme subjectif-, lui qui n'avait d'autre but que de rappeler l'homme A  sa finitude en liant sa conscience A  celle d'un monde. La raison peut toutefois en AStre indiquée; elle est d'une importance méthodique considérable : pensant que Fichte partait de la vérité, d'une saisie authentique du Moi absolu, les interprètes ne pouvaient voir dans la déduction que la Doctrine de la Science opère, non seulement des formes de la sensibilité, mais encore de leur matière, qu'un idéalisme radical. Si l'on admet, A  l'inverse, que Fichte part de l'illusion, cette déduction prend immédiatement un sens rigoureusement opposé : certes, on peut dire que, d'une certaine faA§on, le Moi absolu contient bien toute réalité; mais il faut alors entendre que c'est sur un mode purement négatif. Si le Moi absolu comprend toute réalité, c'est au sens où il nie toute réalité, puisque aussi bien, en tant qu'absolu, il doit, comme l'indiquait déjA  la Dialectique transcendantale de Kant, nier le monde extérieur et la temporalité dans sa prétention A  l'autosuffisance éternelle. Dès lors, la démarche de Fichte est une démarche essentiellement - réparatrice - : il s'agit dans une dialectique purement négative de restituer par déconstruction de l'illusion ce que celle-ci a éliminé dans sa prétention mASme A  l'absoluïté, A  savoir le monde extérieur et le sujet fini situé dans le temps. En ce sens, la dialectique de Fichte est de part en part une critique de l'illusion métaphysique et c'est exclusivement de cette critique que peut naitre une vérité qui ne lui préexistait pas. Comme telle, elle possède immédiatement une signification - politique -, puisque, dénonA§ant l'élimination du sujet fini sous toutes ses formes, elle instaure les conditions de possibilité théoriques d'un espace d'intersubjectité.
Il y a donc lieu d'élir un lien rigoureux entre la critique des fondements métaphysiques de l'historicisme (la confusion de l'idéal et du réel dans l'idéalisme et le réalisme) et la possibilité d'une philosophie politique moderne : si la philosophie politique, comme le dit justement Strauss, suppose que soit possible une critique de la positité, il est clair que cette possibilité est évacuée dans l'idéalisme et le réalisme qui, chacun pour des raisons opposées, ne peuvent penser l'histoire que sous l'idée de nécessité. Pour qu'il y ait critique de la positité, il faut que le sujet et le monde soient A  la fois distingués et cependant pensés comme en rapport l'un avec l'autre1. Coupure ou union totale des deux termes font au contraire perdre irrémédiablement tout sens A  l'idée mASme de critique sans laquelle, Strauss le concède, on ne saurait concevoir, sur quelque mode que ce soit, l'opposition du droit naturel et du droit positif.
Les prochains chapitres seront donc consacrés i) A  examiner la critique fichtéenne des fondements métaphysiques de l'historicisme, et 2) A  montrer comment cette critique ouvre un espace au sein duquel une philosophie politique deent pensable, qui cependant reste moderne en ceci qu'elle ne renonce pas A  cette subjectité (A  l'humanisme) dont elle a réussi A  montrer que le devenir métaphysique (historiciste) n'était pas inéle2.



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