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MARKETING

Le marketing, parfois traduit en mercatique, est une discipline de la gestion qui cherche à déterminer les offres de biens, de services ou d'idées en fonction des attitudes et de la motivation des consommateurs, du public ou de la société en général. Il favorise leur commercialisation (ou leur diffusion pour des activités non lucratives). Il comporte un ensemble de méthodes et de moyens dont dispose une organisation pour s'adapter aux publics auxquels elle s'intéresse, leur offrir des satisfactions si possible répétitives et durables. Il suscite donc par son aspect créatif des innovations sources de croissance d'activité. Ainsi l'ensemble des actions menées par l'organisation peut prévoir, influencer et satisfaire les besoins du consommateur et adapter ses produits ainsi que sa politique commerciale aux besoins cernés.


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Entreprise polymorphe plutôt que globale



Entreprise polymorphe plutôt que globale
La mondialisation des marchés n'est certes pas un phénomène nouveau. De nombreuses sociétés se sont internationalisées dès les années 50 en provoquant déjà des inquiétudes croissantes quant à la puissance économique qu'elles étaient ainsi en mesure de détenir face aux états. Ceux qui faisaient leurs études économiques à la fin des années 60 se souviendront de l'exemple typique donné à l'époque, celui de General Motors, et de l'inquiétude naissante des milieux politiques constatant que les ressources financières de cette société excédaient celles de nombreux pays européens. Aujourd'hui, c'est la société CISCO que l'on cite, avec une capitalisation boursière du niveau du PNB de la Russie.


En cette fin de millénaire, la nouveauté se situe sur un autre . L'émergence des nouvelles technologies de l'information rend possible la mise en place de stratégies visant à toucher de façon simultanée et identique l'ensemble des consommateurs du monde entier. La création de la monnaie européenne unique a aussi institué, en contrepoint du marché nord-américain, une zone géographique où les diverses particularités économiques et sociales des pays s'estomperont progressivement. Aussi, au-delà de la mondialisation des marchés, un second concept est-il né, celui de la globalisation. Il ne s'agit plus seulement de s'internationaliser. Il s'agit de le faire en concent le marché mondial comme un seul et même marché qu'il est possible d'appréhender de façon unique, quelles que soient les caractéristiques historiques, politiques, sociales ou culturelles de ses composantes géographiques.
Certes, chacun est bien conscient des nécessités d'adaptation qui existent encore : un nom, une marque peuvent avoir dans le langage local une connotation particulière qu'il convient d'éviter et l'histoire du marketing regorge d'exemples savoureux à ce sujet. Il est connu aussi que les différences de goût rendent l'accès de certains marchés inaccessibles pour certains produits alimentaires. Certaines normes nationales subsistent encore, rendant nécessaires des adaptations techniques. Mais tous ces problèmes ne sont en fait considérés par les avocats de la démarche globale que comme des ajustements nécessaires et mineurs par rapport aux bénéfices escomptés. Après tout, n'est-ce pas Oscar Wilde qui disait qu'il n'y a qu'une différence entre Anglais et Américains : la langue ?
En particulier dans le domaine des produits industriels (celui de la vente « business to business »), les décisions d'achat sont perçues comme plus rationnelles et moins sujettes à ce type de problème d'adaptation. Le phénomène s'enrichira donc de lui-même : plus les sociétés globaliseront leur approche du marché, plus elles réclameront de la part de leurs fournisseurs le même type d'approche afin d'être fournies et servies en tout point du globe de manière identique et standardisée. Les technologies de la nouvelle économie vont donner un coup d'accélérateur à ce mouvement en mettant en place des carrefours d'affaires internationaux que nous étudierons au chapitre suint.
Les globalisateurs font loir des bénéfices impressionnants :
. des économies d'échelle en matière de coûts de fabrication, grace à des produits complètement standardisés ;
. de fortes réductions des coûts des ventes, tels un seul investissement en matière de création publicitaire, l'élimination des facteurs de redondance dans les choix de politique de distribution et de promotion des produits ;
. des frais de gestion, administratifs et logistiques, considérablement amoindris du fait d'un nombre réduit de références à suivre ;
. enfin, et ce n'est pas le moindre des bénéfices, il n'existe qu'un pas à franchir entre globalisation des marchés et globalisation des organisations. Les coûts indirects de structure, de support et de management peuvent, sur le papier, être considérablement réduits en verticalisant les organisations à un niveau mondial.
Le raisonnement est imparable : pour servir un marché global, il faut une société globale où la stratégie décidée à un niveau central est transmise pour être appliquée de façon uniforme dans chacun des pays. Pourquoi ne pas appliquer systématiquement dans chaque pays une recette qui a prouvé son succès dans un endroit donné ? Pourquoi accepter d'investir en temps et en argent pour réétudier et reconcevoir à un niveau local des solutions à des problèmes qui ont déjà été résolus ailleurs ? Bien plus, le fait de développer la notoriété de l'entreprise à un niveau mondial aura un effet de résonance au niveau local et permettra ainsi de renforcer ses positions dans chaque pays.


Récemment, cependant, quelques revirements de stratégie sont apparus : par exemple, le nouveau CEO de Coca-Cola a introduit dans les mesures de redressement de sa société le fait que les responsables des différentes régions, jusqu'ici tous localisés à Atlanta, devront avoir un lieu de trail au sein de ta région dont ils ont la charge.
Une entreprise que l'on s'attendrait à être un des chantres de la globalisation est certainement McDonald's. L'origine de son succès et sa capacité à avoir toujours su repousser ses concurrents sont bien souvent expliquées par l'extrême standardisation de son process et la grande discipline avec lequel il est appliqué dans chaque coin du monde. En apparence, il n'y a pas de différence entre le restaurant de Moscou et celui du Quartier latin à Paris. C'est cette standardisation, lors de sa création, qui l'a différenciée des différents « coffee shops » qui existaient alors aux États-Unis et qui aient tous leurs spécialités locales. Ses dirigeants, néanmoins, n'hésitent pas à parler d'une société multi-locale et d'une stratégie qualifiée de « glocale ». J.-P. Petit, directeur général de McDonald's France me l'expliquait ainsi : « En tant que filiale, nous avons bien sûr à réaliser les objectifs auxquels nous nous sommes engagés vis-à-vis de notre maison mère. Nous avons aussi un cadre général qui fixe le domaine de notre action : un produit, le hamburger ; un réseau de franchisés pour le commercialiser ; une cible prioritaire, la famille en s'appuyant particulièrement sur les enfants. Nous partageons également un certain nombre de leurs comme une exigence très forte de qualité, un respect très strict de standards particulièrement élevés de propreté. Mais, ajoute-t-il, nous bénéficions d'une délégation complète pour définir et mettre en place les moyens nécessaires qui peuvent être différents d'un pays à l'autre. Il n'existe qu'une seule obligation à respecter lors de la mise en place d'une nouvelle idée : la communiquer à nos sociétés sours pour bénéficier de leur expérience éventuelle dans le domaine concerné. » Les raisons qui poussent à une telle délégation ne manquent pas, comme le consommateur, d'abord, dont les goûts, même sur le hamburger, peuvent rier et exiger des accomnements différents. Mais la raison essentielle tient dans un environnement qui reste très marqué par le contexte local. Les cycles de restauration sont différents d'un pays à l'autre. Le petit déjeuner n'a pas la même importance dans les pays anglo-saxons et les pays latins. De ce fait, les coefficients de remplissage des restaurants, l'étalement des consommateurs tout au long de la journée, la leur moyenne du plateau commandé diffèrent sensiblement. Il ne saurait y avoir de normes de couverture identiques dans tous les pays. Surtout en Europe, la concurrence est indirecte et provient des autres formes de restauration. On sait aussi que celles-ci n'ont que peu de choses en commun et, face à elles, les stratégies doivent rier. Le succès de la société tient énormément dans son mode de fonctionnement qui a doté les responsables locaux d'un fort pouvoir de décision pour être le plus efficace possible face aux particularismes locaux. En fait, concluait J.-P. Petit, « On peut dire qu'il existe entre la maison mère et ses filiales une relation de la même nature que celle entre chaque société locale et ses franchisés. »
On peut ici amener plusieurs éléments de réflexion.
Tout d'abord, il est erroné de penser que les méthodes de management des entreprises, la façon dont elles conçoivent leur rôle au sein des différentes communautés, la manière dont elles peuvent s'insérer dans les tissus locaux puissent être pensées de manière identique en tout point du monde. L'université Paris IX-Dauphine a organisé un séminaire sur le thème « Morale, spiritualités et vie des affaires » dont un des objectifs était de mieux comprendre, à l'heure de la mondialisation économique, les influences des diverses croyances sur la pratique de la vie des affaires . Le catholicisme ainsi reconnait « le caractère positif du marché et de l'entreprise » en soulignant la nécessité de « leur orientation sur le bien commun ». L'islam a une doctrine économique très précise, encourageant les notions d'éthique et d'équilibre dans la vie des affaires : « Dieu accorde sa miséricorde à l'homme généreux dans ses achats, généreux dans ses ventes, et généreux dans ses transactions. » Mais il interdit tout ce qui retire les richesses de la communauté comme la thésaurisation, ainsi que l'enrichissement sans cause dont le Riba, proche de notre notion d'intérêt. « L'honnête homme, pour le confucianisme, s'efface dent ses concurrents. » Quant au Japon, on sait que les notions occidentales de renilité des entreprises sont secondaires, culturelle-ment, par rapport à la justification sociale de celles-ci.


Et l'on voudrait avoir une entreprise mondiale, unique, globale !
Ensuite, sur un beaucoup plus opérationnel, la logique de la globalisation est sans faille si on considère qu'une stratégie marketing doit être batie en fonction des besoins clients, tels qu'on peut leè anticiper. Mais qu'en est-il si on adopte un autre point de vue, celui qu'il ne peut y avoir de stratégie gagnante à terme si elle ne vise pas, ant tout, à améliorer le positionnement concurrentiel de l'entreprise. Or, si le client final tend à devenir unique, le concurrent reste très différent d'une zone géographique à une autre. Rome ne fut pas faite en un seul jour, le marché mondial non plus. Nous sommes entrés dans une longue phase de transition au cours de laquelle le contexte concurrentiel historique de chaque pays continuera à peser sur les choix stratégiques. Dans tel pays, une entreprise pourra se targuer d'avoir été celle qui a créé le marché et qui en est resté le leader incontesté, du fait de sa notoriété. Cette même entreprise peut se trouver ailleurs dans un rôle tout à fait différent de challenger, du fait de la position historique de ses concurrents sur ce marché local. Cette entreprise doit-elle adopter une stratégie globale ? Ne doit-elle pas opter, au contraire, pour une stratégie différenciée : dans un cas, une position défensive pour protéger ses positions acquises avec un « marketing mix » adapté à ce type de stratégie ; dans l'autre cas, une politique d'innotion lui permettant d'attaquer ses concurrents installés en exploitant leurs faiblesses ou en les prenant par le flanc en introduisant un élément de nouveauté ? Cette entreprise peut-elle avoir exactement les mêmes produits, le même réseau de distribution, la même stratégie promotionnelle, le même style de management dans les deux cas de ure, alors qu'elle est dans un échiquier concurrentiel complètement différent ? Les maitres internationaux d'échecs n'ajustent-ils pas leur stratégie au jeu de leur adversaire qu'ils auront largement étudié ant ? Joue-t-on de la même façon selon qu'on a les blancs ou les noirs, un coup d'ance ou un coup de retard, une position offensive ou défensive ?
Pendant de longues années, les filiales européennes et américaines de la société où je traillais ont investi en pure perte des sommes gigantesques pour imposer un produit conçu et commercialisé avec succès par la filiale japonaise, un système de gestion électronique de la documentation technique. Au début, les difficultés rencontrées sur les marchés occidentaux furent mises sur le compte d'organisations différentes des clients entre ces deux marchés, et donc de fonctionnalités inadaptées pour réussir en dehors du Japon. Plusieurs voyages dans ce pays ont cependant démontré qu'il n'en était rien. On en a alors déduit que la stratégie était bonne et que c'était dans sa mise en place opérationnelle imparfaite qu'il fallait chercher les causes de cet échec coûteux. En fait, il ne s'agissait ni de l'un, ni de l'autre. Le positionnement concurrentiel de notre société était tout simplement historiquement différent entre le Japon et le reste du monde. Au Japon, le produit en question ait été le premier produit de ce type à être introduit sur le marché, profitant de l'opportunité que représentait une concurrence peu active (le Japonais est assez peu créatif en matière de logiciels) et notre filiale ait su profiter de cet antage pour s'imposer comme le spécialiste, dans l'esprit du marché. Ainsi, elle ait pu, en continuant à investir régulièrement, consolider cette perception et rester solidement sur ses positions de leader. Ailleurs, d'autres sociétés concurrentes aient été plus rapides, plus vives dans le lancement de produits attractifs et les jeux étaient déjà faits lorsque nous sommes arrivés sur le marché. Le produit en question ne convenait pas pour une stratégie de challenger.
Si être leader consiste à détenir un concept dans l'esprit des clients, alors il faut se demander si ce concept est le même, si l'esprit du client est identique dans tous les pays.
Volkswagen détenait un concept de constructeur de voitures haut de gamme dans son marché d'origine, l'Allemagne, mais de petites voitures pas chères dans le marché qu'il voulait conquérir, les États-Unis. L'avoir oublié lui a coûté cher.
La perception des clients est très difficile à changer. Si elle est différente d'un pays à l'autre, c'est à l'entreprise de s'adapter. Certes, il peut paraitre difficile de gérer les particularismes locaux, mais cela ne l'est que dans un cadre de gestion centralisée. En renche, l'entreprise peut opter, dès le départ, pour une organisation où les ressources, et en particulier celles du marketing, sont placées au plus proche des forces opérationnelles, des clients et des concurrents. Prendre en compte ces particularismes locaux n'est plus alors une de ces exceptions difficiles à intégrer, mais une opportunité d'améliorer la compétitivité de l'entreprise secteur par secteur.


La société Danone s'est recentrée sur trois activités principales : les biscuits, les produits laitiers frais et les eaux. Elle le fait avec l'ambition de devenir leader mondial dans chacune d'entre elles. Récemment, son PDG déclarait qu'en fait, être leader mondial n'a aucune signification si on ne l'est pas dans chaque pays où on s'est engagé.
En effet, ne pas être leader dans une région géographique signifie qu'il y a là un concurrent qui a trouvé une faille et qui, à partir de cette position de force, peut se développer et devenir une menace globale. L'entreprise globale vise un leadership mondial alors qu'il faut viser un leadership dans chaque pays. La stratégie de l'entreprise n'est plus une stratégie centrale s'accommodant mal des spécificités locales mais une stratégie émergente construite en consolidant et renforçant chaque démarche locale. Elle profite ainsi de la richesse des diversités culturelles de chacune de ses équipes locales, des savoir-faire qui, historiquement, ont été développés dans chaque pays.
Qu'advient-il des bénéfices attendus de la globalisation ? Les coûts des produits peuvent être alourdis du fait de la nécessité de développer les fonctionnalités nécessaires à la stratégie concurrentielle de chaque zone. Le but, néanmoins, est d'améliorer la compétitivité de l'entreprise et donc de réaliser des volumes d'affaires supérieurs, volumes qui devraient pouvoir faire baisser le prix des principaux composants du produit.
La société Manitou pense que savoir répondre à tous les particularismes locaux est un grand atout concurrentiel. C'est au niveau de la politique de développement des produits que tout se joue, « car c'est en incluant très tôt cette donnée dans la conception même de nos produits que nous rendons cette stratégie possible sur le des coûts », précisait son directeur général, B. Fille.
Les coûts des ventes peuvent être supérieurs, mais, là aussi, regardons d'abord l'efficacité de l'organisation marketing et non pas seulement son coût. Enfin, contrairement à de nombreuses idées reçues, la décentralisation de certaines fonctions ne revient pas plus cher si, en parallèle, les coûts centraux sont réduits au minimum. Ce sont en fait les organisations hybrides qui coûtent cher, celles qui ne font ni le choix d'une vraie centralisation ni celui d'une vraie decentralisation car c'est la que les actions redondantes existent.
La différenciation est la première arme concurrentielle qu'une entreprise doit utiliser pour gagner contre sa concurrence. Dans l'objectif de mondialisation, l'entreprise gagnante ne sera-t-elle pas celle qui saura prendre le contre-pied de ses concurrents globalisateurs en se dotant d'une approche diversifiée propre à lui assurer un gain concurrentiel dans chaque marché géographique où elle est engagée ?
Il est une caractéristique de la métis grecque que nous n'avons pas encore abordée : sa polymorphie. La déesse Métis, l'épouse de Zeus, sait se métamorphoser. Pour échapper à l'étreinte de Zeus, elle se mua « en toute sorte de formes ». Elle put se faire successivement « lion, taureau, mouche, poisson, oiseau, flamme ou eau qui fuit ».
Considéré du point de vue concurrentiel, le monde économique est souvent encore multiple. Pour le dominer, il faut avoir cette métis qui rend l'entreprise plus multiple encore, polymorphe.
Adopter une stratégie de globalisation ne peut être que la conséquence d'une analyse montrant que l'échiquier concurrentiel lui-même est global.
La société Nokia a une politique globale qu'elle veut « sans concessions ». Quoi de plus logique ? Son marché, de par sa nature, ignore les frontières. Ses clients directs, les grands opérateurs des télécommunications, sont eux-mêmes globaux. Sa stratégie repose sur la vitesse d'exécution. Ses principaux concurrents se présentent de façon identique dans chaque pays. Dans ces conditions-là, ce serait une erreur de ne pas être global.
Mais il s'agit d'une réponse adaptée à une situation donnée et la globalisation ne saurait être la solution unique que certains voient en elle. Comme le conseille un grand maitre d'échecs, ant de jouer il faut regarder l'échiquier.





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