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DROIT

Le droit est l'ensemble des règles générales et abstraites indiquant ce qui doit être fait dans un cas donné, édictées ou reconnues par un organe officiel, régissant l'organisation et le déroulement des relations sociales et dont le respect est en principe assuré par des moyens de contrainte organisés par l'État.


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La tolérance aujourd'hui et ses limites



Il est rare de devoir poser un problème métaphysique et éthique en fonction de l'évolution des circonstances de la vie en société. Or le problème de la tolérance ne peut AStre abordé aujourd'hui dans les mASmes termes que jadis. Actes de terrorisme et menaces fondamentalistes obligent en effet A  réviser ici bien des notions admises et A  pratiquer un autre type d'examen réflexif et critique.


C'est généralement la seule possibilité d'exprimer des opinions différentes et de jouir d'une simple liberté de pensée qui a souvent été le centre mASme d'une réflexion sur la tolérance. Et c'est dans cette unique perspective qu'ont été traitées les questions classiques liées au respect des droits élémentaires de l'homme considéré dans son individualité sexuelle, ethnique ou confessionnelle, et dans la spécificité de ses engagements culturels ou politiques. Sans cesse, l'on a donc mis en évidence le sens d'une exigence inconditionnelle de justice, qui ne dépend que de la vérité due A  la personne humaine, et qui repose sur la protection de l'intégrité de toutes ses aspirations morales A  l'intérieur de la communauté où elle vit. Il a toujours fallu rappeler qu'un droit n'est juste, et qu'un système politique garantissant ce droit ne participe lui-mASme de la justice, que si chaque membre du groupe possède, sous l'égide d'un tel groupe, le pouvoir de déclarer et de professer la conception qu'il juge vraie.
Cette approche a prélu, tant que du moins la question des limites de ce pouvoir ou de cette liberté n'ait pas mASme lieu d'AStre envisagée. Il était implicite, en référence A  un modèle d'humanité sans doute raisonnable, qu'une conception quelconque qui ait la faveur de l'esprit ne pouit radicalement heurter les principes et l'ordre sur lesquels étaient élis la société d'appartenance d'un individu civilisé. Et il paraissait naturel d'abandonner alors le critère de la vérité de la conception ou de l'opinion en cause A  la subjectivité de chacun, maitre d'en déterminer le contenu selon les postulations présumées authentiques et innocentes de sa conscience.
C'est ainsi que se profilait A  l'arrière- une interprétation philosophique situant le fondement de la tolérance dans une théorie de la vérité, dont l'inspiration pouit AStre A  son tour identifiée A  travers l'idéalisme, le rationalisme et les - Lumières -. L'on était passé en somme de la tolérance dérivée d'un certain objectivisme médiél du critère aléthique dont l'exemple peut AStre recherché dans le fameux livre de Raymond Lulle, au xme s., Le Dialogue du Gentil et des trois sages, A  la tolérance prise sous un aspect résolument plus subjectiviste dans la mounce du déisme naturaliste qui aboutit A  Lessing et A  son Nathan der Weise
C'est ainsi aussi que l'on a pu longtemps discuter du siège ou de l'ancrage de la liberté A  préserver, et, par conséquent, de la nature mASme de l'objet de la conduite tolérante au sein de tous les courants plus phénoménologiques qui se sont engagés au cours de ce siècle dans une description du comportement éthique, des études de Josiah Royce sur le loyalisme aux réflexions sur la fidélité de Gabriel Marcel ou de Paul Ricœur; et, en France notamment, toute une génération de philosophes attachés A  l'analyse des sentiments moraux, de Lavelle, Le Senne, Maritain, Mounier A  Jankélé-vitch, Bastide, Nabert et Nédoncelle, s'est interrogée parfois sur le refus de la leur et de l'AStre qui semble bien caractériser le rétrécissement - littéraliste - ou - grammatiste -, des Weltanchauungen individuelles conduisant A  l'intolérance
Jamais cependant l'on ait eu A  considérer, comme c'est le cas A  notre époque, les risques qui pèsent sur un usage excessif de la liberté qu'est censée protéger l'attitude tolérante, quand cette liberté mASme peut engendrer une intolérance concrète ou de fait, et quand cette intolérance concrète ou de fait, accomnée des pires violences, ébranle en profondeur les piliers de la société civile. Autrement dit, le problème des limites est devenu le seul grave problème en présence du phénomène nouveau du terrorisme, du fondamentalisme et de leurs moyens d'action (attentats aveuglément perpétrés, prises d'otages, etc.). Et, en mASme temps, ce problème renvoie A  celui du critère du vrai ou du faux, du juste ou de l'injuste dans la définition de l'attitude qui doit susciter la tolérance. D'où le souci plus précis de savoir s'il ne faut pas, par une inévile -intolérance-, agir A  l'encontre de revendications, de manifestations de pensée ou de comportement qui sont susceptibles de provoquer ou qui provoquent directement une subversion totale des principes sociaux communs, des manifestations conformes en cela au schéma de l'intolérance qui doit apparaitre suspecte.
Dans de telles conditions, l'- intolérance - par laquelle l'on réagit A  cette intolérance n'est pas intrinsèquement viciée d'intolérance en une acception rigoureuse et morale, car elle n'est pas inspirée par une représentation qui offusque la perception de la justice, mais par une représentation qui assume la responsabilité du moindre mal, et qui participe ainsi A  la vérité plus haute A  protéger. Et c'est le sens mASme du droit qui est posé (dont on sait bien quel sens du respect du droit d'autrui et donc des droits de la collectivité lui est sous-jacent). Le droit le plus typique dans cette perspective sera le droit pénal qui entend compenser par une injustice minimum l'injustice constatée; thème de la rétribution ou du talion compris A  la manière hégélienne des Grundlinien Quant A  l'intolérance A  laquelle le droit fait front et qui est constitutive de cette injustice constatée, il faut en l'occurrence admettre un critère du vrai ou du juste pour pouvoir la discerner et l'élir.
En tout cas, ce qui a incité A  renouveler les données de ce thème de la tolérance tient brutalement aux modes d'expression violents ou sanglants de ce que l'on aurait pu sinon s'abstenir de juger.
Certes, ces données ne sont pas tout A  fait nouvelles. L'on pourrait prendre divers exemples tirés de la vieille histoire de l'Europe. Exemples empruntés aux conséquences du fanatisme religieux, quand la foi a pu se transformer en une abstraction objet d'un usage polémique et destructif (des heurts entre la Chrétienté et l'Islam A  partir du Haut Moyen Age aux tensions survenues avec les communautés juives et aux confrontations et déchirements douloureux introduits dans le christianisme et liés A  la Réforme et A  la Contre-Réforme). Mais la politisation des structures du droit, puis la technicisation du politique lui-mASme ont conduit A  la massihca-tion ou A  la globalisation des phénomènes, qui ne peuvent plus intéresser seulement une société ou un Etat, mais qui transversalement impliquent toutes les sociétés et tous les Etats, et qui au sein de ceux-ci embrassent tous les aspects de la vie civile. Or cette amplification inédite a suscité des méthodes d'un genre nouveau, et d'une cruauté aussi nouvelle !
Telles sont les justifications qui nous mènent A  distinguer, sans jouer sur des mots qu'il convient de manier avec prudence, la tolérance nécessaire et la tolérance exclue. Ce qui est A  tolérer doit s'apprécier A  travers une analyse et une éluation de son sens, selon un critère objectif de vérité et de justice, car l'on ne peut aujourd'hui, face au terrorisme et au fondamentalisme qui sévissent, aux injustices qu'ils entrainent, s'offrir le luxe de -ne pas juger- en osant soutenir la respecilité d'une situation uniquement du point de vue de sa forme. Sa forme peut en effet couvrir un contenu particulièrement caractérisé par son intolérance elle-mASme. En bref, il s'agit de remonter A  des principes cognitifs et éthiques qui permettent de distinguer les manifestations - vraies - qui sont mues par un sens de la tolérance dont elles n'altéreront jamais le principe ou l'essence, des manifestations - fausses - qui ne se vérifient que trop rapidement A  travers des actes concrets d'intolérance physique. Et c'est ce qui peut ensuite AStre repris dans les dispositions mASmes d'un droit pénal qui a besoin, pour protéger les libertés fondamentales, de sanctionner les agressions dont elles peuvent AStre victimes au nom mASme de la liberté !


A cet égard, il ne devrait AStre nullement nécessaire d'attendre d'avoir A  constater des manifestations d'intolérance au niveau le plus concret pour avoir du moins A  les juger, si ce n'est A  les réprimer. DéjA , leur contenu intellectuel pourrait suffisamment alerter l'attention critique et la vigilance, si les causes matérielles s'analysent en les ramenant A  leurs causes morales. Le problème de la tolérance est peut-AStre actuellement bien mal posé dans les Etats européens dits démocratiques qui au nom de la démocratie adoptent une conception ancienne et vieillie de la tolérance, fondée sur un critère de la forme, et dont le présupposé est subjectiviste, dans une impuissance avérée face aux montées de la xénophobie, du racisme et de la haine religieuse. Certaines associations qui affichent leurs projets racistes, ne sauraient éviter, sous prétexte qu'aucun délit matériel ne peut leur AStre reproché, d'AStre tout simplement dénoncées comme ne pount s'accorder avec le droit, que doit garantir chaque Etat, A  la liberté de l'existence physique et morale de tout individu membre d'un groupe dans la mesure où ce groupe n'a pas vocation A  porter atteinte A  la liberté de ses voisins.
Conscient de ces dangers, l'on a vu naitre un courant philosophique, qui répugne cependant A  maintenir les exigences de sens et de vérité dans l'AStre de la vieille métaphysique ; un courant qui s'est délibérément installé dans le non-cognitivisme et la méta-éthique, et qui croit pouvoir résoudre le problème posé en administrant un respect de la forme rénové dans ses critères. Pour autant, il semble bien qu'il recule le problème au lieu de l'aborder, en ne faisant rien d'autre que redonner un visage nouveau au subjecti-visme et au formalisme anciens qui n'ont déjA  pu mettre un frein en ce siècle aux entreprises de l'intolérance totalitaire.
Une analyse qui renoue au contraire avec le sens métaphysique et qui le prolonge et l'incarne dans la réalité contemporaine, pourrait AStre celle que nous suggérons en recourant au mot prosôpon pour désigner l'intégralité de la personne humaine, comme désignant moins un individu (empiriquement) qu'un singulier (ontologique-ment), moins un sujet rationalisable et ressemblant qu'un existant impensable. Il nous semble qu'une définition, une représentation, une conception de l'homme, obvie ou latente, se situe toujours au fondement de ces manifestations d'intolérance de la volonté morale ou matérielle de l'homme qui ne cessent de poser question. Or c'est par l'effort de connaissance critique d'une telle définition, représentation ou conception anthropologique préalable que l'on doit peut-AStre s'y prendre afin d'élir un critère du sens et de décider par lA  de la mesure de l'attitude de tolérance A  adopter en présence de la démesure mASme de l'intolérance. Si cette définition, en effet, repugnait implicitement ou non, A  la reconnaissance et au respect élémentaire du fait existentiel, et si elle tendait A  imposer une idée de l'homme conforme A  ses utilisations ultérieures au mépris de l'expérience commune d'un tel fait d'exister, il y aurait lA  comme l'amorce d'un processus de négation du tout au profit de la partie qui peut ensuite déboucher sur des réductions et des aliénations bien plus terribles.
Par exemple, une religion que l'on embrasse et qui présupposerait que l'homme n'existe pas et ne mérite pas la reconnaissance ou (de faA§on latente, car ce n'est jamais formulé) n'appelle guère le respect en tant qu'homme, pourrait-elle se préloir d'AStre vraie et juste, de s'ordonner au sens de l'AStre, de la totalité de l'humain? DéjA , cette seule indication pourrait constituer un indice suffisamment grave d'intolérance inacceple aux yeux du droit. Or les religions classiques, les trois monothéismes, mASme si l'un deux peut reprocher A  l'autre de s'enfermer dans une vision trop unilatérale et exclusive, tous du moins, et principalement dans la vieille tradition judéo-chrétienne en Europe, obéissent A  des principes uni-versalistes qui adressent leur message A  tout homme en tant qu'homme et en tant que potentiellement membre ou adhérent de leur communauté religieuse de rattachement ; ils ne s'engagent pas, autrement dit, dans cette tendance politisante suivie malheureusement par tant de - sectes - qui ragent le sol européen et dont la visée est étroitement génériciste et d'exclusion : le groupe se constitue par opposition A  d'autres avec lesquels il se déclare en guerre impitoyable, jusqu'A  la soumission de ces autres qu'il ne juge pas digne d'une reconnaissance ou d'un respect tant qu'ils ne s'intégrent pas A  ses vues. Une religion vraie est universaliste et diffusive, une religion fausse ou politique est génériciste ou exclusiviste : elle est génériciste parce qu'elle préfère une définition conceptuelle de l'homme commandée par sa propre entité d'institution abstraite (l'homme n'aura donc pas d'AStre en dehors de son appartenance A  l'institution, et celle-ci le fonctionnalisera, l'aliénera), et elle rejette toute considération de l'homme réel et existant, dans ses attaches A  la communauté sociale d'un moment et d'un lieu dont il n'a pas forcément décidé ; elle est également exclusiviste, car le genre nie ici l'universalité de l'AStre réel de l'homme.
L'on pourra objecter A  ce raisonnement que la politique peut AStre facteur en ce mASme sens d'une forme d'intolérance analogue A  celle qui est ici dénoncée et qui appelle une réaction elle-mASme apparemment - intolérante - afin de rélir dans ses droits la personne dont elle affecte l'intégrité. Mais c'est oublier que si la politique incline A  s'autonomiser, son principe ne la fait pas moins dépendre d'un respect préalable du droit et de ce droit élémentaire qui s'attache A  l'intégrité existentielle.
Notre critère prosopologique est d'abord éminemment juridique : il fait préloir dans le débat sur la tolérance une référence au droit sur une référence au politique qu'il estime seconde et dérivée, parce qu'elle concerne l'homme en société au lieu de l'homme en soi, l'homme ressemblant au lieu de l'homme singulier. Et certes le droit regarde aussi l'homme sous le profil d'une certaine ressemblance, mais d'une ressemblance qui demeure ouverte au respect du singulier, de l'irréductible existentiel. C'est ce qui explique les transitions A  ménager entre des ordres qui sont impliqués les uns dans les autres, A  moins que le mécanisme de la participation ne justifie mieux encore les relations qui s'élissent entre eux. L'on passera ainsi d'un ordre éthique absolu où l'AStre personnel est considéré sous la dimension la plus élevée du don de lui-mASme, de l'activité créatrice et du témoignage de la culture, dans sa radicale et imprévisible liberté, A  un ordre où il doit coordonner son comportement avec tous ceux qui lui ressemblent au du droit, et A  celui enfin où cette coordination prend son aspect politique le plus matériel. Mais c'est bien ainsi un critère de vérité éthique qui se révèle, le critère d'une vérité exprimant le devoir-AStre de la personne, selon la connaissance objective qu'il est permis au philosophe d'en avoir. Une telle vérité éthique est transmise au droit et au politique qui chacun A  son degré respectif l'adapte aux exigences de la vie sociale.
La tentation du politique, relayé aujourd'hui par toutes les préoccupations économiques que l'on sait, serait de se détourner avec bonne conscience du siège authentique de la leur de justice en l'homme et de le reporter, sous prétexte d'obtenir la meilleure protection de ce dernier, sur ce qui n'a précisément aucun contenu humain ou personnel. Le politique alléguera les attentes de la communauté, de la collectivité, du bien public, de l'intérASt général Mais il ne renverra jamais par lA  qu'A  des rapports ou A  des relations sans indiquer ce que ces rapports ou ces relations unissent ou rattachent. Or la leur ne saurait se trouver sans artifice ou sans fiction très nominaliste dans le lien entre deux termes, un lien qui est second eu égard aux termes eux-mASmes. D'où la secondarité du discours politique appliqué aux rapports et relations de cette nature, tant qu'il n'aura pas auparant reconnu la fonction propre du droit, lui-mASme subordonné A  une instance éthique, dans son office de détermination d'une identité précise du sujet, de l'homme qui est mis en rapport ou en relation, et qui est le sous-jacent de la communauté ou de la collectivité Le bien commun est conditionnel et vide si l'on ne le ramène pas ensuite au bien de l'homme, ce qui en détourne la finalité, car il devient dès lors un bien instrumental et se trouve placé au service du bien substantiel et -personnel- qui le dépasse. En bref, le critère s'épuise A  vouloir AStre découvert dans une approche volontiers rhétorique du politique si ce politique s'engage dans des généralités sur ce qui est second (les relations sociales) sans assumer toujours lucidement ce qui est premier (l'homme impliqué dans les relations).


Mais il pourrait y avoir une démarche bien plus critiquable du politique, démarche de matérialisation ou de réification de la référence que le politique se propose A  travers le bien commun ou collectif. La dérive du critère recherché aboutit aux considérations sommaires de type pacifiste ou étatiste qui éliminent la discussion. Invoquer la nécessité de -l'ordre public- et corrélativement de la -paix publique- se comprend sans peine, dans la mesure où l'on s'adresse A  des moyens (aux forces répressives présentes en toute société), dans la mesure où le politique se charge d'assumer et de garantir le plus concrètement le droit quand il est menacé au degré le plus sensible et physique qui soit. Mais l'on ne résoud pas le problème de la tolérance par des justifications issues d'un discours sur les moyens qui n'est nullement porteur de sa propre justification.
Il ne s'agit pas de condamner le recours A  l'ordre et A  la paix publique, A  ce minimum de sécurité physique dans le respect au moins corporel des personnes, A  défaut duquel aucune société ne peut se maintenir et sans lequel il est in de vouloir réfléchir sur la tolérance. C'est cependant fausser les perspectives que de prendre en otage cette exigence dont nul ne saurait douter en tirant d'elle une justification suffisante et un critère de la tolérance. Car l'on saisit ainsi les choses sous leur aspect le plus lointainement second et, dans l'ordre des causes, l'on préjuge du rôle d'un facteur ontologique et moral en concurrence avec un facteur phénoménal et matériel. L'agression au physique ne tout de mASme pas déterminer ce que l'on doit penser de l'agression au moral du point de vue des limites de la tolérance. Ce sont les agressions morales qui permettent les agressions physique et non l'inverse. C'est parce que l'agression morale a germé dans sa conscience que le délinquant l'accomplit au physique. C'est donc dans les représentations vraies ou fausses de l'homme au moral qu'il faut chercher et scruter le critère du tolérable et non dans celles qui résulteraient de la conformité A  un simple ordre physique.
Il n'est pas nécessaire ici de rappeler que les sociétés totalitaires les plus oppressives ont su maintenir un ordre de paix extérieure et matérielle irréprochable. Ce seul signe de la paix extérieure n'est guère suffisant A  démontrer une absence d'injustice ou d'intolérance A  l'intérieur de l'ensemble visé !
Si l'on adopte toutefois un mode de raisonnement beaucoup plus inspiré du droit que du politique, l'on peut retomber dans les mASmes défauts. Ce sont ces défauts qui caractérisent l'empirisme ou le rationalisme. Ces tendances ont l'antage de poser le problème du droit, et de le poser enfin A  partir de l'homme lui-mASme. Mais justement la définition réductrice qu'elles sont amenées A  en donner fait glisser cet homme vers un aspect que l'on peut juger second de lui-mASme et qui le prépare A  s'intégrer A  ce schéma politisant où la relation, prise en elle-mASme, finit par l'emporter sur l'identité propre du terme qu'elle relie.
h'empirisme regardera l'homme A  travers le besoin, et une vision inévilement quantifiante de celui-ci conduira A  aligner le besoin de l'homme sur le besoin social et A  ramener ce besoin A  celui de la paix matérielle. A la racine, une éthique fonctionnelle du résultat influence alors le droit et le politique en justifiant A  la fois leur confusion progressive et l'autonomie d'une instance de pur calcul utilitaire, ce qui peut servir A  dissimuler A  un autre égard toutes les lésions de l'homme. C'est cette mASme éthique qui est au fond implicite A  travers la propension du politique A  s'affranchir du juridique.
Le rationalisme, quant A  lui, pourra présenter le tort sous l'angle prosopologique de ne définir l'homme que par sa relation au groupe qui lui permet d'entrer dans une généricité conceptuelle, tributaire d'une éthique formaliste, l'éthique qui gomme précisément la singularité métaphysique dont l'idée universelle lui ouvre le champ. Ce qui est universellement vrai, c'est bien au contraire que l'homme est un irrécusable existant, sans que l'on puisse savoir qui il est. Et la question de la tolérance devrait AStre plutôt de refuser de faire dépendre la protection de l'homme d'autre chose que de l'existence, et d'empAScher ou de censurer tout ce qui vise A  occulter ou A  diminuer cette certitude unique pour le philosophe, cette vérité qu'il peut juger seule capable de se préloir de l'universalité : la vérité du singulier ou de l'Autre en toute son acception platonicienne ou en toute sa portée recueillie par la théologie judéo-chrétienne.
Le rationalisme voit juste, mais pas encore assez juste s'il ne discerne que le point généricisable qui est fermé A  cet universel. L'on ne saurait lui reprocher d'essayer de fixer un critère de la tolérance qui conduise A  ce respect de l'homme que la raison peut saisir, c'est-A -dire de l'homme conceptuel et générique, étiqueté dans des catégories, celles dont use le juridique substantiellement, puis le politique au des modalités, les catégories du créancier, du propriétaire, du trailleur ou du citoyen La tolérance doit totalement assumer, sans restriction, cet aspect des choses. Mais lA  encore, cet aspect est très largement insuffisant. Et il est insuffisant s'il s'auto-nomise A  son tour, et s'il laisse surtout A  penser que le fondement du critère ou la justification ultime se trouve en lui. Il ne peut en AStre ainsi, car pas plus en l'occurrence que du point de vue empiriste, l'homme n'a son AStre dans ces simples - réalités - que découpe frag-mentairement dans son AStre la méthode empirique ou transcendan-tale de la raison. Ces réalités reflètent l'AStre mais ne sont pas l'AStre, et l'AStre n'est, prosopologiquement, que dans l'existant que captent l'idéation de l'esprit ou de l'intellect métaphysique : il n'est que dans l'universel, dans dans ce qui est un en toute pensée d'homme qui vit et aime et souffre et prend conscience de vivre et d'aimer et de souffrir, en relation avec des existants, des vints, irréductiblement singuliers comme lui. Cet homme sait bien que ce qui est vrai totalement, d'abord, de manière inconditionnée, métaphysique, c'est-A -dire que ce qui est -un- et par conséquent -universel- et idéal selon la pensée du philosophe, est dans cette perception si immédiate de l'AStre existentiel. Telle est d'ailleurs la perception inconsciente ou sous-jacente dans toutes les démarches de sa raison. Il sait bien que lorsqu'il applique A  une réalité humaine donnée la méthode empirique ou transcendantale, il ne suivrait pas cette démarche si l'évidence de l'AStre ne s'imposait pas obscurément A  lui pour pratiquer ensuite une réduction A  l'objectivité conceptuelle. Il nous semble que si la tolérance est élie sur la leur, sur le devoir-AStre qui correspond A  l'AStre existentiel de l'homme au moyen de l'idée universalisante, sans préjugé nominaliste éludant définitivement cette perspective métaphysique, les approches rationalistes et empiristes sont ensuite acceples comme étant prévenues contre toute dérae qui nierait l'AStre ou la vérité. En quoi il faudrait admettre que ces approches sont des approches, d'ailleurs complémentaires, A  caractère empirique, sans AStre empiristes, et rationnel, sans AStre rationalistes, qui reA§oivent le sens de la leur ou de la justification, c'est-A -dire du critère ultime de la tolérance, non d'elles-mASmes ou de leur objet, lequel est prisonnier d'une simple réalité, mais de plus haut : A  savoir de l'AStre. Et un tel critère n'a qu'une portée directive et non constitutive. Il ne peut pas commander les solutions en requérant une conformité parfaite A  ses exigences qui sont absolues; il doit accepter que ces solutions soient prescrites dans toute leur relativité par les instances secondes du droit et du politique qui participent de son sens au maximum de leurs possibilités et eu égard aux circonstances concrètes et historiques auxquelles il se trouve confronté.


C'est en quoi le critère de la vérité et de la leur échappe totalement A  l'effectivité. Ce n'est pas parce qu'une certaine tolérance, celle que dicte le principe prosopologique ancré dans l'idée de l'universel singulier est ineffective et difficilement praticable comme telle, qu'elle est pour autant fausse ou erronée. Elle peut suffisamment inspirer et orienter toutes les démarches empiriques et trans-cendantales de la raison qui permettent de faire ressortir des exigences de résultat et de forme de coexistence sans que ces exigences se prennent jamais pour des exigences absolues, pour auto-justi-fiées: elles participent de ce sens de l'AStre qui doit au moins les conduire A  se dépasser sans cesse dans l'insatisfaction permanente des solutions imparfaites et transitoires auxquelles elles donnent lieu.
La première limite est A  nos yeux celle de la vérité que procure cognitivement l'idée de personne humaine. Et elle peut viser A  ésectiuner toute prétendue vérité qui ne saurait se justifier au moins parti-cipativement et analogiquement par rapport A  cette vérité du fait existentiel, un fait qui n'est ni empirique ni rationnel.
La seconde limite tient aux fatales incarnations successives de la vérité prosopologique dans le droit et dans le politique. Elle signifie une limitation imposée par la contrainte des décisions A  prendre, des dispositions A  prévoir, quand il faut préférer la partie au tout et le moindre-mal au bien; une limitation qui reA§oit suffisamment sa justification d'AStre toujours guidée, au mieux des nécessités pratiques, par le sens de la vérité directive et totale, et par la volonté d'éviter une rupture radicale avec la direction qu'elle conseille sans pouvoir y forcer.
La tolérance épouse ces deux limites qui tiennent A  chaque fois au seul tolérable : A  la vérité, et A  toute cette vérité qui n'est acquise qu'en l'homme, et qui doit s'adapter aux conditions que réclament l'action concrète du juriste assumant le but de le protéger.


Résumé de presse

Les démocraties occidentales semblent engagées dans une philosophie du droit qui ne leur permet plus de résoudre de manière appropriée le problème contemporain de l'intolérance face aux montées de la xénophobie, du racisme ou de la haine religieuse, et face aux agressions inédites du terrorisme et du fondamentalisme.
Car cette philosophie du droit quasiment dominante et devenue traditionnelle, - malgré de prétendus dépassements par les théories jadis normativistes et aujourd'hui analytiques ou communicationnelles -, repose, directement ou indirectement, sur un idéalisme subjectiviste.
Or, par définition, un tel idéalisme implique en quelque sorte l'exclusion, la non existence de la personne humaine qui ne correspond pas ou qui n'est pas conforme A  un modèle de pensée commun ou A  un -consensus - de groupe. Cet idéalisme juge en effet délibérément par la forme qui identifie, catégorise et généralise, et il ne perA§oit jamais le contenu qu'A  l'intérieur de cette structure formelle (un contenu qui en appelait auparant aux facultés métaphysiques que le nominalisme occamien et le criticisme kantien ont bannies : A  l'intuition de l'esprit).
Au contraire, c'est une philosophie ou plutôt une métaphysique de l'entier contenu, c'est-A -dire de la réalité existentielle de la personne, qui est proposée ici afin d'aboutir A  un renversement caractéristique de la démarche intellectuelle.
Il s'agit de partir d'une donnée vécue, du respect de l'existant humain dans son intégralité, sans avoir A  se prononcer sur son -essence-, sur la catégorie ou sur le genre préalable dont il relève, pour aller ensuite au droit; et il s'agit en conséquence de refuser de partir des schémas hypothétiques que le droit impose A  l'homme réel et concret.
Mais les catégories et les genres, ou les classements que le droit utilise ne sont nullement A  ésectiuner: ils sont A  resituer dans leur cadre propre et limité qui s'élit dès que l'on s'est entendu sur une leur de justice centrée sur la personne. Les classements génériques du droit retrouvent donc leur sens après qu'ait été admise la nécessité de cette éthique ontologique et de cette leur primordiale attachée A  la personne vinte. L'éthique de la personne fixe, d'une part, un principe directeur ou orien-tateur; le droit retient, d'autre part, un principe constitutif de solutions; mais les solutions ne sont justes que par leur participation, inévilement relative, aux exigences du principe directeur.
Du point de vue des droits humains et de la tolérance, voilA  qui ne suscite aucune exclusion de l'AStre personnel. Le contenu de cet AStre personnel ut comme un critère suffisant de vérité et de justice. Les dispositions juridiques qui sanctionnent les manifestations de l'intolérance en dépendent, et le présupposent, mASme si elles n'en sont pas en toute rigueur déduites. La tolérance ne devrait plus alors permettre l'expression paradoxale et imprévisible de l'intolérance qui parvient A  se glisser dans des formes rationnelles ou empiriques en soi irréprochables. La tolérance doit requérir le respect non pas seulement de la forme, mais du contenu.
D'où la critique sans complaisance de la philosophie analytique libérale ou du thème de l'égalité des chances. Car, comme les horreurs historiques de l'intolérance au cours de ce siècle et encore dans l'actualité la plus récente l'ont montré, ce n'est pas l'égalité, ce n'est pas la relation qui peut justifier le droit, ce n'est pas la forme extérieure qui le protège non plus contre l'injustice. C'est la ferme et absolue référence A  la dignité des personnes qui doit justifier leurs relations ou la recherche d'une égalité juridique A  élir entre elles. Les théories de la justice, d'inspiration idéaliste, kantienne, utilitariste ou positiviste, doivent se considérer comme secondes par rapport A  la leur première de l'AStre humain qu'une métaphysique de l'expérience existentielle enseigne.





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