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ECONOMIE

L’économie, ou l’activité économique (du grec ancien οἰκονομία / oikonomía : « administration d'un foyer », créé à partir de οἶκος / oîkos : « maison », dans le sens de patrimoine et νόμος / nómos : « loi, coutume ») est l'activité humaine qui consiste en la production, la distribution, l'échange et la consommation de biens et de services. L'économie au sens moderne du terme commence à s'imposer à partir des mercantilistes et développe à partir d'Adam Smith un important corpus analytique qui est généralement scindé en deux grandes branches : la microéconomie ou étude des comportements individuels et la macroéconomie qui émerge dans l'entre-deux-guerres. De nos jours l'économie applique ce corpus à l'analyse et à la gestion de nombreuses organisations humaines (puissance publique, entreprises privées, coopératives etc.) et de certains domaines : international, finance, développement des pays, environnement, marché du travail, culture, agriculture, etc.


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La recherche d'une stabilisation des taux de change dans la communauté

L'intégration monétaire de la Communauté ne s'est imposée qu'avec la fin du système de Bretton Woods. Elle s'est construite à partir de 1979 dans le cadre du SME. Ce système a été un puissant outil de convergence des économies européennes ant de voir ses mécanismes de fonctionnement dévoyés et d'être secoué par des attaques spéculatives. Il a néanmoins retrouvé une nouvelle crédibilité dans la phase finale qui a préludé au lancement de l'euro.

Les premières tentatives d'intégration monétaire

Lors de la rédaction du traité de Rome (1957), les questions monétaires n'occupent qu'une place mineure. Le système issu de la conférence de Bretton Woods (1944) garantit la silité des changes au niveau international sur la base de quelques principes simples :
- un régime de change fixe par rapport au dollar avec des marges de fluctuation limitées à ± 1 % ;
- une convertibilité du dollar en or au taux de 35 dollars l'once ;
- la possibilité, peu utilisée en pratique, de réajuster les taux de change pour corriger les différentiels d'inflation et de compétitivité entre les économies.
C'est seulement à la fin des années 1960, avec les premières fissures dans le système international de taux de changes fixes, que la Communauté commence à envisager son intégration monétaire.

Le rapport Werner
En 1968, Raymond Barre, alors vice-président de la Commission européenne, propose dans un mémorandum une coordination accrue des politiques économiques, une fixation irrévocable des parités et la mise en place d'un soutien monétaire entre les États membres. À la demande du Conseil, Pierre Werner, le Premier Ministre du Luxembourg, présente en 1970 un rapport qui affine ces propositions et dont les grands axes seront repris près de vingt ans plus tard par le Delors.
Le rapport Werner programme la réalisation d'une Union économique et monétaire en trois étapes étalées sur une durée de dix ans. Il révoit le rétrécissement des marges de fluctuation entre les monnaies européennes, la libre circulation des mouvements de capitaux et insiste sur la nécessité de formuler des orientations communes de politique budgétaire, d'harmoniser la fiscalité et d'instaurer une coopération des politiques structurelles et régionales. Il aboutit in fine à la création d'un « centre de décision pour la politique économique » et d'un « système communautaire des banques centrales ». Les Six lanceront la première étape le 1er janvier 1971, soit quelques mois ant l'effondrement du système de Bretton Woods après la décision du président Nixon de suspendre la convertibilité du dollar en or le 15 août 1971. La crise monétaire internationale met fin à l'expérience. L'erreur du Werner aura été de garder la référence au dollar comme fondement de la fixité des taux de changes entre les monnaies européennes au moment même où elle était remise en question sur le international. Il pose néanmoins les principes de base sur lesquels s'appuiera le groupe de trail dirigé par Jacques Delors à la fin des années quatre-vingt quand sera lancée l'Union économique et monétaire.
Le système de Bretton Woods n'est pas néanmoins mort sans soubresauts : les accords du Smithsonian Institute du 18 décembre 1971 tentèrent de le sauver. Les rapports de parité entre les monnaies furent remis en ordre et les marges de fluctuation vis-à-vis du dollar portées à ± 2,25 %, soit une bande totale de riation de 4,5 % appelée « le tunnel ». La bande dérivée potentielle était de 9 % pour les taux de change bilatéraux entre des monnaies autres que le dollar '. Le risque de change (Encadré 1) qui en résultait parut trop important aux Européens. Deux domaines risquaient d'être désilisés par les mouvements monétaires :
- les échanges commerciaux en biens et services, peu de temps après la mise en place de l'union douanière ;
- la politique agricole commune fondée sur le principe d'un prix unique pour l'ensemble du marché commun agricole qui s'accommodait mal des riations monétaires.


Le serpent monétaire

Suite aux accords de Bale, les Six, ainsi que le Royaume-Uni, le Danemark et l'Irlande, en voie d'entrer dans la Communauté au 1er janvier 1973, conviennent de rétrécir les marges de riations entre leurs monnaies à 2,25 % à partir du 24 avril 1972. Ce régime de change qualifié de « serpent » s'insère dans la bande de fluctuations à ± 2,25 % vis-à-vis du dollar. Le serpent ondule dans le tunnel deux fois plus large (Graphique 1 ). Ce système suppose des interventions des banques centrales sur le marché des changes lorsque leur monnaie glisse en dehors du serpent ou s'éloigne de sa parité vis-à-vis du dollar. Il se montre d'emblée extrêmement fragile : le Royaume-Uni et l'Irlande s'en retirent en juin 1972 et l'Italie en février 1973.
Au niveau international, le système de Bretton Woods se délite définitivement, en mars 1973, avec le passage aux taux de change flottants qui sera ratifié par les accords de la Jamaïque de janvier 1976. Le serpent continue de fonctionner mais il est privé de tunnel. La création du Fonds européen de coopération monétaire (FECOM), le 3 avril 1973, pour consolider le système de change européen, n'évite pas la défection du franc français en 1974 qui, malgré un retour en 1976, sort à nouveau et définitivement du mécanisme de change la même année. Le serpent se réduit à une simple zone mark (deutschemark, florin, franc belge, couronne danoise). Cet échec du serpent est impule à plusieurs facteurs :
- les riations du dollar qui est le point d'ancrage du système et sur lequel les pays européens ont peu de prise. Avec l'instauration des changes flottants les États-Unis inaugurent leur politique du « benign neglect », c'est-à-dire « d'indifférence bienveillante » vis-à-vis du cours de leur monnaie. La défense de la parité du dollar incombe aux banques centrales étrangères qui finiront par refuser ce soutien inconditionnel ;
- l'asymétrie du système qui fait peser l'effort de défense des parités sur les monnaies les plus faibles tandis que les monnaies fortes sont dédouanées de toute contribution ;
- la divergence des politiques et des performances macro-économiques des États membres au lendemain du premier choc pétrolier. Si la République Fédérale d'Allemagne (RFA) privilégie la lutte contre l'inflation, la France donne la priorité à la lutte contre le chômage.

Le SME

Le Système monétaire européen (SME), instauré le 13 mars 1979, a tenté de dépasser ces écueils en créant une zone de silité des changes qui s'autonomise par rapport au dollar. Il a fonctionné jusqu'au 31 décembre 1998 à partir d'une monnaie européenne commune, l'écu, et d'un mécanisme de change renforcé qui instaurait une symétrie des obligations entre tous les pays participants autour de changes fixes mais ajusles.

L'écu
L'écu était la monnaie commune du système. Elle évoquait pour les francophones une pièce médiéle tout en étant pour les anglophones l'acronyme de « European Currency Unit ». L'écu était une monnaie atypique à la fois dans sa structure interne et de par les fonctions qu'elle remplissait.


a) Une monnaie panier

L'écu se définissait comme un panier de onze monnaies. Le franc belge et le franc luxembourgeois comptaient pour une seule et même monnaie dans la mesure où ces deux pays étaient en union monétaire. Le panier ayant été gelé le 1er novembre 1993, conformément au traité de Maastricht, les monnaies de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède n'aient pas pu y être intégrées.
Le nombre d'unités de chacune des monnaies qui entraient dans la composition de l'écu ait été arrêté en fonction du poids économique de chaque État membre et de sa part dans le commerce intra-commu-nautaire (Tableau 1). Le nombre d'unités inclues dans l'écu et le cours de l'écu dans une monnaie nationale permettait de déterminer le poids d'une monnaie dans l'écu. Au 16 mars 1998, l'écu comprenait, par exemple, 1,332 FF et son cours était de 6,63 FF. Dès lors, la part relative du franc dans l'écu, exprimée en pourcentage, était de 100 x (1,332/6,63) = 20,1%.
Le poids d'une monnaie dans l'écu riait par conséquent en fonction de son taux de change vis-à-vis de l'écu. Il augmentait pour une monnaie qui s'appréciait par rapport aux autres monnaies et à l'écu. 11 diminuait dans le cas contraire. Si le deutschemark, le franc français et la livre ont vu leurs poids dans l'écu progresser jusqu'au 16 mars 1998, la lire et la peseta se sont par contre dépréciées. Pour corriger ce type de dérive, la composition de l'écu était révisée tous les cinq ans afin de rélir le lien entre la part d'une monnaie dans l'écu et l'importance économique du pays émetteur. Ces révisions permettaient en outre d'intégrer les monnaies des nouveaux pays adhérents. La dernière révision datait du 21 septembre 1989. Depuis que le panier a été gelé, ces corrections n'ont plus été possibles. L'écu s'est dès lors renforcé mécaniquement puisque les gains des monnaies les plus fortes au sein du panier n'étaient plus régulièrement annulés. Cependant, il a toujours été, de par son mode de calcul, moins attractif que la monnaie forte du SME, le deutschemark. Les atouts et les limites de l'écu tenaient précisément à son caractère de moyenne pondérée de onze monnaies : son évolution était par construction plus sle que celle des monnaies qui le composaient.

b) Une monnaie atypique
L'écu ne remplissait qu'imparfaitement les attributions classiques d'une vérile monnaie : unité de compte, réserve de changes, instrument de réserve de leur et instrument de transaction.
• L'écu tenait lieu d'unité de compte à l'Union européenne. Il ait succédé dans cette fonction à l'Unité de compte européenne (UCE), créée en 1974 pour l'élissement du budget communautaire, et qui était déjà une moyenne pondérée d'un panier de monnaies.
• Sa fonction d'instrument de réserves des banques centrales pour leurs interventions sur le marché des changes, à travers l'écu dit « officiel », était par contre symbolique. L'écu officiel était émis par le FECOM. Les banques centrales qui participaient au mécanisme de change receient, en contrepartie du dépôt de 20 % de leurs réserves en or et en dollars, des crédits en écus d'une durée de trois mois. Les émissions d'écus dépendaient des réserves détenues par les banques centrales en dollars et en or et de leur cours. L'écu n'ait pas d'existence propre : il constituait une autre dénomination pour l'or et les dollars détenus par les banques centrales. Dans la pratique, le deuts-chemark assumait la fonction de monnaie de réserve au sein du SME.
• L'écu en tant qu'instrument de réserve de leur et qu'instrument de transaction a été qualifié d'écu « privé ». Il a été imposé à la fin des années quatre-vingt par les pratiques des agents économiques. Les administrations, les entreprises et les institutions financières ont eu de plus en plus recours à l'écu dans leurs financements et dans leurs règlements commerciaux, de façon à réduire les risques de change liés à l'usage d'une monnaie particulière.
Pour faciliter le fonctionnement de ce marché privé de l'écu, une chambre de compensation de l'écu privé ait été créée en 1985. Elle était gérée par l'Association bancaire pour l'écu (ABE) et fonctionnait dans le cadre de la Banque des règlements internationaux (BRI), c'est-à-dire indépendamment du FECOM. La séparation était nette entre le circuit de l'écu privé et le circuit de l'écu officiel : l'un était créé par le marché pour les transactions financières et commerciales, l'autre était créé par une institution officielle pour les banques centrales.
Le développement de l'écu privé a donné un temps l'impression que l'écu s'imposait peu à peu comme un instrument de réserve de leur grace à la création de multiples produits bancaires et financiers. La crise du SME de 1992-l993, en suscitant la défiance des agents économiques, a provoqué l'effondrement de l'usage de l'écu comme instrument de financement et de placement. Les émissions d'obligation en écu, par exemple, qui aient dépassé les 30 milliards en 1991 (Graphique 2) ont chuté à 11 milliards d'écu en 1996. Elles ont été profondément affectées par l'onde de choc consécutive à la crise de 1992-l993. Le passage à l'euro a fortement réactivé le marché obligataire en écu. Après une légère reprise en 1997, avec près de 18 milliards d'obligations émises en écus, 1998 marque un net décollage du marché à plus de 90 milliards. En fait, la plupart des émissions obligataires ne s'étaient pas faites seulement en écu puisqu'elles possédaient une clause de conversion en euro. Elles manifestaient les bonnes anticipations des agents économiques à l'égard de la nouvelle monnaie.
L'usage de l'écu en tant qu'instrument de transaction, pour libeller, facturer et payer les transactions intra-communautaires privées, a été estimé par l'ABE1, en 1994, entre 6 et 11 % des échanges entre les Douze, soit une utilisation significative. Dans la pratique, l'écu était aussi l'instrument de référence du mécanisme de change.


Le mécanisme de change (MCE)

Toutes les monnaies n'ont pas participé au mécanisme de change qui est resté en place jusqu'à la fin 1998. La couronne suédoise ne l'a ainsi jamais intégré. La livre sterling a suspendu sa participation après seulement deux années d'adhésion, tandis que la lire s'est mise en congé du mécanisme pendant quatre ans. En outre, ce n'est que très progressivement que les élargissements successifs de la Communauté se sont traduits par l'adhésion des monnaies des nouveaux États membres à ce mécanisme de change fondé sur quatre éléments :
— Le rattachement des monnaies adhérentes à l'écu par un cours pivot dont le croisement permettait de déterminer une grille de cours pivots bilatéraux. Pendant longtemps, les fluctuations des monnaies n'excédaient pas une marge de ± 2,25 % de part et d'autre des cours pivots en écus. Les pays pouient opter pour une fourchette plus souple à ± 6 % de façon à tester leur taux de change d'équilibre par rapport aux autres devises du système, sans être confrontés immédiatement à des butoirs trop contraignants. L'Italie sera le seul pays à choisir cette option lors du lancement du système mais par la suite tous les nouveaux entrants adopteront cette option. Au 2 août 1993, les marges de fluctuation ont été portées à ± 15 %.
- Une symétrie des obligations d'interventions sur les marchés lorsque le taux de change entre deux monnaies atteignait les limites des marges de fluctuation autorisée (interventions « aux limites »). La grille de cours pivots permettait de déterminer automatiquement les monnaies en opposition aux extrémités des marges. Les deux banques centrales concernées deient alors simultanément intervenir pour corriger leurs cours. La monnaie forte était vendue sur le marché contre la monnaie faible. Les interventions étaient par contre discrétionnaires lorsque le taux de change était à l'intérieur des marges (interventions « intra-marginales »).
- La mise en place d'un soutien financier entre les banques centrales pour financer leurs interventions sur le marché des changes. Elles étaient certes financées classiquement par prélèvement sur leurs réserves de change mais aussi, de façon plus notrice, par des crédits à court et à très court terme que se consentaient les banques centrales pour des montants en principe illimités, les accords de « swaps » '. Ces ances constituaient une vérile mutualisation des soutiens pour faire face aux crises de change. Le FECOM compilisait les dettes et les créances entre les banques centrales qui résultaient de ces accords. Il pouit, si les crédits s'avéraient insuffisants, accorder également un swap à moyen terme à partir des réserves de change qu'il détenait. Son fonctionnement était calqué sur celui du FMI à l'échelle internationale.
- La possibilité de réajuster les cours pivots, sous la forme de déluation ou de rééluation, afin de prendre en compte l'inégalité des performances en matière d'inflation et les chocs spécifiques à un pays. L'originalité et l'efficacité du SME a longtemps tenu en l'existence de ce système de « parités fixes mais ajusles » qui favorisait la convergence des économies en permettant de dédramatiser les modifications éventuelles des cours pivots. Les déluations et les rééluations corrigeaient en partie le différentiel d'inflation accumulé entre un pays et les autres adhérents au mécanisme de change afin de restaurer sa compétitivité. Ces réalignements monétaires deient faire l'objet d'un accord à l'unanimité entre les ministres de l'économie et des finances des États membres (Conseil Écofin). Cette négociation des parités ait pour but que les taux de change soient aussi proches que possible du point d'équilibre théorique en empêchant toute sous-éluation ou toute suréluation manifeste du point de vue commercial.

Les mutations du SME

Le fonctionnement du système a été insensiblement dévoyé. Le rattachement des monnaies à l'écu par un cours pivot n'a pas empêché le deutschemark de s'imposer comme la monnaie de référence du mécanisme de change, donnant à la Banque centrale allemande un rôle central dans les interventions. Or la Bundesbank ne s'est pas pliée systématiquement à l'obligation de symétrie des interventions sur le marché, dès lorsqu'une monnaie atteignait l'extrémité de la bande de fluctuation par rapport au deutschemark. Elle n'a pas dantage conçu sa politique monétaire en fonction des besoins de l'ensemble des économies adhérentes au mécanisme de change dans un contexte de grande divergence de leurs situations conjoncturelles. Ces dysfonc-tionnements ne pouient permettre le maintien d'un système de change quasi-fixe : le SME est devenu un système de changes plus flexible. Le scénario initialement esquissé pour le passage à l'euro en a été quelque peu modifié.

L'asymétrie du système : l'ancrage sur le deutschemark
Le leadership du deutschemark au sein du SME s'était imposé du fait de la puissance de l'économie allemande qui représentait 30,3 % du PIB communautaire à la fin des années 80. La monnaie de l'économie dominante devient souvent la monnaie-ancre. Ce phénomène s'était d'autant accentué, dans le cas de l'Allemagne, que son poids monétaire excédait son poids économique en raison de deux facteurs :
- le deutschemark était, d'une part, la monnaie qui bénéficiait des meilleurs antécédents en matière de silité des prix. Il jouissait à ce titre de la confiance des opérateurs et ait le statut d'une monnaie forte, c'est-à-dire que sa réputation et sa crédibilité n'étaient plus à faire ;
- le deutschemark était, d'autre part, la seule monnaie européenne à avoir un statut de monnaie de réserve et de facturation internationale. Il était substituable au dollar et au yen. À la fin de 1995, selon le FMI, 61,5 % des réserves officielles mondiales étaient libellés en dollar, 14,2 % en deutschemark, 8,5 % en yen, 3,8 % en livre sterling, 2,1 % en franc français et 1,1 % en franc suisse. Le dollar facturait aux alentours de 40 % du commerce mondial contre 10 % pour le deutschemark. Le couple dollar/mark était le plus traité par les opérateurs dans les transactions quotidiennes sur le marché des changes ' (25 % des transactions) dent le couple dollar/yen (20 %).
Cette crédibilité et ce statut international du mark en faisaient un point d'ancrage par rapport auquel les autres monnaies du SME étaient amenées à se situer. L'Allemagne définissait le taux de change de la zone vis-à-vis de l'extérieur. Le mark subissait les jeux de report des opérateurs qui faisaient que lorsque le dollar était affaibli, le mark ait tendance à s'apprécier, créant ainsi des tensions au sein du SME. Cette suprématie du deutschemark n'a pas permis le respect de la symétrie formelle des obligations d'intervention qui était initialement prévue dans le cadre du mécanisme de change du SME. Les pays à monnaies faibles se sont retrouvés le plus souvent seuls lors des interventions intra-marginales. La Bundesbank répugnait à intervenir pour vendre des marks, afin d'en faire baisser le cours1, parce qu'elle craignait les risques inflationnistes associés à l'augmentation de sa masse monétaire et qu'elle ne souhaitait pas cautionner, par son intervention, des politiques économiques parfois peu rigoureuses et des ajustements de change jugés sur le fond inélucles. Par conséquent, la banque centrale de la devise affaiblie engageait bien souvent seule l'intervention intra-marginale. Le SME, à l'image du serpent, a fonctionné de façon asymétrique, c'est-à-dire que la charge de la silité monétaire pesait exclusivement sur les pays dont les monnaies étaient attaquées.
Au leadership allemand en matière de politique monétaire répondait une perte complète de souveraineté monétaire pour les autres pays adhérents au SME. Leur unique objectif de politique monétaire, comme dans tout système de parité fixe, était de défendre leur parité vis-à-vis de la monnaie-ancre, d'où la spécialisation pendant longtemps de l'instrument du taux d'intérêt dans la gestion du taux de change. C'est sur ce que résidait l'asymétrie fondamentale du système. Alors que l'Allemagne définissait de facto la politique monétaire et la politique du change du bloc monétaire européen, il n'entrait pas dans les missions de la Bundesbank de conduire sa politique en fonction de l'ensemble des besoins de la zone. Sa mission constitutionnelle était de défendre la silité monétaire, c'est-à-dire de protéger le mark de l'inflation. Ce déphasage d'objectifs a entrainé les autres pays membres du SME à suivre parfois une politique monétaire en inadéquation avec leurs besoins du moment.

Le passage de changes quasi fixes à des changes quasi flottants
Depuis sa création le 13 mars 1979, jusqu'à sa fin le 31 décembre 1998, le SME s'est profondément transformé. Il a imposé ses contraintes aux politiques économiques des Etats adhérents en les obligeant à s'engager dans une désinflation en profondeur de leurs économies. Son évolution peut être décomposée en cinq phases (Tableau 3).
1e phase : de 1979 au 12 janvier 1987. Les parités réelles entre les monnaies se cherchent, les réajustements sont fréquents (onze en huit ans), les taux d'inflation et les politiques économiques divergent nettement entre les différents pays de la Communauté. Néanmoins, le binôme France-Allemagne se renforce depuis le choix fait en 1983 par la France de maintenir le franc dans le SME et de s'orienter vers une politique « vertueuse » de désinflation compétitive. Le SME est l'outil qui contraint à la convergence les politiques économiques françaises et allemandes.
2e phase : du 12 janvier 1987 au 13 septembre 1992. Le SME connait une période de silité. La parité pivot entre le franc français et le deutschemark n'est pas réaménagée pendant plus de cinq ans. On est passé à une quasi fixité des changes entre les deux pays qui permet de réduire leur différence de taux d'intérêt à court terme. La France et l'Allemagne crédibilisent ainsi le SME comme un outil de convergence des politiques économiques et comme un pôle de silité monétaire. À partir de 1989, de nouveaux pays rejoignent le SME pour profiter de la crédibilité et de la quasi fixité du change acquise afin de maitriser leur inflation :
- le 19 juin 1989 la peseta entre dans le SME avec des marges de fluctuation de ± 6 % ;
- le 8 janvier 1990 la lire, déjà adhérente au système de change, rétrécit ses marges de fluctuation de ± 6 à ± 2,25 % ;
- le 8 octobre 1990 la livre britannique y adhère à son tour avec des marges de ± 6 % ;
- le 6 avril 1992 l'escudo rejoint enfin le SME avec des marges de ± 6 %.
La drachme est alors la seule monnaie des Douze à rester en dehors du mécanisme de change. Par ailleurs, la Norvège en octobre 1990, la Suède en mai 1991 et la Finlande en juin 1991 rattachent unilatéralement leur monnaie à l'écu, tandis que l'Autriche lie la sienne au deutschemark.
3e phase : du 13 septembre 1992 au 2 août 1993. Le SME est en crise. Les nombreuses modifications qui interviennent dans le système témoignent de la gravité de cette crise :
- la lire et la livre sterling suspendent leur participation au mécanisme de change le 17 septembre 1992 pour flotter ;
- cinq réajustements de parité peuvent être décomptés en l'espace d'un an ;
- les autorités monétaires esnoles, portugaises et irlandaises rélissent transitoirement des mesures de contrôle des mouvements de capitaux ;
- le franc français et la couronne danoise font l'objet de plusieurs attaques spéculatives ;
- trois des monnaies périphériques au système, le mark finlandais, la couronne suédoise et la couronne norvégienne, renoncent à leur rattachement unilatéral à l'écu suite aux pressions des marchés et laissent flotter leurs monnaies.
Le déroulement de cette crise montre l'importance des forces centrifuges à l'œuvre. Les opérateurs se sont d'abord focalisés sur les devises nordiques affaiblies par les difficultés de leur secteur bancaire et qui ne bénéficiaient pas de la protection offerte par le mécanisme de change du SME. Ils se sont ensuite portés sur les devises qui souffraient des déséquilibres économiques les plus marqués (la lire, la livre et la peseta). Enfin, avec l'aggration de la crise et l'augmentation des gains apportés par la spéculation, ils se sont tournés vers les devises dont les fondamentaux économiques paraissaient bons (le franc français et la couronne danoise).
La 4e phase : le 2 août 1993. Pour enrayer les attaques spéculatives, les marges de fluctuation du mécanisme de change sont portées, de ± 2,25 % à ± 15 %. Avec des possibilités de riation de 30 %, les monnaies européennes évoluent dans un système de change quasi flottant. Il y a mise en place d'un nouvel SME. L'élargissement de la bande de fluctuation a redonné aux banques centrales de nouvelles marges de manœuvre stratégiques et a créé à nouveau du risque pour la spéculation. Néanmoins, cet élargissement de la fourchette faisait courir un triple risque à la construction européenne :
- un risque de renationalisation de la politique économique et de conduite d'une politique économique non coopérative rendue possible par les nouvelles marges de manœuvre ouvertes par le change ;
- un retour du risque de change pour les entreprises et pour la politique agricole commune (la PAC). L'unité du marché unique et du marché agricole est remise en question par les mouvements de change au moment où précisément le grand marché et la nouvelle réforme de la PAC se mettent en place ;
- un risque quant à la transition du SME à l'UEM. La consolidation du SME était l'outil intégrateur qui préludait au passage à l'euro. Un scénario qualifié « du couronnement » prévoyait un resserrement progressif de la fourchette de riation jusqu'à ce que les États se retrouvent en change fixe. Cette transition douce à l'union monétaire est fragilisée. Le retour de la lire et de la livre sterling au système de changes flottants montrent que la sortie naturelle du SME n'est pas nécessairement une sortie par le haut avec l'union monétaire. Une possibilité de sortie par le bas prend corps avec tous les risques qu'elle représente quant à la poursuite du processus d'intégration européenne.
5e phase : du 2 août 1993 au 31 décembre 1998. Les scénarios les plus pessimistes ne se sont pas matérialisés. Il a été simplement procédé à deux réaménagements techniques : la déluation de la peseta et de l'escudo le 5 mars 1995 et la rééluation de la livre irlandaise le 16 mars 1998. Le nouvel SME a permis une transition en douceur vers l'euro :
- en offrant, d'une part, un cadre institutionnel pour apprécier la volonté des États de traiter leur politique de change comme un problème d'intérêt commun. L'appartenance au mécanisme de change du SME depuis au moins deux ans demeurait en effet l'un des critères de qualification à l'euro (art. 121 CE [art. 109 J]). L'adhésion du schilling autrichien, le 9 janvier 1995, du mark finlandais, le 12 octobre 1996, et le retour de la lire italienne, le 24 novembre 1996, ont permis à ces pays d'être partie prenante à l'union monétaire . Dans la perspective d'une intégration future à la zone euro, la drachme grecque a rejoint le mécanisme de change le 16 mars 1998 ;
- en permettant, d'autre part, une convergence des taux de éhange. Aucun pays adhérent au nouvel SME n'a mis à profit l'élargissement de la bande pour relacher sa politique monétaire. Tout s'est passé comme si les banques centrales obserient implicitement une fourchette de riation étroite en s'interdisant d'avouer cet objectif et d'être par conséquent contraintes de le défendre sur le marché des changes. L'élargissement de la bande de fluctuation a permis paradoxalement aux monnaies de resserrer progressivement la bande réelle à l'intérieur de laquelle elles évoluaient de 1,23 %, au cours de l'été 1998 (la drachme exclue), à 0,75 % le 30 septembre et 0,30 % le 30 octobre. Le scénario « du couronnement » a joué in fine avec un tel resserrement des taux de change au sein du SME que les États concernés se sont retrouvés sans heurt en union monétaire.
Le 3 mai 1998, les cours pivots bilatéraux du mécanisme de change du SME ont été choisis par le Conseil Écofin afin de fixer les rapports entre les monnaies des onze pays qualifiés, prises deux à deux, qui soient cohérents avec leurs fondamentaux économiques. Les banques centrales étaient prêtes à les garantir sur les marchés mais le besoin ne s'en est pas fait sentir dans un environnement financier international pourtant très insle (fin de la crise asiatique, crise russe, début de la crise brésilienne), ce qui montre la crédibilité qui ait été atteinte par le passage à l'euro.



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