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MARKETING

Le marketing, parfois traduit en mercatique, est une discipline de la gestion qui cherche à déterminer les offres de biens, de services ou d'idées en fonction des attitudes et de la motivation des consommateurs, du public ou de la société en général. Il favorise leur commercialisation (ou leur diffusion pour des activités non lucratives). Il comporte un ensemble de méthodes et de moyens dont dispose une organisation pour s'adapter aux publics auxquels elle s'intéresse, leur offrir des satisfactions si possible répétitives et durables. Il suscite donc par son aspect créatif des innovations sources de croissance d'activité. Ainsi l'ensemble des actions menées par l'organisation peut prévoir, influencer et satisfaire les besoins du consommateur et adapter ses produits ainsi que sa politique commerciale aux besoins cernés.


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Le publicitaire ou pourquoi philippe michel a marqué ce métier comme personne

Le publicitaire ou pourquoi philippe michel a marqué ce métier comme personne
La vie n'est qu'une succession de rencontres, celles que l'on proque et celles qui adviennent naturellement. Certaines de ces rencontres sont déterminantes. Celles qui ont marqué ma vie professionnelle se comptent sur les doigts d'une main. La première eut lieu en janvier 1971.
Je sortais de HEC et cherchais un premier emploi. Allen Chevalier, l'un des patrons de Dupuy Compton, décida de m'engager. Avant de m'enyer mon contrat, il me demanda de - remplir une formalité - : rencontrer le directeur de création. J'ignorais le rôle d'un directeur de création, ce qui n'était pas grave, puisque ce rendez-us ne devait AStre qu'une formalité.
Rendez-us fut pris le surlendemain A  16 heures. Juste avant que la réceptionniste me propose de monter, quelqu'un d'autre se présenta A  la réception. Il avait lui aussi rendez-us A  16 heures ! Un peu inquiet, soupA§onnant que mon interlocuteur allait expédier notre réunion en quelques secondes, je grimpai les cinq étages me séparant de lui et découvris le bureau qui serait le mien quelque temps après.
Ses lunettes étaient petites, rondes et cerclées. Ses cheveux tombaient sur ses épaules. Il se tenait droit, assis derrière une le en chASne de dix centimètres d'épaisseur, mystérieux et distant. Se dégageait de lui une personnalité A  la fois forte et troublante. Je compris vite que je m'étais trompé. Cet homme était important. Il s'appelait Philippe Michel, et je rencontrai ce jour-lA  la quintessence du publicitaire.
Il me reA§ut théatralement. Nous parlions des annonces accrochées A  son mur quand le téléphone sonna. La réceptionniste expliqua que l'autre visiteur s'impatientait. Philippe posa le combiné sur la le, me regarda fixement, attendit quelques secondes, reprit le combiné et demanda A  la réceptionniste de faire monter son - prochain rendez-us -. Je n'avais probablement pas réussi mon entretien, et un travail qui m'intéressait allait me passer sous le nez. Alors que je remachais mes idées noires, Philippe me dit : - Vous allez receir ce visiteur A  ma place. - Interloqué, je n'eus pas le temps de demander des explications : on frappait A  la porte. Philippe ne réagit pas, attendant que je dise : - Oui, entrez ! - La suite n'est plus que brouillard dans ma mémoire. Je me souviens juste d'air interviewé en présence de Philippe, qui n'a pas ouvert la bouche, un garA§on qui produisait des courts métrages. Ce dernier n'a sûrement rien compris.
Cet entretien d'embauché peu conventionnel n'aurait pas vraiment d'intérASt si, par un concours de circonstances, je n'avais succédé A  Philippe seize mois plus tard. Je me suis retrouvé assis pour cinq ans derrière l'épais bureau en chASne, les cheveux jusqu'aux épaules, moi aussi, mais sans les lunettes ni la réputation. J'avais tout juste vingt-cinq ans.
Plus tard, j'ai demandé A  Philippe s'il avait souvent joué A  ce jeu pervers. Il m'a toujours affirmé ne l'air fait que ce jour-lA .
Les années ont passé, Philippe est devenu mon ami. Il en avait beaucoup. Et puis, un sale jour d'été corse, il nous a quittés prématurément. Les jeunes publicitaires d'aujourd'hui méconnaissent A  quel point ce métier est orphelin de lui. Il était la référence, le modèle A  suivre, celui qui rendait la publicité intelligente. Souvent, chacun de nous se demandait, face A  un problème nouveau : que ferait Philippe dans ce cas-lA  ? Nous nous impatientions des nouvelles productions de son agence, comme nous attendons les prochains livres de nos auteurs préférés. Chacune d'entre elles ' qu'elle soit pour Eram, Levi's, Kookaï ou Total ' nous enchantait.
Jubilatoire était son adjectif préféré. Il y a vingt-cinq ans, en 1981, il avait ravi la France entière avec la camne Avenir. Cette société d'affichage souhaitait démontrer la fiabilité de ses services. La première affiche montrait Myriam, une jeune modèle photographiée en maillot de bain sur une plage, les mains sur les hanches et déclarant : - Le 2 septembre, j'enlève le haut. - Le jour venu, nouvelle affiche. Comme promis, Myriam montrait ses seins, mais promettait cette fois - d'enlever le bas -. La dernière affiche la montrait nue, de dos, avec pour slogan : - Avenir, l'afficheur qui tient ses promesses -. Trois fois en une semaine, les panneaux furent changés dans tout le pays, démontrant la rapidité d'intervention de la société d'affichage.
Philippe aurait adoré toutes les possibilités que les nouveaux médias nous offrent aujourd'hui, ces croisements improbables, ces conjugaisons insolites, ces collisions impromptues. Il aurait jubilé.
Quelques mois après sa disparition, l'Association des agences a décidé d'organiser une commémoration au musée des Arts décoratifs, dans l'aile nord du Louvre. Deux autres grands publicitaires avaient disparu peu de temps auparavant, Bill Bernbach et Marcel Bleustein-Blanchet. Bernard Brochand fit l'éloge du premier, Maurice Lévy du second. A€ la demande d'Isabelle, sa femme, je fis celui de Philippe.
J'ai prononcé de nombreux discours dans ma vie. Avec le temps, j'ai appris A  me détendre. Venir parler devant plusieurs centaines de personnes ne m'impressionne plus. Sauf que, ce jour-lA , quand, derrière mon pupitre, j'ai levé les yeux vers l'assistance et croisé les regards de la femme, du fils et de la mère de Philippe, ma gorge s'est nouée. Je ulais AStre sûr de bien transmettre mon enthousiasme et mon admiration pour l'homme qu'ils aimaient.
Voici comment j'avais commencé :
Je viens us parler de notre ami Philippe. Chacun d'entre nous sait combien il a donné A  notre métier. Il y a quelque temps, Marcel Bleustein-Blanchet a dit de lui qu'il avait un talent inable. Il est vrai que Philippe a eu longtemps raison avant tout le monde. Beaucoup l'ont suivi, et, comme il aimait lui-mASme le noter, * l'époque a fini par le rejoindre -. Je suis donc très honoré de us dire ce soir quelques mots sur tout ce qu'il nous a apporté.
Philippe était la procation mASme. Il connaissait A  l'avance le spectacle qu'on attendait de lui. La première fois qu'il les rencontra, Philippe salua les responsables de Leclerc d'un retentissant : - Messieurs les ayatollahs, bonjour ! -. Si l'apostrophe est célèbre ' elle en a frappé plus d'un '> l'anecdote est révélatrice : Philippe était un agitateur d'idées, un esprit corrosif et subversif, qui n'aimait rien tant que désiliser, renverser l'ordre des choses.
Ce côté iconoclaste, son art du contre-pied étaient peut-AStre les traits les plus apparents de son caractère. Mais le plus important était ailleurs. Philippe était curieux de tout et de tous. Il s'intéressait sincèrement aux autres. Il ulait connaitre leur moteur, sair ce qui les poussait. Conséquence : personne ne savait autant donner l'envie de se dépasser. Il savait entrainer ceux qui le côtoyaient sur des chemins inexplorés. LA  où, face A  l'inconnu, chacun se révèle.
Un nombre invraisemblable de talents ont éclos grace A  lui. Jean Feldman a dit A  ce propos, très joliment : * C'était la boite sur laquelle se frottaient les allumettes. -
Philippe préparait un livre. Anne Thévenet, sa confidente, recueillait ses pensées. Ce livre sera peut-AStre publié un jour. On y lira quelques aphorismes. J'en ai retenu un pour us : * L'idée est quelque chose dont on aie désir de se souvenir. - J'aime cette irruption du désir dans la mémoire. C'est ainsi que marche la publicité. L'inattendu crée le désir de se souvenir.
On connait la quASte insatiable de l'idée qui était sienne. Quoi qu'on lui montre ou lui propose, un projet, une création, une stratégie, une seule question l'intéressait, le taraudait : - C'est quoi l'idée ? -
A force de demander, il a fini par en donner cette très belle définition, qui relie la mémoire au désir. C'est vrai que la publicité est un catalyseur de souvenirs. Elle crée une mémoire A  la fois intime et collective. De lA  vient que nous nous souvenons tous de Myriam.
Dans le mASme discours, je soulignais que, pour Philippe, la publicité est un - objet mental -, lequel crée une déflagration dans le cerveau, faisant le vide autour de lui et laissant la place A  l'idée nouvelle. A€ une époque où tout le monde parlait d'image de marque, de capital de marque, de comment construire une image, il aimait répéter : - La publicité n'est pas lA  pour donner une image, la publicité est lA  pour donner une idée. -
On a souvent dit que Philippe faisait de la publicité intellectuelle. Je crois surtout qu'il faisait de la publicité intelligente. Cette intelligence n'était nullement hautaine, encore qu'il ne fit pas mystère de son mépris pour l'imbécillité. Elle relevait du rapport aux gens, avec qui il aimait AStre - en intelligence -.
C'est ce qu'il a lui-mASme souligné dans la préface d'un recueil du Club des directeurs artistiques : - Vous avez des yeux qui préfèrent la beauté A  la laideur, croyez-les. Vous avez plus de goût pour le sourire que pour la morosité, us n'avez pas tort. Vous ressentez l'intelligence comme une qualité et la bAStise comme un défaut, us n'AStes pas les seuls. Vous préférez AStre séduits qu'agressés, convaincus que racolés, nous sommes d'accord. -
Philippe n'avait rien d'un idéaliste. En tout cas, pas au sens premier. Cela dit, je ne connais pas le mot adéquat pour définir un homme toujours en quASte d'idées, un passionné qui croit que Vidée mène le monde. Parler de la conception qu'il avait de la publicité, c'est parler de la conception qu'il avait du monde. Pour Philippe, le monde était le monde des idées, des idées dont Edgar Morin a dit qu'elles étaient des AStres vivants, et que Philippe rASvait de faire naitre A  chaque instant.
Le pouir était au bout de l'idée. Et puisque les idées n'appartiennent A  personne, qu'elles peuvent surgir par génération spontanée en une nuit de travail ou en trois jours de rASverie, ce pouir revenait A  tout le monde. Peut-AStre connaissait-il ce mot d'origine américaine : - Peu importe qui a trouvé l'idée. L'idée s'en moque. -
Philippe avait le souci de toujours élever le débat. D pensait pouir se servir du langage ramassé de la publicité pour traiter de grands sujets. C'était pour lui une sorte de - sponsoring -, le sponsoring d'idées. Son projet était ambitieux. Par exemple, il avait écrit une série d'annonces dont le titre disait C'est dans la Bible, c'est dans le Coran, tentative modeste mais louable pour apporter sa pierre au rapprochement entre l'islam et l'Occident.
Il rASvait d'une démocratie directe, où les débats d'idées se manifesteraient au travers d'affiches contradictoires et de es de quotidien, des dazibaos A  la franA§aise et dans les médias. Je me souviens d'un débat houleux entre un grand patron de presse et Philippe A  ce sujet, le premier l'accusant de uloir donner A  la publicité un rôle qui ne pouvait AStre le sien, d'outrepasser sa mission en quelque sorte.
A€ cela, Philippe répondait qu'il était légitime de chercher A  rapprocher les gens, les peuples, par une meilleure compréhension, elle-mASme fruit de la communication. C'était son utopie.
Philippe revint un jour de New York avec une nouvelle idée : l'agence était une banque d'affaires. Il ait les agences de publicité conventionnelles A  de petites banques commerciales. Il ulait AStre A  ces agences ce que les banques d'affaires sont aux banques commerciales. Pour cela, il aurait suffi de créer A  quelques-uns le maximum de richesses au travers des idées, la valeur de l'idée étant directement rapportée A  l'argent qu'elle produirait. On paie toujours trop cher les images, jamais assez cher l'imagination.
La publicité, quand elle est digne de ce nom, ouvre les marchés, défait les monopoles, accélère les mutations. Pour Philippe, elle rendait le capitalisme jubilatoire. Il adorait s'enthousiasmer pour un mot d'esprit, un script, une trouvaille inattendue.
Une bande des meilleurs films conA§us sous son autorité, ou plutôt son inspiration, a été reconstituée. Le film pour Schick, tourné par Jean-Luc Godard, date de 1971. Aucune année ne fut creuse dans les vingt-cinq que Philippe a consacrées A  la publicité. Dans ce milieu qui en manque souvent, cette constance fit de lui le mythe qu'il est devenu, la légende qui a grandi au fil des ans.
Son mode de fonctionnement était - Qui m'aime me suive -. LA  résidait son charisme, son côté maitre, au sens socratique du terme. Philippe était un accoucheur d'esprits.
Quand un chef de publicité venait le ir en mal d'imagination, A  court d'idées, il disait : - D me faut de la matière. - Il avait l'habitude de déclarer A  ses collaborateurs : - Quand us avez un problème, mettez toujours la matière sur la le. De la matière jaillira l'idée. -
De lA  vient peut-AStre sa passion pour la sculpture, pour ces statues de sable qu'il a faA§onnées sur toutes les plages du monde. On y retrouve le côté éphémère de ces idées qu'il faisait naitre de la matière. Son rapport A  la création était celui d'un sculpteur. Quelques semaines avant sa disparition, Philippe avait été coopté aux Beaux-Arts. Plusieurs tonnes de marbre de Carrare l'y attendaient. Son professeur, son maitre en sculpture les lui avait réservées. Dans la sculpture, comme ailleurs, il se donnait en entier.
Philippe a constitué une communauté artistique, spirituelle, qui ne ressemble en rien A  la société telle que nous la connaissons, avec ses blocages, ses pesanteurs, ses frontières, et qui montre aux entreprises et aux institutions que l'impossible est toujours possible. Cette communauté nomade et secrète comprend plusieurs dizaines de grands créatifs de ce pays. Il l'anime encore.

Il ne faut pas s'étonner que j'aie choisi Philippe pour décrire le publicitaire de demain. Sa vision du métier n'a pas pris une ride. Il ulait une publicité intelligente, belle, sensible. Il s'intéressait A  tout et A  tout monde, l'éclectisme lui était inné. Son respect pour les gens auxquels il s'adressait était sans bornes.
Il ulait que les publicitaires manifestent plus de politesse, car, pour lui, la créativité était d'abord affaire de civilité. Comme il me l'avait dit un jour : - La créativité, c'est le respect de l'auditeur. Nous nous invitons chez lui A  huit heures du soir, nous nous imposons pendant le diner. La moindre des choses est de le faire avec un peu de tact, de gentillesse, de simplicité, d'humour, bref de créativité. -
Il n'employait pas encore le mot d'interactivité, mais l'idée y était. Le récepteur va vers l'émetteur quand le message se distingue comme original, créatif. D'un seul coup, c'est le récepteur qui décide d'écouter. Cette inversion de la relation n'est rien d'autre qu'une amplification d'un réflexe que Philippe avait déjA . H savait que les gens, quand ils apprécient la manière dont us leur parlez, viennent vers us.



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