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DROIT

Le droit est l'ensemble des règles générales et abstraites indiquant ce qui doit être fait dans un cas donné, édictées ou reconnues par un organe officiel, régissant l'organisation et le déroulement des relations sociales et dont le respect est en principe assuré par des moyens de contrainte organisés par l'État.


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Platon



Platon
CHEF DES LOIS OU ESCLAVE DES LOIS ?


Platon, Les Lois, 7 l4b-715d, trad. L. Robin, Gallimard, t. II, 1950, p. 760-762.

Platon redéfinit de façon polémique la question du pouvoir des lois et du pouvoir par les lois. Qui sont ses adversaires ? Thrasymaque (personnage forgé par Platon pour exhiber les dérives théoriques principales qu'il combat) présentait la loi et la justice comme exprimant l'intérêt du plus fort, du gouvernant (République, 338-339). Calliclès y voit l'expression de l'intérêt des plus faibles, de la masse (Gorgias, 482-483). Selon eux deux, la loi assert une partie de la population à une autre. Chacun à sa façon ne reconnait que le droit du plus fort, à cause d'une opposition tranchée de la nature et de la loi, où la nature est un rapport de force permanent et la loi une convention surajoutée. Cet état de lutte naturelle fournit la légitimité ultime et l'explication des phénomènes politiques à ces sophistes outrés. Platon défend contre eux l'idée que la loi a égard au tout de la cité. Elle en cherche l'intérêt. Elle est comme son ame. Loin qu'elle soit l'instrument par lequel certains imposent leur volonté au reste de la cité, elle est ce par quoi tous les hommes sont gouvernés. Ainsi aucun n'est gouverné par son prochain ou par un groupe quand il est gouverné par les lois. Par un renversement classique dans la pensée platonicienne du pouvoir, les chefs qui gouvernent selon des lois réellement dines doivent être en réalité les esclaves de ces lois. Inversement, on sait que « celui qui est effectivement un tyran », c'est-à-dire celui qui gouverne sans loi, « est effectivement un esclave » (République 579d). Il ne devrait pas y avoir de domination des lois par les hommes, mais la loi doit régner sur tous les hommes. Le thème des chefs politiques esclaves des lois et celui des lois monarques ou despotes (nomos basileus, nomos despote.!) ont déjà une grande fortune (chez Platon, lettre VII, 334c, où il préconise le Élit que la Sicile soit assere aux lois, non aux despotes, et la lettre VIII, 354c-e - Lettres, trad. L. Brisson, GF-Flammarion, 1987, p. 182 et 241). Liberté et sertude extrêmes sont des maux absolus, mais elles sont des biens lorsqu'elles sont modérées. La justice est assurée exacrement en même temps que la libération à l'égard des pouvoirs illégitimes, par la loi encore. Les ressemblances superficielles ne doivent cependant pas occulter l'évolution historique que le thème a subi. La liberté politique a pris des ures extrêmement variées. Le rapprochement serait hatif entre Platon, qui refuse qu'un groupe opprime la cité par ses lois, et la conception rousseauiste de la liberté comme obéissance à la loi qu'on s'est prescrite. La similitude est négative : ils refusent qu'une loi soit imposée par une fraction à une autre, et avertissent contre le danger des factions. Mais Rousseau refuse de faire ratifier la loi par un autre acteur que le peuple souverain, ce qui est très éloigné de la position de Platon. Platon se contente de préférer un pouvoir absolu, mais légitime parce qu'il a la compétence scientifique, à un pouvoir olent et désordonné. Rousseau identifie liberté et obéissance à la loi collective sans la médiation rationnelle si fortement revendiquée par Platon.
La vraie fortune du thème des lois despotes se situe plutôt du côté de la problématique de la raison d'État. Le gouvernant, le prince (et non tout le peuple) est-il soumis aux lois ou dégagé de leur contrainte ? Les lois règnent-elles sur tous ? (cf. texte n° 23). La revendication du gouvernement des lois exige que les gouvernants soient soumis aux lois, au lieu de les instrumentaliser pour leur profit.

L'Athénien. - Eh bien, songes-tu qu'au dire de certaines gens il y a exactement autant de sortes de lois qu'il y a d'espèces de régimes politiques ? Or, tous les régimes politiques dont on parle généralement, nous les avons tout à l'heure passés en revue. Certes, ne va pas croire que cela soit une question sans importance, celle qui donne lieu à cette dispute, mais au contraire la question la plus grave ; car le point disputé, qui derechef est venu s'offrir à nous, c'est de savoir où, pour ce qui est de la Justice et de l'Injustice, nous devons porter notre regard : ce n'est en effet, dit-on, ni à la vertu guerrière, ni à la vertu dans son ensemble, que sent les lois ; mais, quel que soit le régime politique en gueur, ce qu'elles ont en vue, c'est ce qui est avantageux pour ce régime, afin qu'il détienne toujours le pouvoir et n'en soit pas dépossédé ; et la meilleure définition à donner de la Justice selon la nature serait


Clinias. - Quelle définition ?

L'Athénien. - De dire que c'est l'avantage du plus fort.


Clinias. - Explique-toi plus clairement encore !

L Athénien. - Voici. Il n'est pas douteux, disent ces gens, que dans un Etat l'institution des lois est l'ouvre de la fraction dominante. N'est-ce pas vrai ?


Clinias. - C'est vrai qu'on le dit !

L'Athénien. - Or, ajoutent-ils, croyez-vous que le peuple ou tout autre parti politique, ou bien encore un Tyran, soient jamais capables, quand ils ont triomphé, d'instituer par la suite volontairement des lois en vue d'une fin première autre que l'avantage, pour eux-mêmes, de la permanence de leur autorité ?


Clinias. - Comment cela serait-il en effet ?

L'Athénien. - Mais en outre, est-ce que celui qui contreent à ces règles une fois élies ne sera pas chatié, comme coupable d'injustice, par celui qui les a élies et leur attribue la dénomination de choses justes ?


Clinias. - Au moins est-ce probable !

L' Athénien. - La Justice, ce serait donc que toujours il en fût ainsi et à cette condition.
Clinias. - En tout cas, c'est ce qu'affirme la thèse en question !
L'Athénien. - Voilà effectivement une, entre autres, des maximes accréditées pour ce qui concerne l'autorité.


Clinias. - De quelles maximes parles-tu donc ?

L'Athénien. - Ce sont celles que naguère nous ensagions, en disant que certaines personnes doivent avoir l'autorité sur certaines autres, et il nous apparut précisément que c'était le cas des parents à l'égard de leurs rejetons, celui des hommes d'age à l'égard des gens plus jeunes, des personnes de haute naissance à l'égard de celles qui sont d'une extraction inférieure, et il y avait, si nous nous le rappelons, quantité d'autres titres à commander, dont certains mêmes constituaient un obstacle à l'égard des autres. Il va de soi que la maxime dont je parle était au nombre des cas dont je parle, et Pindare (c'est, je pense, ce que nous avons dit) justifie que, selon la nature, on mène à bonne fin, ainsi s'exprime-t-il, la suprême olence.


Clinias. - Oui, c'est ce qui naguère rue dit.

L'Athénien. - Examine donc maintenant aux partisans de laquelle de ces deux conceptions de la Justice il nous faut remettre notre État. Certes, des milliers et des milliers de fois déjà, il y a quelque chose de ce genre qui s'est produit dans certains États


Clinias. - Qu'est-ce que c'est ?

L'Athénien. - C'est que, là où les charges publiques sont l'objet d'une bataille, ceux qui y auront été vainqueurs auront si complètement accaparé à leur profit les affaires publiques, qu'aux vaincus ils ne laisseront même pas la moindre pan de l'autorité, ni à ces vaincus eux-mêmes, ni à leurs descendants et que, d'un autre côté, ils se surveilleront les uns les autres dans leur e, de peur que l'un d'entre eux, parvenu un jour au pouvoir, ne se dresse avec le souvenir des torts qui lui ont été faits. Non, sans nul doute, voilà ce que nous disons à présent : ce ne sont pas là des organisations politiques ; ce ne sont pas des lois comme elles doivent être, toutes celles qui n'ont pas été instituées en vue de l'intérêt commun de l'État dans son ensemble ; mais, quand elles l'ont été en vue de l'intérêt de quelques-uns, ces gens-là, je dis que ce sont des factieux, et non point des citoyens, je dis que ce qu'ils appellent leurs justes droits n'est qu'un mot de de sens ! Or, tout ce que je dis à présent a pour but de signifier que, dans ta Cité future, nous ne donnerons d'autorité à quelqu'un, ni parce qu'il est riche, ni parce qu'il possède un autre avantage du même genre, que ce soit sa gueur, sa haute stature, ou la noblesse de sa famille. Mais l'homme qui envers les lois élies pratique une stricte obéissance et dont c'est la façon de triompher dans la cité, c'est à celui-là que, nous l'affirmons, devra être, en premier, attribuée la place la plus importante parmi les serteurs de ces Dinités que sont les lois ; la seconde place à celui qui n'aura triomphé qu'en second, et, à ceux qui ennent ensuite, devra être remis, proportionnellement à leur rang, chacun des postes qui, dans ce serce, font suite aux précédents. Au reste, en appelant « serteurs » à l'égard des lois, ceux qu'aujourd'hui on nomme « chefs », je ne me suis pas du tout proposé d'innover en matière de mots ; mais c'est chez moi une conction supérieure à toute autre, que c'est cela qui, pour un État, constitue son salut, ou le contraire de son salut. Quant à celui où la loi serait ce à quoi l'on commande et qui est dépourvu de souveraineté, je vois en effet la ruine toute prête pour un tel État ; tandis que, pour celui où la loi est maitresse à l'égard des chefs et où les chefs sont les esclaves de la loi, j'observe l'apparition de tous les biens dont les Dieux ont fait présent aux cités.
Clinias. - Oui, par Zeus ! Étranger, tu as, je le vois, la sion pénétrante qui est propre à la eillesse !





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