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ECONOMIE

L’économie, ou l’activité économique (du grec ancien οἰκονομία / oikonomía : « administration d'un foyer », créé à partir de οἶκος / oîkos : « maison », dans le sens de patrimoine et νόμος / nómos : « loi, coutume ») est l'activité humaine qui consiste en la production, la distribution, l'échange et la consommation de biens et de services. L'économie au sens moderne du terme commence à s'imposer à partir des mercantilistes et développe à partir d'Adam Smith un important corpus analytique qui est généralement scindé en deux grandes branches : la microéconomie ou étude des comportements individuels et la macroéconomie qui émerge dans l'entre-deux-guerres. De nos jours l'économie applique ce corpus à l'analyse et à la gestion de nombreuses organisations humaines (puissance publique, entreprises privées, coopératives etc.) et de certains domaines : international, finance, développement des pays, environnement, marché du travail, culture, agriculture, etc.


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Le moyen-orient entre peurs et espoirs

Le Moyen-Orient fait peur. A€ la jonction de trois continents, berceau des trois religions monothéistes, devenu une source d'approvisionnement majeur et A  coûts réduits en hydrocarbures, le Moyen-Orienl a connu A  travers son histoire beaucoup de bruits et de fureurs.
Depuis le milieu du xx siècle, le caractère sensible de cette zone s'est accentué, notamment en raison du développement du nationalisme arabe, du conflit persistant entre IsraA«l et les pays arabes qui s'accomne du refus mutuel d'existence, et de l'importance stratégique de cette zone qui a été un des fronts de la guerre froide. L'embargo pétrolier de 1973, décidé par les pays arabes au moment de la guerre du Kippour, a fait prendre conscience aux pays occidentaux de leur vulnérabilité énergétique ; par ailleurs un terrorisme, lié très largement aux conflits qui se sont développés au Moyen-Orient, est apparu de faA§on endémique et n'est pas sans effet sur les communautés musulmanes d'Occident.
Depuis le 11 septembre 2001, avec la déclaration de guerre au terrorisme proclamée par le président Bush, il est clair que la situation au Moyen-Orient est devenue une préoccupa-lion majeure et une source de menaces potentielles : pour Washington, plusieurs pays de la région font partie de l'axe du mal.
Depuis lors, l'enchainement des événements fait que cette menace, loin de diminuer, s'est accentuée - comme en témoignent les attentats de Londres le 7 juillet 2005 -mASme si quelques victoires ont été enregistrées. Elle touche l'Amérique du Nord comme l'Europe, mais la proximité géographique de cette dernière et la présence d'importantes communautés musulmanes sur son sol la rendent sans doute plus vulnérable : elle est un vérile défi.
Les événements survenus dans cette zone depuis un an la font apparaitre comme une terre de violence n'épargnant pas les populations civiles. Le terrorisme a de nouveau frappé non seulement sur le sol européen mais également dans plusieurs pays moyen-orientaux ou maghrébins. L'intervention américaine en Irak a créé un traumatisme profond dans la région dont les conséquences ne sont pas encore toutes identifiées. Le bilan quotidien des morts, tant civils que militaires, reste lourd. Surtout les zones de non-droit se sont étendues et constituent autant de bouillons de culture pour le terrorisme. La volonté de l'Iran de poursuie son programme nucléaire inquiète.
Quelques lueurs d'espoir se sont fait jour début 2005 dans les territoires palestiniens ou en Irak non sans une certaine complaisance médiatique ; des frémissements démocratiques apparaissent dans de nombreux pays révélant une forte demande pour une vérile participation A  la vie politique. Ces lueurs ou ces frémissements sont cependant fragiles et porteurs d'incertitudes. Cet appel A  la démocratie ne va-t-il pas faire sombrer le Moyen-Orient dans le chaos ou l'anarchie ? Ne va-t-il pas amener au pouvoir des mouvements ou partis qui se réclament de l'islamisme politique? L'occupation américaine et ses nombreux dommages collatéraux ne vont-ils pas encore exacerber la xénophobie, voire la haine de l'Occident dans les opinions locales ?
En fait, si le terrorisme apparait comme une préoccupation majeure, la menace est multiforme. Quelles sont les menaces, comment peuvent-elles affecter la silité internationale et la sécurité, au sens large du terme, des pays occidentaux ? Que faire face A  ces menaces ? Quelle est la réponse la plus adaptée ? La politique actuelle menée par certains pays d'Occident est-elle efficace ou ne risque-t-elle pas de les amplifier par une erreur sur les cibles et une mise en œue maladroite ?
Autant de questions difficiles auxquelles on s'efforcera d'apporter sinon des réponses, tout au moins quelques pistes de réflexion.


Une zone de hautes turbulences


Entre fausses peurs et phobies irrationnelles, entre ais problèmes et obsession sécuritaire, où sont les risques et les dangers les plus préoccupants pour le présent mais surtout pour l'avenir ? Toutes les menaces, présentes ou potentielles, ne pourront pas AStre étudiées dans le cadre de ce chapitre. Trois seront plus spécialement rappelées : la rupture des approvisionnements pétroliers, le risque nucléaire, la menace terroriste.


L'Occident sans pétrole ?

Parmi les menaces, celle d'une rupture des approvisionnements pétroliers en provenance des pays du Moyen-Orient réapparait de faA§on endémique, tant aux états-Unis que dans les pays développés ou émergents.
Elle se fonde sur l'alerte de 1973 qui avait provoqué aux Etats-Unis un moment de panique : aujourd'hui, le constat que les pays du Moyen-Orient assurent le tiers de la production mondiale et détiennent près des deux tiers des réserves prouvées de pétrole alimente cette inquiétude. A€ un moment où les plus récentes prévisions soulignent que la demande de pétrole restera forte encore dans les trente prochaines années et alors que l'on s'interroge sur le problème plus général de l'insuffisance globale de l'offre par rapport A  cette demande, ce constat peut effectivement inquiéter. Cette crainte est encore renforcée lorsque l'on constate qu'en fait la quasi-totalité des approvisionnements venant du Moyen-Orient sont concentrés dans une zone délimitée par un cercle de I 000 kilomètres de diamètre dont le centre serait un point situé dans le Golfe, au large de Bahreïn, et qui coue les champs d'hydrocarbures de l'Arabie Saoudite, du Koweït, du sud de l'Irak et des différents émirats du Golfe. De plus, 90 % des exportations de la région passent par le détroit d'Ormuz, facilement contrôlable.
Si on entre dans un débat technique sur la réalité de la menace sur les approvisionnements énergétiques, on peut trouver quelques I éléments de réponses :
» L'insuffisance de l'offre d'hydrocarbures par rapport A  la demande prévisible est un problème global ; il est évidemment aggravé par le constat que la concentration des approvisionnements au Moyen-Orient est particulièrement forte et deait se maintenir, voire s'élargir dans les trente prochaines années.
» L'embargo de 1973 a eu plus d'effets psychologiques que mécaniques. étant sélectif (visant essentiellement les états-Unis et les Pays-Bas), il a été vite rompu par des détournements de trafic et n'a duré que quelques semaines. En fait, aucun gouvernement, mASme parmi les plus hostiles aux pays occidentaux, et plus spécialement aux états-Unis, ne peut prendre le risque d'un embargo qui affecterait durablement ses propres ressources financières. L'expérience du passé montre que l'Irak de Saddam Hussein comme l'Iran des ayatollahs ou la Libye de Kadhafi n'ont jamais refusé d'approvisionner les états-Unis et, bien au contraire, ont tout fait pour accueillir les comnies américaines comme opérateurs ou investisseurs.
» Le risque vérile est que le poids des pays arabes et de l'Iran et leur action concertée pèsent sur l'évolution des prix des hydrocarbures sur le marché. Certes, les prix ne sont plus fixés par les producteurs : ils sont liés A  l'évolution de l'offre et de la demande sur le marché. Il n'empASche qu'une action concertée de quelques producteurs importants peut affecter l'évolution des prix. Ce risque n'est toutefois pas spécifique A  cette zone : il est plus généralement lié A  la politique des pays exportateurs de pétrole, qu'ils appartiennent ou non A  l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP).


La menace nucléaire

Le Moyen-Orient est certainement la région du monde qui concentre, sur un espace relativement limité, une densité de moyens militaires sans équivalent. S'agissant du risque nucléaire présenté par le Moyen-Orient, il est difficile de l'apprécier, compte tenu du secret qui entoure traditionnellement tout ce qui concerne ce sujet mais également de la volonté des états-Unis et d'IsraA«l d'utiliser cette menace au mieux de leurs intérASts.
En effet, dans le domaine nucléaire, on se trouve au Moyen-Orient en plein paradoxe. Le seul pays qui dispose de l'arme nucléaire, IsraA«l, est celui qui, tout en refusant de signer le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), dénonce le risque de prolifération et s'oppose A  toute inspection de la part de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). En revanche, ceux qui l'ont signé n'ont pas d'arsenal nucléaire et déclarent ne s'intéresser qu'au nucléaire civil, au grand scepticisme de nombreux pays. Comment expliquer cet apparent paradoxe ?
Dès l'origine, IsraA«l a estimé que la détention de l'arme nucléaire était un élément majeur pour assurer sa sécurité, voire son existence mASme. Il s'agit pour lui d'un déterrent stratégique, estimé nécessaire pour contrer la menace que peuvent représenter les forces combinées des pays arabes.
Ainsi, IsraA«l n'a jamais caché son intention de se doter de capacités nucléaires ; il a cependant assuré qu'il ne serait pas le premier A  introduire l'arme nucléaire au Moyen-Orient mais qu'il avait la capacité de la produire. D'après les évaluations les plus courantes, IsraA«l posséderait entre 100 et 200 tAStes nucléaires, voire plus, chiffres jamais confirmés ou démentis.
Dans la région, des programmes de recherche nucléaire sont en cours en Egypte, en Syrie, en Libye, en Iran et existaient en Irak. Cependant ces pays, signataires du TNP, clament haut et fort le caractère civil de ces programmes. LA  aussi, l'incertitude existe, non pas sur la détention de l'arme nucléaire - manifestement aucun d'entre eux ne la possède -mais sur la finalité de ces programmes. Il est ai qu'entre le nucléaire civil et le militaire, la frontière est quelque peu poreuse.
L'Iran est, depuis août 2003, sur la sellette, car effectivement, après la destruction de l'arsenal irakien et l'arrASt de son programme de recherche, ce pays apparait comme la seule menace potentielle sérieuse. Le programme iranien remonte A  l'époque du Shah, sans que, durant son règne, une option sur sa finalité civile ou militaire n'ait été tranchée. Après la révolution, il a d'abord été arrASté par le nouveau pouvoir islamique. La guerre déclenchée par l'Irak et les revers militaires subis par l'Iran ont fait prendre conscience aux ayatollahs de la vulnérabilité de leur pays et le programme a été relancé avec une finalité proclamée civile. Pour les uns, Téhéran est sincère lorsqu'il parle de programme A  finalité civile ; pour d'autres, l'Iran a une volonté politique affirmée de se doter de l'arme nucléaire : étant entouré par des puissances nucléaires - la Russie, IsraA«l, l'Inde, le Pakistan -, la détention d'une telle arme lui serait indispensable pour sa sécurité et pour s'affirmer comme puissance régionale. Enfin, et c'est sans doute l'hypothèse la plus probable, l'Iran a la volonté de se doter d'une capacité nucléaire sans avoir pris une option : mais celle-ci pourrait le moment venu - dans deux ou trois ans - lui permettre de fabriquer la bombe si le pouvoir le décidait.
La France, le Royaume-Uni et l'Allemagne essaient de vendre aux Iraniens un paquet qui, en échange de la renonciation A  un programme militaire et l'acceptation des contrôles de l'AIEA, leur assurerait une coopération technique dans le domaine du nucléaire civil, des compensations économiques et des garanties pour leur sécurité. Le caractère laborieux de la négociation, que les états-Unis suivent avec scepticisme mASme s'ils apportent un appui formel A  cette démarche, laisse penser qu'un accord sera difficile compte tenu de la détermination affichée des autorités iraniennes A  poursuie ce programme. Si ces négociations échouent, l'Iran sera-t-il la prochaine cible des Etats-Unis ? A€ Washington, les milieux néoconservateurs poussent en ce sens.
L'Administration est néanmoins consciente que ses moyens d'action ont une efficacité aléatoire. Une destruction des sites par voie aérienne ou par commandos, compte tenu de la protection dont ils bénéficient et de leur dispersion, serait une entreprise hasardeuse. Des sanctions économiques ne manqueraient pas d'avoir des répercussions graves sur le marché des hydrocarbures. Une désilisation du régime, mASme s'il est contesté, est une perspective peu réaliste : le pouvoir religieux tient encore bien la rue. Dans l'immédiat, l'Administration Bush préfère laisser les trois pays européens négocier, étant entendu que cette négociation se déroule en toute transparence A  son égard. Les Européens ont déjA  obtenu de l'Iran qu'il reste dans le TNP, respecte le protocole additionnel, accepte les contrôles des inspecteurs de l'AIEA et suspende le processus d'enrichissement de l'uranium, mais la négociation n'est pas achevée et l'Iran affirme haut et fort son droit A  développer la technologie nucléaire. Le cas iranien risque de rester encore quelque temps non résolu, avec des moments de tension qui demanderont aux négociateurs sang-froid et lucidité.
Le deuxième paradoxe est que les différents s de dénucléarisation du Moyen-Orient ne reA§oivent qu'un accueil poli et sceptique. Depuis trente ans, la diplomatie égyptienne a mis sur la le un de dénucléarisation qui fait l'objet d'une résolution votée rituellement chaque année par l'Assemblée générale des Nations unies sans que celle-ci ne soit mise en œue. Depuis 1990, le président Moubarak appelle a la destruction des armes de destruction massive (ADM) existant dans la région sans plus de succès. Cette initiative est fondée sur l'idée que seule une telle destruction peut limiter le risque de guerre au Moyen-Orient et que, tant qu'IsraA«l conservera le monopole de l'arme nucléaire, d'autres pays essaieront de se la procurer.
Lors de son voyage en mars 2005 en IsraA«l, Mohammed El Baradei, le directeur général de l'AlEA, a essayé de faire progresser une idée able. Certes, IsraA«l n'en ésectiune pas le principe, mais renvoie toute discussion A  la signature d'un traité de paix avec tous ses voisins.
Ainsi, la menace risque de se confirmer, voire de s'accentuer. Dans cette perspective, dans son dernier rapport annuel au Congrès, la Central Intelligence Agcncy (CIA) ne cache pas son inquiétude devant la facilité croissante avec laquelle on peut se procurer aujourd'hui savoir-faire et matière nécessaires pour fabriquer des armes de destruction massive, y compris l'arme nucléaire. - Techniquement -, tout état - pourrait AStre en mesure de produire en quantité suffisante des matières fissiles et les militariser. - L'Agence étend cette remarque aux organisations terroristes qui pourraient utiliser des procédés de dispersion de matériaux radioactifs. Intoxication ou anticipation ? A€ l'évidence, la menace nucléaire dépasse le cas spécifique de l'Iran.

Le terrorisme
Cette menace apparait d'autant plus inquiétante aux yeux des opinions publiques occidentales qu'elle est diffuse, mal identifiée, A  la fois proche et lointaine. 11 est ai qu'une confusion est sciemment entretenue : depuis le 11 septembre, un amalgame insidieux s'est développe entre islam, islamisme et terrorisme. Pour certains, de Mahomet A  Ben Laden en passant par Arafat, tous seraient des terroristes voulant faire triompher un islamisme radical. De mASme, les expressions islamisme radical, intégrisme islamique ou fondamentalisme sont utilisées indifféremment.


Un amalgame insidieux

Un effort de définition des termes et d'identification des différents types de menace doit AStre fait. En fait, trois séries de mouvements se sont développés depuis vingt ans.

» Le fondamentalisme
On appellera fondamentaliste tout mouvement qui se fonde sur une interprétation littérale des lies sacrés et une imitation des premières communautés musulmanes. Ces mouvements sont aussi anciens que l'islam : certains entendent revenir A  l'islam pratiqué par les disciples du prophète, les salafs, d'où le nom donné souvent A  ce mouvement qualifié de salafiste. Au xvin0 siècle, le cheikh Abdel Wahab est un réformateur qui, lui aussi, souhaite revenir A  l'islam primitif, considéré comme pur, et proera, grace A  son alliance avec la famille des Saoud, sa doctrine dans le centre de la péninsule arabique : le wahha-bisme imprègne actuellement l'islam pratiqué en Arabie Saoudite. Le mouvement des Frères musulmans suit une démarche able. Son maitre A  penser, Sayyed Qutb, qui a développé sa doctrine, notamment dans son lie publié en 1948, La Justice sociale dans l'islam, a profondément influencé les mouvements islamistes d'aujourd'hui, y compris les plus radicaux. Tous ces mouvements dénoncent les - faux musulmans -, visant notamment les dirigeants des pays qui s'accommodent de l'influence occidentale, entendent lutter contre l'- ignorance -, c'est-A -dire l'état de ceux qui n'ont pas reA§u le message de Dieu, et promouvoir le règne et l'autorité de Dieu A  travers la charia, qui doit AStre d'une application universelle. Ils refusent ainsi toute forme de laïcité et récusent les valeurs d'un Occident considéré comme corrompu et impie. Ce courant de pensée est proé par les di fférents mouvements se réclamant des Frères musulmans : A  cet égard, les enseignants égyptiens envoyés en coopération dans de nombreux pays arabes ont joué un rôle important dans la diffusion de ces idées. De mASme, la Ligue islamique, fondée par l'Arabie Saoudite et largement influencée par elle, est devenue un vecteur très efficace de proation d'une foi d'inspiration wahhabite, tant en Asie qu'en Afrique, voire en Europe avec le financement de la construction des mosquées et la formation des imams.
De fait, on assiste depuis une trentaine d'années A  une réislamisation en profondeur des sociétés musulmanes, fortement inspirée par ces mouvements : celle-ci se manifeste en particulier par le développement de la pratique religieuse, qu'il s'agisse de la prière, du jeûne du ramadan ou du respect des interdits alimentaires, et la progression des signes ostentatoires d'appartenance A  l'islam.
La plupart des gouvernements dans les pays musulmans ont dû accomner ce mouvement de peur de ne pas le contrôler : ouverture d'écoles religieuses, construction de mosquées, développement de banques islamiques, réislamisation du droit, notamment du code familial ou du droit pénal, stricte réglementation de la vente d'alcool, etc.


» L'islamisme politique

Pour de nombreux mouvements fondamentalistes, cette réislamisation passe par la prise du pouvoir politique. Si certains d'entre eux se refusent A  participer A  des élections en considérant que l'on ne peut pactiser avec des institutions créées par les hommes, d'autres essaient de se transformer en mouvement politique pour conquérir le pouvoir. Dans certaines circonstances - tel est le cas du Hamas, du Djihad islamique palestinien ou du Hezbollah -, ils entendent participer au combat contre l'- ennemi sioniste - et se revendiquent comme étant un - mouvement de résistance -.
Cette évolution vers la participation au jeu politique a pu AStre constatée dans la plupart des pays arabes. Certes, l'islamisme politique a jusqu'A  maintenant échoué, non pas qu'il manque de soutien dans la population, mais parce que les gouvernements ont pris des mesures pour leur barrer le pouvoir ou contrôler leur progression. A€ cet égard, tous les cas de ure existent : participation libre au jeu politique au Liban où le Hezbollah a 12 députés ; élection contrôlée de députés en Jordanie ; interdiction en Syrie.
Cependant, la réalité est lA  : après l'échec des partis laïcs ou nationalistes dans la plupart des pays arabes, les partis islamiques représentent le plus souvent la seule force politique d'opposition organisée. Leur soutien populaire est d'autant plus fort que ces mouvements sont traditionnellement engagés dans l'action caritative, éducative, hospitalière palliant souvent les déficiences des services publics. Ils disposent ainsi d'un ancrage profond dans la population, notamment auprès des jeunes.

» Le djihadisme
Pour certains salafistes - qui récusent par ailleurs les processus électoraux -, la promotion de l'état islamique doit se faire par un djihad, au sens guerrier et militaire du terme. Depuis la déclaration de djihad proclamée par Oussama Ben Laden le 23 août 1996 contre les Etats-Unis, accusés d'- occuper la terre des deux lieux saints -, l'appel aux - combattants du djihad - a reA§u un écho non seulement dans les pays arabes, mais également dans tous les pays musulmans et dans les communautés musulmanes d'Occident.
Pour Ayman Al-Zawahiri, le doctrinaire d'Al-Qaida, la coalition des mouvements djihadistes - porte une promesse de destruction et de ruine pour les nouveaux croisés []. Bile a soif de vengeance contre les chefs de bande de l'impiété mondiale, les états-Unis, la Russie, IsraA«l, etc. -. Cette idéologie est proée par des sites Internet, actualisés en temps réel, en arabe et dans d'autres langues, y compris le franA§ais. Cet appel au djihad incite les jeunes A  se porter volontaires sur tous les fronts du combat contre les impies : dans le passé, l'Afghanistan, l'Algérie, la Bosnie ; aujourd'hui, IsraA«l et les territoires palestiniens, l'Irak, la Tchétchénie, l'Arabie Saoudite, etc.

La menace terroriste
Parmi ces mouvements, quels sont ceux qui peuvent AStre qualifiés de terroristes ? Où finit la- résistance légitime -, où commence le terrorisme ? Quelle influence ont-ils dans la population ? Pour les uns, notamment une part non négligeable des opinions arabes, aucun des mouvements précédemment évoqués ne peut AStre qualifié de terroriste : le sondage cité dans le leau 1 est A  cet égard très explicite. Pour d'autres, tous le sont ou peuvent l'AStre. Pour le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies (ONU), qui vient de proposer une définition du terrorisme - selon laquelle - tout acte [] commis dans l'intention de causer la mort ou des blessures graves A  des civils ou A  des non-combattants, dans le dessein d'intimider une population ou de contraindre un gouvernement ou une organisation internationale A  accomplir un acte ou A  s'abstenir de le faire - -, il est clair que les attentats visant sciemment des civils doivent AStre qualifiés de terroristes.
Il est difficile de mesurer l'influence qu'exercent de tels messages, notamment les plus violents d'entre eux. Comme Gilles Kepel l'a décrit dans Fitna, guerre an cœur de l'islam, il y a un affrontement dans le monde musulman entre un islam fondé sur une interprétation simpliste, foncièrement agressive et d'un autre age, des textes sacrés et un islam qui entend promouvoir une religion de tolérance qui s'inscrit dans la modernité. La société civile de nombreux pays musulmans se réclame d'un tel islam des lumières.
Quel rapport de forces existe-t-il au sein des communautés musulmanes entre ces différents courants ? Une quantification est aléatoire, mais il est certain que les pays occidentaux doivent prendre en compte une réislamisation profonde d'une large partie des opinions musulmanes, dont l'idéologie antioccidentale se nourrit des conflits du Moyen-Orient amplement médiatisés (territoires palestiniens ou Irak). Enfin malgré les revers subis, Al-Qaida et ses émules représentent encore un potentiel d'activités terroristes que des moyens purement militaires ne peuvent éradiquer. Les mouvements terroristes continuent A  recruter et A  renouveler leurs forces combattantes dans de nombreux viviers (Liban, territoires palestiniens, Irak, Afghanistan, Pakistan).
Ce type de terrorisme dépasse manifestement la seule personne de Ben Laden, valorisé par les médias, voire par certains états. Il recueille encore, dans une partie tout au moins des opinions arabes, une réelle sympathie, si l'on en croit le sondage récemment publié par le Center for Stratégie Studies de l'Université de Jordanie (leau 1 ). Son éventuelle élimination ne permettra pas A  elle seule de supprimer une menace terroriste, largement décentralisée dans ses modes d'action, mASme si les djihadistes voient en celui-ci un modèle.
Il est certain que la persistance de foyers de crise au Moyen-Orient ne peut que nourrir l'extrémisme et la xénophobie. Ceux-ci, par leur impact non seulement sur l'environnement régional mais également dans les communautés arabes d'Occident, représentent une réelle menace A  la sécurité internationale.
Face A  ces menaces que faire ? Les réponses apportées par ceux qui se sentent menacés sont-elles adéquates ?

Faire face aux menaces
Les pays occidentaux ont pris conscience depuis longtemps du caractère stratégique de cette zone et de l'intérASt qu'il y avait A  la siliser, voire A  la contrôler. Mais la prise de conscience que cette région pouvait constituer une très sérieuse menace pour leur sécurité est relativement récente. On peut la dater des années 1970, c'est-A -dire A  un moment où le développement du conflit israélo-arabe dans un contexte de guerre froide a pris une tournure inquiétante, non seulement pour la silité de la région, mais également pour la sécurité des pays occidentaux.
L'engagement de l'Europe, en tant que telle, dans la région, est amorcé par la déclaration de Venise de juin 1980, initiée par le président Giscard d'Estaing, et prend la forme d'un projet cohérent et ambitieux en 1995 avec la déclaration de Barcelone. Celle-ci estime que sa sécurité passe par une - solution globale du conflit israélo-arabe - et par le - développement économique et social durable et équilibré -. Dans cette perspective, l'Union européenne proposait un partenariat global, ayant une dimension A  la fois politique, économique et sociale.
L'engagement américain au Moyen-Orient ne s'est jamais démenti depuis 1945. A€ ses débuts, l'Administration Bush a marqué une certaine distance A  l'égard des dossiers moyenorientaux. Il a fallu le 11 septembre pour qu'elle mette en œue une politique active et - pré-emptive - dans la région : paradoxalement, cette Administration, après sa déclaration de guerre contre le terrorisme, s'y est engagée, comme aucune autre ne l'avait fait. Cette politique se fonde sur l'idée que seule la démocratie apportera la paix et le développement économique dans cette zone et, par ricochet, la sécurité pour les états-Unis. Dans ce contexte, la solution du conflit israélo-arabe devient un élément secondaire.
Au lendemain du 11 septembre, l'Union européenne et les états-Unis semblaient donc avoir des conceptions différentes, voire opposées, sur les moyens pour assurer leur sécurité. Depuis lors, il est indéniable qu'un rapprochement est intervenu et que les Européens ont réussi A  faire partager une partie de leurs préoccupations.

La réponse de l'Europe
Le partenariat défini en 1995 A  Barcelone a été fondé sur l'idée qu'entre tous les pays méditerranéens, du nord et du sud de la Méditerranée, y compris IsraA«l, un intérASt mutuel existait pour renforcer une coopération. Son extension géographique, certes, ne coïncidait pas avec le Moyen-Orient, puisque le Maghreb était inclus et qu'A  l'inverse, les pays du Golfe n'y participaient pas. Barcelone a ensuite été complété par des accords spécifiques avec la plupart des pays de la zone. Le dessein était ambitieux puisqu'il visait non seulement la coopération économique et commerciale, mais également le renforcement de la démocratie et le respect des droits de l'homme ainsi qu'une meilleure compréhension entre les cultures. L'objectif de sécurité, qualifié de - bien commun -, était également mentionné. La lutte contre le terrorisme urait parmi les objectifs, de mASme qu'une action en faveur de la non-prolifération. En juin 2003, le Conseil européen de Thessalonique devait - renforcer le partenariat, le dialogue et la promotion de la démocratie avec les pays arabes -.
A€ l'évidence, les résultats n'ont pas été A  la hauteur des attentes : les états-Unis eux-mASmes, exclus du processus, n'ont d'ailleurs pas ménagé leurs critiques, parfois de faA§on injuste. Parmi toutes les actions envisagées, ce sont celles dans le domaine financier qui ont été mises en œue de la faA§on la plus complète, A  la fois A  travers le programme M EDA, doté pour la période 1996-l999 de 4,4 milliards d'euros et pour 2000-2006 de 5,3 milliards d'euros, et l'action de la Banque européenne d'investissement (BEI) dont les engagements sur la zone sont de l'ordre de 12 milliards d'euros. Pour le reste, les actions ont été, au mieux, amorcées et l'ensemble conserve un caractère quelque peu incantatoire. Tel est le cas notamment de la mise en place d'ici 2010 d'un espace euro-méditerranéen de libre-échange, de promotion de la démocratie ou de dialogue des cultures.
Les raisons de cette déception sont multiples et montrent bien les difficultés que rencontre toute action dans cette région. Parmi celles-ci, on peut citer le blocage du processus de paix que Barcelone était censé accomner, l'absence de leadership et de présidence du côté des pays du Sud compte tenu de leurs désaccords internes, la timidité des Européens dans la promotion de la démocratie, les réticences du Sud A  accepter ce qu'il considère comme une ingérence qualifiée de néocolonialc dans ses affaires intérieures. Les Européens sont conscients de ces insuffisances et deaient tenir compte de ce bilan dans la préparation de la nouvelle conférence qui se tiendra pour le dixième anniversaire A  Barcelone en novembre 2005, et deait marquer un renforcement et une relance de ce processus.


La réponse des états-Unis

Les états-Unis ont effectivement une approche différente. Tout d'abord, après le 11 septembre, l'Administration estime que sa sécurité passe d'abord par une - guerre contre le terrorisme -. Telle est la justification de l'intervention en Afghanistan où, effectivement, les Talibans hébergeaient Al-Qaida. La menace contre la sécurité sera également une des justifications de leur intervention en Irak : de ce point de vue, celle-ci a été moins convaincante et les preuves alléguées pour justifier l'action militaire sont apparues rapidement comme des montages, voire des faux grossiers : aucun lien n'a pu AStre éli entre Al-Qaida et le régime de Saddam Hussein ; aucune arme de destruction massive n'a été trouvée, comme l'a constaté la commission créée A  cet effet. Du point de vue de la sécurité, ces deux interventions ont eu des résultats mitigés sinon paradoxaux : si les bases d'Al-Qaida ont bien été détruites, ses principaux responsables n'ont pas été capturés ni ses réseaux vérilement démantelés ; le contrôle de l'Afghanistan a été repris, moins par le gouvernement légal, que par les seigneurs de la guerre. En Irak, le chaos persistant a attiré les djihadistes de diverses nationalités et le triangle sunnite est devenu un vivier où prospère impunément Abou Moussab Al-Zarkawi qui a fait allégeance A  Oussama Ben Laden. Cependant le projet américain est plus ambitieux : il s'agit de remodeler le Moyen-Orient pour en faire - une zone de paix, de liberté et de prospérité -.
Le projet initial de - Grand Moyen-Orient -, tel qu'il a été défini par l'Administration américaine, avait pour sa part un caractère particulièrement ambitieux, mASme s'il est resté longtemps très flou dans ses objectifs comme dans ses modalités. Le 20 janvier 2003, Bush, dans son - message sur l'état de l'Union -, ne cachait pas ses intentions : - tant que le Moyen-Orient restera en proie A  la tyrannie, au désespoir, A  la colère, il continuera A  produire des hommes et des mouvements menaA§ant la sécurité de l'Amérique et de ses amis. L'Amérique poursuit donc une stratégie de liberté au Moyen-Orient. - La sécurité des états-Unis serait ainsi acquise grace A  la destruction des - bastions avancés de la tyrannie -. Encore convenait-il d'identifier ces bastions.
Le document de travail initial, connu en féier 2004 en raison d'une fuite dans la presse arabe, était destiné aux sherpas en charge de la préparation du sommet des chefs d'état et de gouvernement du G8, qui devait se réunir A  Sea Island sous présidence américaine. Il comportait trois volets : le renforcement de la démocratie, la mise en place d'- une société de la connaissance -, une transformation et un développement économiques passant par - la libération du potentiel du secteur privé -. Ce projet initial devait susciter de vives réactions tant de la part de plusieurs pays européens, dont l'Allemagne et la France, que du côté des pays du Moyen-Orient, y compris de gouvernements très liés aux états-Unis. Les critiques les plus fréquentes portaient notamment sur son champ géographique hétérogène - de la Mauritanie au Pakistan -, la globalité de son approche, son caractère intrusif, le manque de concertation préalable avec les pays intéressés, le parti pris d'ignorer les gouvernements au profit de la société civile, le refus d'appliquer un modèle conA§u A  1 ' extérieur. Par ai I leurs, plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) importantes, notamment le National Endovvment for Democracy, décidaient de développer de faA§on prioritaire des programmes tournés vers l'apprentissage de la démocratie dans les pays arabes.

Le G8 face aux défis
Le sommet de Sea Island, en juin 2004, devait arrASter un projet plus acceple présenté comme - un d'appui A  la réforme en réponse aux priorités identifiées par la région, y compris la Ligue arabe -. Ce , rebaptisé BMENA, - Broader Middle East and North Africa - puis - Partnership for progress and a common future - (Partenariat pour le progrès et un avenir commun), est censé servir de référence aux pays du G8. Il détaille une série de mesures concrètes pour renforcer le soutien aux entreprises, promouvoir des programmes pour la démocratie, créer des mécanismes pour améliorer le climat des affaires et les investissements, renforcer la participation des femmes, aider la région A  poursuie la réforme judiciaire, renforcer la liberté d'expression, etc. Il fait référence explicitement aux orientations définies par la Ligue arabe A  l'occasion de son sommet de Tunis le 20 mai 2004, où les chefs d'état, dépassant leurs désaccords, ont décidé un processus de réforme et de modernisation du monde arabe, tout en rappelant que ces réformes ne sauraient AStre menées A  bien sans un juste règlement des conflits régionaux, c'est-A -dire notamment le contentieux israélo-arabe et la question d'Irak.
Ainsi, un cadre a été créé avec les pays du Moyen-Orient, le Forum pour l'avenir, dont la première réunion s'est tenue A  Rabat le 11 décembre 2004. Ce forum, par-delA  la grand-messe réunissant les ministres des Affaires étrangères du G8 et des 21 pays de la zone BMENA invités, confirmait et précisait un certain nombre d'orientations. La présidence britannique du G8 s'emploiera A  poursuie la voie ainsi tracée.
Du côté européen, on s'emploie A  valoriser une action en profondeur, menée depuis de nombreuses années et accomnée de moyens financiers importants. On entend réformer et renforcer le processus de Barcelone qui doit conserver son autonomie et auquel un nouvel élan deait AStre donné A  l'occasion de la conférence qui se tiendra en novembre 2005 dans cette mASme ville, dix ans après son lancement.
En définitive, l'Union européenne, qui, en termes financiers et commerciaux, est de loin le partenaire le plus important des pays du BMENA, saura-t-elle surmonter ses divisions et surtout sa timidité ? Timidité face aux états-Unis dont le volontarisme fascine mASme si parfois il effraie ; timidité A  s'engager dans un Moyen-Orient en chaos où les risques de chocs en retour sont grands.

Un bilan provisoire
Quel bilan provisoire peut-on tirer de ces initiatives ambitieuses mais parfois confuses et contradictoires dans leurs objectifs ? Vivons-nous dans un monde plus sûr, avec un Moyen-Orient silise ou en voie de l'AStre ?
Il est ai que le niveau de démocratie, au sens occidental du terme, est, dans le monde arabe, particulièrement bas. Les études faites sur ce sujet, qu'il s'agisse des Rapports sur le développement humain du PNUD, notamment celui de 2004 - Towards Freedom in The Arab World -, ou de la récente étude britannique de l'Economist Intelligence Unit (voir leau 2), sont accablants, mASme si on peut critiquer la méthodologie utilisée. Cependant, quelques lueurs semblent apparaitre A  l'horizon. Parmi celles-ci urent les frémissements démocratiques qui se sont manifestés récemment dans plusieurs pays : les élections législatives en Irak en janvier 2005 ont constitué un électrochoc pour l'ensemble de la région. L'élection du président de l'Autorité palestinienne, les élections municipales en Arabie Saoudite, la prochaine élection présidentielle en Egypte qui deait AStre pluraliste, sont ou seront autant d'occasions pour accoutumer cette région A  des processus démocratiques. Il est clair que la pression monte non seulement dans les sociétés civiles mais d'une faA§on générale dans les opinions publiques : un débat démocratique se développe. Les oppositions se manifestent parfois de faA§on spectaculaire comme au Liban après l'assassinat de Rafic Hariri. Une réelle liberté d'expression se répand : les médias, chaines de télévision mais également presse écrite, y compris en Arabie Saoudite, osent critiquer les responsables politiques, étant entendu que certaines lignes rouges sont tracées. Le développement du SMS1 et d'Internet permet aux populations de disposer, directement ou indirectement, d'une information très large et en temps réel, dans la plupart des pays. Les sociétés civiles semblent se structurer et le phénomène associatif se répand, y compris dans le domaine des droits de l'homme. Les gouvernements prennent conscience de la nécessité de réformer le secteur public. Une politique de privatisation de l'économie se développe en Egypte, en Jordanie et mASme en Syrie.
Tous ces signes vont dans le bon sens. Il ne faut ni les minimiser, ni les surestimer. On observera que dans le passé des manifestations de démocratie formelle ont pu déjA  exister. Elles sont restées souvent sans lendemain et ont été suivies d'une reprise en mains, parfois brutale. Par ailleurs, une partie des mesures prises ont un caractère plus cosmétique que réel. Elles visent A  faire baisser la pression de l'opinion publique ou de celle venant de l'extérieur, des états-Unis ou d'Europe. Cette piession extérieure est d'ailleurs soigneusement modulée : ainsi l'appel A  la démocratisation est nettement plus pressant A  l'égard de la Syrie que de l'Arabie Saoudite. Jusqu'A  maintenant, A  l'évidence, dans aucun pays du Moyen-Orient, mis A  part l'Irak où la - démocratie - a été imposée de l'extérieur, les gouvernements ne semblent prASts A  partager le pouvoir, A  plus forte raison A  le laisser A  une opposition qui deviendrait majoritaire. Le concept qui fonde la démocratie, celui de l'alternance, n'est pas encore vérilement accepté.
S'agissant de la liberté d'expression, il est indéniable que des progrès ont été accomplis, y compris au niveau de la presse écrite. Il est entendu toutefois que certaines lignes rouges sont mises en place, variables selon les pays : la personne du chef de l'état reste ou. Cette liberté d'expression est cependant plus souvent subie que voulue. A€ cet égard, l'arrivée des techniques nouvelles d'information rend l'intervention du pouvoir difficile, voire impossible. L'évolution technique est A  l'évidence porteuse en elle-mASme du débat démocratique, A  la fois par le contenu des messages qui sont véhiculés et par la pression qu'ils exercent sur le pouvoir qui doit réagir. Ainsi, les chaines de télévision comme Al-Jazira ou Al-Arabiya mettent certains gouvernements arabes dans une situation très inconforle et les ont d'ailleurs incités A  développer une politique active de communication.
Ces observations faites, il est indéniable que la demande de démocratie existe, se renforce et n'est que partiellement lice aux pressions extérieures.
Une autre lueur est apparue début 2005 sur la scène du Moyen-Orient, un apaisement des tensions, le sentiment qu'il y a des fenAStres d'opportunité, la perspective de réduire les deux foyers de crise que sont l'Irak et les territoires palestiniens.
En Irak, après le succès des élections et la mise en place d'un gouvernement démocratique, l'espoir de sortir du chaos existe, mASme si le triangle sunnite reste une zone non contrôlée. Avec une volonté déterminée, les états-Unis ont défini un calendrier de reconstruction des institutions politiques qui connaitra en 2005 plusieurs échéances majeures : approbation du projet de constitution par référendum, nouvelles élections législatives, mise en place d'un nouveau gouvernement. Des signes montrent que certains sunnites pourraient participer A  ce processus. S'agissant des relations israélo-palestiniennes, après l'élection d'Abou Mazen, l'annonce du retrait de Gaza, la trASve des violences, les retraits annoncés de plusieurs villes et un certain allégement des contrôles, l'espoir d'une reprise du processus de paix est revenu.
Cette embellie réelle dans les deux cas ne risque-l-elle pas de n'AStre que provisoire ? En Irak, un long chemin reste A  parcourir ; le poids des erreurs commises au début de l'intervention américaine pèse encore lourdement sur la situation actuelle. Tout reste A  faire : la reconstruction économique, la mise en place des institutions politiques, la reconstitution d'une police et d'une armée efficaces, l'apaisement des tensions ethniques ou religieuses, l'association des sunnites au pouvoir, la fin des violences et le contrôle de tout le pays. Le premier risque pour les états-Unis est que les nouveaux responsables, tiraillés entre des forces contradictoires, lorsqu'ils se sentiront plus en sécurité, ne se mettent d'accord que sur un point : demander le départ des troupes américaines qui, compte tenu de leur comportement, font l'objet d'un rejet massif de la part de la population.
Dans les territoires palestiniens, après quelques signes de détente, la fenAStre d'opportunité semble se refermer et la tension est remontée faute d'améliorations sensibles dans la vie quotidienne des Palestiniens et en raison du refus d'IsraA«l de suspendre la construction du mur ou celle de nouvelles imtations. Le retrait de Gaza reste une opération A  haut risque dont le calendrier est toujours incertain ; cette échéance passée, il apparaitra que les ais problèmes demeurent et qu'ils sont d'autant plus difficiles A  résoudre qu'un blocage psychologique existe entre les deux peuples - emmurés -, pour reprendre le litre d'un lie récemment paru.
Quelles sont les vériles intentions de Sharon ? N'a-t-il proposé le retrait de Gaza que pour mieux tuer la - feuille de route - et achever l'encerclement de Jérusalem par les imtations ? S'est-il converti A  l'idée que puisse exister un état palestinien alors que jusqu'A  maintenant sa politique a été de déstructurer toute forme d'organisation administrative ou politique ? Son exigence, posée comme un préalable, d'obtenir un - démantèlement des infrastructures terroristes - avant toute reprise de la feuille de route n'est-elle pas un moyen de la différer indéfiniment ? Abou Mazen a-t-il une vérile marge de négocia-lion par rapport aux positions défendues par Yasser Arafat ? Autant de questions sensibles qui pèsent sur l'avenir du processus de paix.
L'année 2005 est une période de transition au boni de laquelle il faudra retournera la le des négociations pour aborder les problèmes de fond qui ont fait échouer le processus de paix né d'Oslo : les frontières d'un état palestinien, les colonies de peuplement, le droit au retour, le statut de Jérusalem. Le compromis esquissé A  Taba en janvier 2001, consigné par l'envoyé spécial de l'Union européenne, l'ambassadeur Moratinos, n'est certainement pas acceple par le gouvernement israélien actuel, ni sans doute par son opinion publique.
Un seul pays, en définitive, semble profiter largement de la politique menée par les pays occidentaux et en particulier les états-Unis. Grace A  leur action. l'Iran s'est trouvé débarrassé des deux ennemis qui menaA§aient le plus sa sécurité : les Talibans et Saddam Hussein. Bien plus, le processus électoral est en train démettre en place en Irak un pouvoir chiite, dont de nombreux éléments, notamment le nouveau Premier ministre, Ibrahim Al-Jaafari. ne cachent pas leur sympathie pour l'Iran. A€ Téhéran, on manifeste une satisfaction discrète, mASme si on minimise les liens qui peuvent exister avec la communauté chiite d'Irak.
Des signes positifs sont donc apparus début 2005 au Moyen-Orient : ils sont fragiles et beaucoup d'incertitudes demeurent. Il faudra tout l'appui de la communauté internationale pour que l'essai puisse AStre transformé.
Sur la base de la situation actuelle, quel type de scénario peut-on construire ? Les variables sont tellement nombreuses et les incertitudes tellement grandes qu'une telle recherche est une entreprise hasardeuse et ne peut qu'AStre simplificatrice et caricaturale lorsqu'elle s'applique A  une région aussi mouvante et irrationnelle que le Moyen-Orient. On proposera cependant, avec toutes les précautions d'usage, trois scénarios d'évolution possible (voir encadré I ).
A€ l'évidence aucun de ces scénarios types n'interviendra, mASme si tous les trois ont leur cohérence interne et qu'ils sont revendiqués par certains courants de pensée, de part et d'autre. L'expérience prouve en effet qu'au Moyen-Orient, seul l'imprévu est prévisible et le pire n'est jamais sûr. L'hypothèse la plus probable scia sans doute beaucoup plus composite avec des situations très variables d'un pays A  l'autre. Il est certain néanmoins que le Moyen-Orient sera encore pendant de nombreuses années une zone de turbulences et le contexte restera difficile : l'influence des mouvements islamistes perdurera, le sentiment antiaméricain et anti-occidental restera élevé ; la contestation des valeurs occidentales régnera dans une partie de la population ; le risque terroriste A  l'intérieur et A  l'extérieurde la région pèsera sur la sécurité ; l'évolution du marché pétrolier sera affectée par cette insilité.
Il y aura sans doute - notamment du point de vue de la vie démocratique et de la gestion de l'économie - des bons et des mauvais élèves. Globalement, la sécurité des pays occidentaux risque de rester aléatoire malgré les précautions prises. Le sentiment d'un danger insidieux continuera de peser sur les opinions.

Une conclusion provisoire
L'expérience prouve qu'au Moyen-Orient plus qu'ailleurs, les belles certitudes et les jugements définitifs sont rapidement démentis et les anticipations, le plus souvent aléatoires.
Quelques repères peuvent AStre avancés pour nourrir la réflexion. 11 n'est pas sûr que les politiques menées par les pays occidentaux, notamment les états-Unis, représentent une réponse appropriée A  la nature et A  l'ampleur des défis posés par la situation au Moyen-Orient. Le diagnostic des causes profondes de son évolution récente n'est sans doute pas tait avec suffisamment de lucidité et d'autocritique. Il n'est pas sûr non plus que, dans la guerre contre le terrorisme, on ait choisi la bonne stratégie, les bonnes cibles et les moyens adaptés. Cependant une évolution est perceptible et l'Europe peut apporter son expérience de la lutte contre le terrorisme A  un pays qui, jusqu'A  une date récente, ne l'avait jamais connu sur son sol.
La démocratie est le fruit d'un long apprentissage et d'une culture. Les sociétés moyen-orientales restent encore, pour la plupart, marquées par des structures traditionnelles, voire féodales. Cependant, elles bougent et, pour certaines, sont en effervescence. Plaquer un modèle démocratique occidental est une tentative risquée. C Egypte et, A  plus forte raison, l'Arabie Saoudite ne sont pas l'Allemagne ou le Japon de l'après-guerre. La démocratie au sens large du terme, c'est-A -dire la possibilité de choisir son gouvernement et de s'exprimer librement, ne peut se développer et s'enraciner que si elle s'appuie sur des structures sociales et culturelles réceptives.
La démocratie A  elle seule ne peut assurer au monde, et en particulier A  l'Occident, la sécurité. Il faut s'attendre d'ailleurs A  ce que, dans certains cas, des élections vérilement démocratiques fassent émerger des gouvernements très hostiles aux pays occidentaux en général et aux états-Unis en particulier.
S'il y a un choc, ce n'est pas entre la civilisation occidentale et le monde islamique ; la ligne de fracture passe A  l'intérieur des pays musulmans et notamment arabes. Le lie récent de Gilles Kepel, déjA  cité, est A  cet égard tres éclairant. Il y a de aies forces de progrès qui agissent A  l'intérieur des sociétés civiles.
Il faut les conforter sans les compromettre. Un appui trop ostensible ne peut AStre qu'inefficace, voire contre-productif. Les pays européens essaient d'influencer l'Administration Bush en ce sens. Ils y parviennent, non sans mal.
Des lueurs d'espoir sont apparues. Elles sont fragiles. 11 faut les préserver mais le chemin vers un Moyen-Orient sle, prospère et pacifique, est encore long et se fera dans la douleur. Les faits sont tAStus et les problèmes A  résoudre complexes car ils impliquent des pesanteurs historiques et des comportements psychologiques.
Le bilan intérimaire que l'on peut dressera ce stade doit AStre fait avec lucidité et s'éloigner du politiquement correct : globalement, le monde est sans doute moins sûr maintenant qu'il y a cinq ans comme le constate le secrétaire général des Nations unies dans sa déclaration intitulée - Dans une liberté plus grande. Développement, sécurité et respects des droits de l'homme pour tous -, publiée le 21 mars 2005, et la responsabilité en incombe, pour l'essentiel, A  l'évolution de la situation au Moyen-Orient. Les analyses américaines les plus récentes sont A  cet égard tout A  fait lucides.
Le Moyen-Orient restera encore, pour un temps indéterminé, une zone de hautes turbulences. Le monde, notamment l'Europe en raison de sa proximité géographique, va devoir vie dangereusement, entre fausses peurs et ais problèmes, pendant quelque temps encore. La lucidité ne fait pas obstacle A  l'action. Encore convient-il que celle-ci repose sur un diagnostic juste, tende A  l'apaisement des esprits et A  la solution des ais problèmes.





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