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ECONOMIE

L'économie, ou l'activité économique (du grec ancien οἰκονομία / oikonomía : « administration d'un foyer », créé à partir de οἶκος / oîkos : « maison », dans le sens de patrimoine et νόμος / nómos : « loi, coutume ») est l'activité humaine qui consiste en la production, la distribution, l'échange et la consommation de biens et de services. L'économie au sens moderne du terme commence à s'imposer à partir des mercantilistes et développe à partir d'Adam Smith un important corpus analytique qui est généralement scindé en deux grandes branches : la microéconomie ou étude des comportements individuels et la macroéconomie qui émerge dans l'entre-deux-guerres. De nos jours l'économie applique ce corpus à l'analyse et à la gestion de nombreuses organisations humaines (puissance publique, entreprises privées, coopératives etc.) et de certains domaines : international, finance, développement des pays, environnement, marché du travail, culture, agriculture, etc.


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Du troc au réseau : les marchés dans l'histoire



Du troc au réseau : les marchés dans l'histoire
Toutes les sociétés humaines ont pratiqué l'échange. Mais les formes de cet échange ont infiniment rié au cours de l'histoire.



Sciences Humaines : Vos recherches portent sur l'origine de la monnaie et le mécanisme des échanges dans les sociétés primitives. Dans ces sociétés archaïques, le marché est-il présent? A-t-il toujours existé?
Jean-Michel Servet : Au XVIII siècle, les économistes ont construit une fable selon laquelle l'échange marchand aurait existé depuis les premiers temps de l'humanité. Le troc primitif ne serait que l'embryon d'un échange marchand. Cela a conduit A  assimiler, je crois A  tort, toute forme d'échange de biens avec la notion de marché.
Partons d'un curieux exemple d'échange primitif appelé autrefois -troc muet- ou -échange silencieux- qui a donné lieu A  d'abondants commentaires chez les économistes et ethnologues A  la fin du XDC siècle. L'-échange silencieux- est une institution que l'on retrouve dans de nombreuses régions du monde et qui se pratique de la faA§on suinte : un groupe d'hommes dépose dans un endroit désert, sur une plage ou sur une clairière, les produits qu'il souhaite échanger avec une autre tribu. Puis les hommes se retirent au loin en laissant leurs biens sur le sol. Survient alors un autre groupe qui, s'il la juge suffisante, prend -l'offrande- et dépose ses propres biens. Il se retire alors A  son tour. Aux termes de quelques allers-retours, l'échange est réalisé sans que les hommes n'aient été en contact entre eux. Ce type de troc très particulier a été observé sous des formes diverses dans plusieurs régions du monde. Hérodote en parle A  propos des rapports entre Maures et Noirs A  l'ouest de Gibraltar. On le rencontrait il y a peu encore en Sibérie, chez les tribus Chuckchee dans leurs rapports avec les habitants d'Alaska. Les Negritos des Philippines pratiquaient la mASme technique d'échange avec les habitants chrétiens de la région. On la retrouve encore aux Indes, dans le Pacifique, en Indonésie, en Russie centrale, etc. Or, dans cet exemple de l'échange silencieux, l'erreur est de croire que nous serions en présence d'un -échange marchand primitif- visant A  l'acquisition de biens utilitaires au meilleur prix.
Nous sommes plutôt dans le cadre d'une relation sociale très codifiée et visant ant tout l'élissement de liens sociaux. Dans ces transferts de biens, la relation sociale prime sur le contenu de l'échange. Le troc silencieux n'est qu'un cas très spécifique de l'échange qui, dans les sociétés primitives, peut prendre des formes très diverses. J'ai étudié au début des années 70 en Basse-Casamance, au sud du Sénégal, une forme d'échange particulière que l'on appelle -échange A  volume égal- et qui semblerait AStre encore pratiquée en Guinée-Bissau chez les Flup, une population Diola. Dans cet - échange A  volume égal-, on donne, par exemple, un panier de riz contre le mASme volume d'arachide. A Buka Passage, en Nouvelle-Guinée, il y a un type d'échange similaire, dit - charge contre charge-, dans lequel des femmes échangent entre elles les charges qu'elles portent sur le dos.
Dans ces deux formes d'échanges, il y a bien sûr une inégalité dans la leur des produits. Les gens qui les pratiquent en sont d'ailleurs parfaitement conscients. Si vous leur faites remarquer que, dans l'échange, il n'y a pas équilence comple des marchandises, on vous répondra que c'est bien lA  une idée de -Toubab- (de Blanc), de vouloir obtenir une égalité en terme de temps de trail ou de la leur des biens. LA  encore, ce qui compte, c'est la relation sociale plus que la leur respective des produits. Dans Age de pierre. Age d'abondance (1), Marshall Sahlins a donné de très nombreux exemples où l'échange primitif n'est pas déterminé par l'utilité des biens ou la détermination des prix mais par le maintien d'une relation sociale.

SH : Dire que - la relation sociale prime sur l'utilité des biens - peut s'entendre de deux faA§ons : faut-il entendre par lA  que le but ultime de la relation est de nouer des contacts sociaux ? Ou faut-il comprendre que le but peut AStre utilitaire mais que le moyen (l'échange) passe par des règlements sociaux non marchands ?
J.-M.S. : H y a les deux. D'une part, dans les échanges dits primitifs, l'échange ne porte que rarement sur des biens de première nécessité mais souvent sur des biens -symboliques- : objets précieux, ornements, etc. Maurice Godelier a montré, dans une très belle étude sur l'échange du sel en Nouvelle Guinée, que l'usage de ce sel est symbolique ; il est utilisé pour les cérémonies et non pour la consommation courante. Parfois l'échange a un rôle interne. Dans les groupes hiérarchisés, ce sont les dominants, ou -Big Men-, qui contrôlent l'échange avec autrui et obtiennent ainsi des biens qui leur confèrent prestige et puissance.

SH : Peut-on résumer cela en disant que ce sont les échanges qui sont universels mais pas le marché?
J.-M.S. : Exactement. Nous transposons nos propres conceptions sur les sociétés anciennes en appelant -marché- tout ce qui relève en fait d'une relation beaucoup plus générale : l'échange entre groupes. La plupart des sociétés dites -primitives - ont des contacts avec leurs voisins et entretiennent avec eux des relations. Les habitants des iles mélanésiennes, qui vivent pourtant A  des centaines de kilomètres les uns des autres, entretiennent par exemple d'intenses relations. Ces relations sont de différents types : transferts de biens, échange de femmes, relations guerrières, dons, etc. D y a une pluralité de transferts de biens qui ne sont pas commandés par un stria échange marchand, réglé par le mécanisme des prix.

SH : Ce regard anthropologique sur les relations d'échange peut-il AStre alors


transposé pour observer nos propres sociétés?

J.-M.S. : Le marché, tel qu'il est conA§u par la plupart des économistes, est une utopie. Au demeurant, mASme des théoriciens libéraux comme Léon Walras ou Friedrich von Hayek admettent que le marché pur est une -utopie pour l'avenir- et non ce qui se passe dans les échanges actuels. L'idée d'un échange où le prix des biens est fixé par le jeu de l'offre et de la demande ne correspond que rarement A  la réalité. Plutôt que raisonner sur des modèles abstraits de marché censés refléter la réalité, il me semble plus fertile d'inverser la perspective et d'observer quels sont les déterminants réels de la formation des prix.
J'ai étudié récemment les conditions de formation des prix sur un produit très particulier : les conduites en fonte utilisées pour l'adduction d'eau. Le prix de ce produit, lui-mASme déterminé par l'offre et la demande, détermine-t-il le fait que l'on installe plutôt des tuyaux en plastique ou des tuyaux en fonte ductile ? Il est frappant de constater que le nombre de tuyaux en fonte installés en France est beaucoup plus important qu'A  l'étranger : en Italie, au Portugal, en Esne, aux Pays-Bas, etc. Le coût de transport de ces tuyaux étant assez réduit, on est obligé de rendre compte de l'importance de leur imtation massive en France par d'autres raisons que le simple prix. On peut trouver des explications historiques comme une tradition franA§aise dans la fabrication de la fonte, et ce, depuis l'époque de Louis XTV. En fait, on constate surtout l'existence d'une grande société franA§aise qui utilise des réseaux d'influence, qui dépense des sommes importantes pour entretenir des relations avec les élus locaux, et -encourage- l'emploi de ces tuyaux Bref, que le choix n'est pas déterminé par un élément central qui est le prix. Produit par produit, on pourrait s'interroger sur les mécanismes de fixation des prix. Par exemple, dans le système boursier qui est souvent pris comme le modèle pur du marché, l'intervention des grands investisseurs institutionnels et des grandes banques centrales est un élément fondamental de régulation. En prenant en compte l'importance des réseaux d'influence, les mécanismes réels des échanges économiques apparaissent sous un tout nouveau jour.

SH : Quels sont les autres facteurs non directement économiques qui interviennent dans la fixation des prix?
J.-M.S. : L'existence de réseaux de relations joue un rôle important dans les relations dites -marchandes-. Or, la -confiance- est un des éléments essentiels qui cimentent un réseau de relations. Sans confiance, pas de commerce possible. Pour prendre un exemple moderne, les relations boursières se font par téléphone. Or, un tel système d'achat-vente suppose que chacun tienne parole et que la confiance règne. L'histoire du commerce et de la grande finance s'est souvent élie sur des bases ethniques et familiales parce que les gens se connaissaient et nouaient entre eux des relations de fidélité (voir l'encadré e suinte).

SH : Vous avez étudié particulièrement les origines de la monnaie. Peut-on aborder cette histoire de la monnaie sans la relier aux mécanismes du marché? J.-M.S. : Selon la vision traditionnelle, l'origine de la monnaie proviendrait du troc des sauges. Ceux-ci, pour des raisons fonctionnelles, auraient adopté un instrument d'échange beaucoup plus pratique qui est l'équilent monétaire. Mais les choses ne se sont pas passées ainsi.





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